Melissa Depraetere vient d’être nommée présidente de Vooruit. Les socialistes flamands n’ont pas perdu de temps ce week-end : une demi-journée, à peine, s’est écoulée entre la démission de Conner Rousseau, dans la foulée des propos racistes qu’il avait tenus, et la désignation, samedi matin, d’une nouvelle dirigeante à la tête du parti.
Ce choix n’a rien d’étonnant : âgée de 31 ans, la responsable originaire de Flandre-Occidentale a pour mission de maintenir l’élan qui avait permis au jeune Conner Rousseau de sortir son parti de l’insignifiance politique ces dernières années. Reste à savoir dans quelle mesure elle continuera de s’appuyer sur lui. Issus de la même génération, tous deux ont émergé en politique à la faveur de l’opération de renouvellement impulsée sous la présidence de John Crombez. Il n’est pas anodin que, samedi, Melissa Depraetere ait encore utilisé l’expression « compagnon de route » (en français) pour qualifier Conner Rousseau : ils ont connu des parcours politiques parallèles et assumaient, l’un pour l’autre, le rôle de personne de confiance. Melissa Depraetere s’est certes distancée, ces derniers jours, des propos déplacés de Conner Rousseau, mais à contrecœur.
Il faudra pourtant une coupure nette pour que la nouvelle présidente puisse limiter les dégâts causés par son prédécesseur — dont l’ampleur ne pourra se mesurer que dans les mois à venir. Melissa Depraetere parviendra-t-elle à se maintenir à flot dans les sondages, à présent qu’un vent contraire s’abat sur le parti, qui l’avait jusqu’alors en poupe ? Les électeurs dont Vooruit était parvenu à regagner la faveur resteront-ils à bord ou tourneront-ils le dos au parti — rebutés par les propos de Conner Rousseau ou, à l’inverse, déçus de sa démission ?
Qui est Conner Rousseau, le président de Vooruit qui casse les codes des partis traditionnels ?
Il est d’ores et déjà évident que Melissa Depraetere cherche à appliquer la même stratégie que Conner Rousseau : mettre en garde contre l’extrême droite et brandir Vooruit comme seul rempart possible. Mais portera-t-elle ses fruits avec, à la barre du navire, une responsable politique bien plus classique ? Si elle fonctionnait avec Conner Rousseau, c’est justement parce qu’il était parvenu à se faire un nom en un rien de temps et qu’il avait fait une marque de son prénom. Or, la démission du « lapin chantant » met également fin à ses interventions sur les réseaux sociaux, qui permettent de toucher un vaste public à peu de frais, notamment les jeunes apolitiques, sensibles à la polarisation entre la gauche et la droite.
« Il est très peu probable qu’à la N-VA, on ait sablé le champagne pour fêter la chute de cet opposant politique. »
Le départ de Conner Rousseau n’agace pas que dans les rangs de Vooruit. Il est en effet très peu probable qu’à la N-VA, vendredi, on ait sablé le champagne pour fêter la chute d’un opposant politique. Car voilà déjà quelque temps que Bart De Wever et Zuhal Demir caressaient Conner Rousseau dans le sens du poil dans l’espoir de former un gouvernement flamand avec lui en 2024. Ainsi, un retour de bâton pour Vooruit viendrait sérieusement rebattre les cartes du jeu politique. La question qui se posera au cours des prochains mois, sur le plan politique, est donc évidente : qui saura profiter de la démission de Conner Rousseau — et, par extension, de cet énième revers pour le centre politique ?
Un an avant des élections qui s’annoncent cruciales pour l’avenir du pays, les présidents de partis flamands se sont dévoilés dans une série d’interviews inédites pour DaarDaar. Retrouvez la bande-annonce de l’interview de Conner Rousseau:
