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«Moins d’immigration, plus de Flandre»: pourquoi le programme du Belang est irréaliste
25·04·24

«Moins d’immigration, plus de Flandre»: pourquoi le programme du Belang est irréaliste

Temps de lecture : 4 minutes Crédit photo :

(c) Belga

Contre le wokisme, contre la Vivaldi, contre les « vilains petits Mohamed » qui importunent les autres enfants sur les aires de jeux, contre l’Union européenne. La liste de ce à quoi le Vlaams Belang s’oppose est longue. Dans son programme électoral intitulé « Vlaanderen weer van ons » (« Rendons la Flandre aux Flamands », traduction libre, N.d.T.), le parti nationaliste dresse également la liste des points auxquels il est favorable.

Dans ce document de 97 pages au style coulant, le Vlaams Belang énumère un grand nombre des thèmes qui lui sont chers : les organisations de gauche ou d’extrême gauche et les subventions démesurées dont elles profitent, la censure de la VRT ou l’idéologie woke qui empoisonnerait l’enseignement. On retrouve également dans ce manifeste de nombreux points communs aux partis « traditionnels », dont plusieurs propositions en matière de santé, de pensions, de pouvoir d’achat, de fiscalité.

Dans tous ces domaines, le Belang place la barre très haut, comme s’il pouvait résoudre tous les problèmes du monde d’un claquement de doigts. Terminé les listes à rallonge pour les personnes handicapées en attente d’indemnités, fini les pénuries de logements sociaux et moyens supplémentaires à gogo pour la justice – pour ne citer que quelques mesures phares.

Ajoutons que le parti veut porter la pension minimale à 1 799 euros, augmenter le revenu mensuel garanti de 5 % et relever toutes les allocations au niveau du seuil de pauvreté. Celles et ceux qui ne travailleraient qu’à temps partiel pour s’occuper de leurs enfants pourront même compter sur une « allocation parentale » complémentaire. Le Vlaams Belang propose également de plafonner le coût des maisons des retraites et de l’enseignement secondaire.

Autant de propositions qui auraient toute leur place dans le programme d’un parti socialiste. Sauf que les socialistes, eux, associent la plupart du temps à leurs propositions un relèvement de l’impôt afin de garantir leur finançabilité. Le Vlaams Belang, quant à lui, ne prévoit que de baisser les contributions. Il souhaite, par exemple, que l’impôt sur les sociétés passe à 20 % et que les charges sur le travail soient réduites. Les droits d’enregistrement sur la première maison seront également revus à la baisse, de même que les droits de succession.

Des économies sur l’un ou l’autre poste ? Non, rien de tout cela ne figure pas au programme, à l’exception de quelques éléments marginaux comme l’abolition de la monarchie, la privatisation partielle de la VRT et la suppression du centre pour l’égalité des chances d’Unia.

Un double credo

Le monde des possibles semble illimité. Or, en l’absence d’impôts supplémentaires ou de mesures d’économie, comment le parti compte-t-il honorer toutes ces promesses coûteuses ? Pour le Vlaams Belang, deux réponses s’imposent sur toutes les autres. On les retrouve, tel un double fil rouge, tout au long du programme : immigration et indépendance de la Flandre.

Chaque mesure qui coûte de l’argent au contribuable est ainsi financée de cette façon. Par exemple, sur l’augmentation des pensions; le programme nous dit : « Notre plan de pension n’est réalisable et finançable que dans une Flandre indépendante ». Sur la famille :  « L’ensemble de ces mesures au profit des familles nécessitent de l’argent, que nous obtiendrons grâce aux économies réalisées sur l’immigration. » Sur la question des listes d’attente pour les personnes avec handicap : « Afin de dégager les moyens nécessaires pour financer cette priorité, il conviendra de procéder à la scission de la sécurité sociale. » L’intégralité des réductions d’impôts seront également financées par la division du pays ou l’enrayement de l’immigration.  Les économies réalisées dans le domaine de la sécurité sociale proviennent quant à elles de la « création d’un fonds de sécurité sociale distinct pour les étrangers non européens. »

Une coquille vide

« Le projet du Vlaams Belang est-il réaliste et finançable ? » se demande le parti sous la forme d’une question rhétorique. « Pas dans le contexte belge, mais assurément dans une Flandre indépendante. »

Pour savoir combien cette Flandre indépendante rapporterait exactement, le Vlaams Belang s’appuie sur les calculs de Lode Vereeck, qui coordonne le service d’études du parti. Dans son livre Bodemloos (« Le puits sans fond », traduction libre, N.d.T.), l’économiste parle de transferts atteignant 13 milliards d’euros par an de la Flandre vers la Wallonie. De l’argent qui, une fois l’indépendance acquise, « reviendra aux Flamands et ne disparaîtra plus dans le gouffre abyssal de la Belgique francophone ».

Si les recettes de la migration sont moins bien définies, le parti formule tout de même une série de propositions concrètes. Ainsi envisage-t-il de renforcer les conditions du regroupement familial et de réduire l’accueil des demandeurs d’asile, qui, selon le parti, coûterait plus d’un milliard d’euros par an. Il propose également des économies concrètes sur la politique d’intégration civique (inburgeringsbeleid) – que le parti rebaptise « politique d’accommodation » (aanpassingsbeleid) – en répercutant notamment l’intégralité du coût dudit programme sur le primo-arrivant qui en bénéficie.

Selon le parti, l’ensemble de ces mesures devrait conduire à un arrêt de l’immigration. Le programme ne précise pas combien celui-ci rapportera(it).

À première vue, ce programme a tout d’un bon slogan, mais dans la pratique, il n’est qu’une coquille vide – précisément pour cette raison. Scinder le pays, de quelque façon que ce soit, est actuellement impossible. De surcroît, les clés d’une telle réforme de l’État se trouvent au niveau fédéral. Si le Vlaams Belang dispose aujourd’hui d’une petite chance d’entrer dans le gouvernement flamand, au niveau fédéral, en raison du veto du camp francophone, il n’en a aucune.

Idem dito sur la migration. La politique d’intégration civique est certes une compétence de la Flandre, mais les principales compétences en matière de migration relèvent toujours du fédéral. Et en tout état de cause, la question reste de savoir si toutes ces propositions en matière de migration génèreraient bel et bien des rentrées budgétaires. Quoi qu’on fasse, les réfugiés et les migrants en quête d’une vie meilleure continueront d’affluer dans notre petit pays, au cœur de l’Union européenne. Un arrêt complet de l’immigration (immigratiestop, N.d.T.) – comme s’intitule d’ailleurs le dernier essai de Tom Van Grieken – relève de la pure fiction politique.

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