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Qui est Conner Rousseau, le président de Vooruit qui casse les codes des partis traditionnels ?
03·07·23

Qui est Conner Rousseau, le président de Vooruit qui casse les codes des partis traditionnels ?

Un an avant des élections qui s’annoncent cruciales pour l’avenir du pays, DaarDaar part à la rencontre des présidents de partis flamands. Qui se cache derrière l’homme ou la femme politique? Comment sont-ils arrivés en politique ? Comment voient-ils l’avenir du pays ?

Après Sammy Madhi (CD&V), Nadia Naji (Groen), Egbert Lachaert (Open VLD), Raoul Hedebouw (PTB) et Tom Van Grieken (VB), nous poursuivons notre série de portraits avec Conner Rousseau, président de Vooruit depuis le 8 novembre 2019. Au programme : une biographie publiée le lundi, ainsi qu’une interview diffusée le mercredi.

[Projet soutenu par le Fonds pour le journalisme]

Temps de lecture : 6 minutes
Aubry Touriel
Auteur

Sa mère était bourgmestre de Saint-Nicolas. Son père, conseiller communal à Nieuport. Élevé entre le dialecte de Flandre occidentale et orientale, Conner Rousseau s’est lancé tôt en  politique. À 26 ans seulement, il prend en 2019 les commandes du sp.a. Adepte d’un langage jeune, il casse les codes de la politique classique. Très actif sur les réseaux sociaux et omniprésent dans les médias, Conner Rousseau est devenu l’un des politiques les plus populaires de Flandre.

Durant sa jeunesse, Conner Rousseau partageait son temps entre deux résidences. Il passait ainsi huit mois par an chez sa mère à Saint-Nicolas et le reste de l’année à Nieuport avec son père. Il a dans ce cadre grandi dans une famille « bilingue » : entre le Oost Vlaams et le West Vlaams : « Mon cœur bat à Saint-Nicolas, mais je trouve le dialecte de Flandre occidentale bien plus chouette », confie-t-il.

« Ma mère et mon père sont deux personnes totalement différentes, comme le jour et la nuit. Par contre, ce sont tous les deux des bourreaux de travail, nous avons toujours été élevés à la dure. Si on voulait quelque chose, il fallait travailler pour l’obtenir. Mes parents disaient toujours : « Traite les autres comme tu veux qu’ils te traitent » », raconte -t-il.

Camps de vacances

Le père Rousseau était directeur d’un centre de vacances des Mutualités socialistes à la côte. Les camps de vacances semblent avoir semé la graine qui mènera à son engagement politique : « Je n’ai jamais manqué de rien à la maison. Les camps d’été accueillaient beaucoup de jeunes qui vivent dans la pauvreté. Le public est divers : certains sont placés dans des institutions, d’autres ont des problèmes à la maison ou des troubles autistes. J’ai alors découvert mes idéaux socialistes. »

Passionné de tennis

Conner Rousseau a toujours été fan de tennis. De jour comme de nuit, il restait éveillé pour regarder les matchs de Justine Henin et de Kim Clijsters. « J’ai toujours une application sur mon portable avec tous les résultats de tennis. Je la consulte tous les jours », précise-t-il.

Après avoir gagné un concours dans le magazine pour ado Joepie, il a pu rencontrer Justine Henin à Charleroi. L’année dernière, il a par ailleurs réalisé un autre rêve d’enfant : aller à Wimbledon.

Ministre des enfants

L’engagement de Conner Rousseau avait déjà commencé sur les bancs de l’école. À 12 ans, il devint ainsi ministre des enfants en charge des droits de l’enfant et de la protection sociale. Chaque ville de Flandre pouvait envoyer un de ses élèves au Parlement des enfants. Chaque « parlementaire » pouvait présenter un projet et être élu ministre des enfants dans un domaine particulier.

Le moment le plus marquant de ce mandat d’un an, c’est quand il a assisté au procès de Marc Dutroux à Arlon en 2004. « J’ai pu faire des reportages à la télévision pour Karrewiet, le journal télévisé des jeunes de la VRT. »

Organisateur d’événements

Adolescent, le côté entrepreneur en Conner Rousseau se développe : bals, fêtes, festivals… l’étudiant en droit à l’Université de Gand ne manque pas d’idées. Après avoir visité un ami qui se trouvait en Erasmus à New York, il organise un tournoi de beerpong, un jeu qui allie dextérité et boissons alcoolisées. « La première édition était directement sold out et on a dû trouver une salle plus grande. Chaque année, environ 800 visiteurs assistaient à notre tournoi de beerpong et c’était très amusant », se souvient-il.

Responsable, il ne voulait cependant pas que les participants repartent éméchés de cet événement. C’est la raison pour laquelle il a mis en place un « vestiaire à clés ». « Les joueurs devaient remettre leur clé de voiture à l’avance pour éviter que certains ne reprennent le volant saouls. » Il a par ailleurs lancé le festival de techno Walhalla près de Saint-Nicolas qui continue d’ailleurs de se tenir chaque année.

Fils de…

Habituellement, en province de Flandre orientale, ce sont les dynasties politiques libérales qui font la loi. C’était sans compter sur l’arrivée de Conner Rousseau. Fils de Christel Geerts, ancienne bourgmestre socialiste de Saint-Nicolas et de Jo Rousseau, conseiller communal à Nieuport, Conner Rousseau est aussi l’arrière-petit-fils de Maria Desmet, une des premières sénatrices belges.

Ces deux parents qui ont baigné dans la politique lui ont inculqué trois valeurs : travailler dur, être solidaire et être inclusif. « Donner beaucoup d’opportunités et ensuite travailler très dur pour faire quelque chose avec ces opportunités. C’est peut-être la ligne de conduite la plus importante que j’ai reçue de mes parents », commente-t-il.

Faute de baby-sitter, Conner Rousseau devait souvent suivre sa mère dans sa vie professionnelle. Il gambadait  souvent dans la maison communale de Saint-Nicolas et s’amusait à espionner à la porte des autres partis : « Je trouvais ça super intéressant de voir ce qu’il se passait en coulisses. »

Le parti Vooruit remercie Rousseau et Molenbeek pour l’attention offerte

Entrée en politique

« Je ne supporte pas l’injustice et j’ai surtout la volonté d’agir contre ces injustices. Contrairement aux partis extrémistes, quand je suis confronté à un problème, je ne vais pas le monter en épingle, je vais tenter de le résoudre », déclare Conner Rousseau.

C’est entre autres pour cette raison qu’il s’est lancé en politique. Il a d’abord commencé en coulisses, comme consultant en communication pour la ministre flamande Freya Van den Bossche et le président du parti John Crombez. De 2017 à 2019, il a été directeur de la communication de sp.a.

Lors des élections flamandes de 2019, le parti l’a choisi de manière inattendue comme tête de liste en Flandre-Orientale, il est alors élu avec 17.438 voix de préférence et est immédiatement nommé chef de groupe de son parti au Parlement flamand Quelques mois plus tard, en septembre 2019, il se présente à la présidence du sp.a. Le 8 novembre 2019, il est élu par les membres du parti avec 72 % des voix.

Premier jour

Conner Rousseau se souvient du jour de son élection à la tête du parti socialiste flamand comme si c’était hier : « C’était dans les anciens bureaux du parti. Le soir, j’ai offert un fût à Gand avec des amis »

A peine élu président, il se jette dans la fosse aux lions et participe aux négociations gouvernementales. En mai 2020, lors de la longue formation du gouvernement (2019-2020), il prend l’initiative avec Paul Magnette, président du PS, de relancer les négociations enlisées après la formation du gouvernement provisoire Wilmès II en mars de la même année.

Le 4 septembre 2020, il est nommé préformateur par le roi, aux côtés du président de l’Open Vld, Egbert Lachaert. Ensemble, ils parviennent à un premier accord pour former la coalition Vivaldi qui aboutira quelques semaines plus tard au gouvernement De Croo. « J’ai constitué un accord de gouvernement à 27 ans, et toi ? », demande-t-il fièrement.

Le SP.A devient « Vooruit » : un nom vintage avec une touche macronienne… et après?

Vooruit : en avant

Quand il a hérité du sp.a, le parti était déjà à la dérive depuis une vingtaine d’années. À son arrivée, il restructure le parti et le rebaptise “Vooruit”, “en avant”.

Il explique le choix de ce nom : « Au 19e siècle, il y a eu une grande famine et les socialistes gantois ont eu l’idée de créer une grande boulangerie, la coopérative socialiste Vooruit. Ce nom, Vooruit, est dynamique et très positif. On va de l’avant. Personne ne veut reculer ou rester immobile. »

Il existe néanmoins une deuxième explication moins connue : le nom « Vooruit » vient aussi d’une série télévisée flamande comique : La Famille Backeljau. « Au moment où ma mère s’est lancée en politique, le personnage principal de mon émission préférée quand j’étais petit s’est aussi lancé en politique et son parti s’appelait également Vooruit. »

Homme des médias

À l’instar de l’ancien président du parti socialiste flamand, Patrick Janssens, Conner Rousseau présente son parti comme une marque dont il est le produit phare. Son arme secrète : les réseaux sociaux. Né en 1992, il a grandi avec et en maîtrise les codes. Avec près de 150.000 abonnés sur Instagram, « King Connah » (son pseudo) est le politicien flamand le plus suivi.

Médiagénique, il participe aussi régulièrement à de nombreuses émissions de divertissement. Rousseau a cependant refusé de participer à l’émission Special Forces, contrairement à Georges-Louis Bouchez. Il a préféré chanter dans un costume de lapin dans The Masked Singer, l’une des émissions les plus regardées de Flandre et lors de laquelle il a atteint la finale.

Début juin, les membres de Vooruit réélisent à 95,6% des voix Conner Rousseau à la tête du parti pour quatre ans. Rien ne semblait pouvoir arrêter le phénomène Conner. Quelques semaines plus tard, il diffuse une vidéo dans laquelle il sort du placard et annonce qu’il aime aussi bien les hommes que les femmes. Certains observateurs y voient une manière d’étouffer des rumeurs concernant des enquêtes préliminaires ouvertes à son encontre, les médias évoquant d’éventuels “comportements inappropriés” envers des mineurs.

Alors que son parti et sa popularité grimpent en flèche dans les sondages, ces récentes rumeurs viendront-elles troubler l’avenir de ce « goldenboy » de la politique flamande ?


Ne ratez aucun épisode de cette série:

Sammy Mahdi (CD&V)semaine du 22 mai

Nadia Naji (Groen): semaine du 29 mai

Egbert Lachaert (Open Vld)semaine du 5 juin

Raoul Hedebouw (PTB/PVDA): semaine du 12 juin

Tom Van Grieken (Vlaams Belang): semaine du 19 juin

Conner Rousseau (Vooruit): semaine du 3 juillet

Bart De Wever* (N-VA): semaine du 10 juillet

* Bart De Wever a refusé de participer à notre série d’interviews

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