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Avant Luca Brecel, une Belge était 9 fois championne du monde de snooker mais personne n’en parle
15·05·23

Avant Luca Brecel, une Belge était 9 fois championne du monde de snooker mais personne n’en parle

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

Photo de Diego Arufe sur Unsplash

Auteur
Virginie Dupont
Traductrice Virginie Dupont

Oui, elle a entendu qu’on chantait les louanges de Luca Brecel ces derniers jours. Et oui, elle salue le fait qu’un Belge ait remporté le championnat du monde. « Pour notre sport, c’est formidable que Luca soit le premier joueur originaire d’Europe continentale à décrocher ce titre. Il fait souffler un vent nouveau sur le snooker, je lui en suis très reconnaissante. Mais il est le premier homme belge, pas le premier Belge. On m’a oubliée de la même manière lorsque Luca a été nommé premier Belge à fouler le Crucible Theatre (la salle où se déroule la Coupe du monde, ndlr). Je m’étais assise sur cette même chaise, dans la Mecque du snooker, plusieurs années auparavant. »

Wendy Jans a été neuf fois championne du monde. La fédération de snooker féminin la décrit comme « la meilleure joueuse de sa génération ». « Une description flatteuse, certes, mais il est regrettable que le snooker féminin soit sous-estimé à tous les niveaux : médiatisation, soutien financier… Je ne peux pas faire de mon sport un métier, même si je compte parmi les meilleures au monde dans ma discipline. Je ne prétends pas devenir millionnaire, mais ça me coûte plus que ça me rapporte. »

Une championne du monde gagne cent fois moins que son homologue masculin. « Luca Brecel a reçu plus d’un demi-million, la championne du monde environ 5 000 euros. C’est à la fois triste et dramatique. Dans les autres tournois de snooker, les gains sont beaucoup moins élevés. »

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Tout gagné

Pour la énième fois, elle s’excuse, interrompt la conversation, va servir un café ou une bière au comptoir. Depuis 17 ans, elle tient une salle de snooker, au cœur de Pelt. Enfant et adolescente, elle jouait trois à quatre heures par jour. Depuis qu’elle a ouvert son établissement, elle s’entraîne beaucoup moins, confie-t-elle. « Je passe ma vie au travail. Si j’ai un peu de temps libre, je ne joue pas forcément. J’aime toujours ce sport, mais j’ai un peu l’impression d’en avoir fait le tour. Et financièrement, je n’en retire rien. »

Wendy Jans a remporté ses titres mondiaux chez les amateurs. Seules quatre femmes bénéficient d’un statut professionnel et sont autorisées à concourir avec les hommes. « Accorder aux femmes un contrat professionnel et en faire une discipline olympique, voilà les exigences qui sont sur la table. »

« Même chez les hommes pros, seuls les meilleurs parviennent à gagner leur vie. Et les meilleures femmes, pros comprises, sont loin derrière les hommes. »

Il s’en est fallu de peu pour Wendy Jans l’an dernier. À une boule noire près, elle a manqué le titre mondial et le contrat pro correspondant. « Cela dit, je l’aurais refusé. Même chez les hommes pros, seuls les meilleurs parviennent à gagner leur vie. Et les meilleures femmes, pros comprises, sont loin derrière les hommes. Elles peuvent leur donner du fil à retordre, sans pouvoir briguer une place dans le top 32. Toutes les professionnelles reçoivent 500 euros au premier tour ; un montant insuffisant pour couvrir les frais d’un tournoi en Angleterre. De plus, aucune femme n’a vraiment envie de se mesurer aux hommes. »

En effet, selon elle, femmes et hommes ne devraient pas jouer ensemble.  « Des recherches ont montré que les hommes peuvent se concentrer sur une seule chose, ce qui n’est pas le cas des femmes. Je le constate moi-même. Je peux faire la même chose qu’un homme sur une table de snooker, mais avec moins de constance. Nous, les femmes, nous nous déconcentrons plus rapidement. Il faut séparer les hommes et les femmes dans le snooker. Et commencer par promouvoir notre circuit, à nous les femmes, de manière décente. Mais quoi qu’il en soit, j’ai manqué le coche. »

Wendy Jans a également abandonné l’espoir de se voir un jour désignée Sportive de l’année. Elle a souvent été nominée, en vain. « Autrefois, j’acceptais ces invitations, par politesse. Je ne le fais plus. On devrait honorer chaque champion du monde ayant décroché ce titre dans l’année. Mais ce n’est pas comme ça que ça marche. Cela dit, si ça ne tient qu’à moi, Luca peut être le Sportif de l’année. »

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