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Vlaams Belang : l’arme secrète de Bart De Wever pour 2024
25·05·23

Vlaams Belang : l’arme secrète de Bart De Wever pour 2024

Analyse de Stavros Kelepouris, journaliste politique au quotidien De Morgen.

Temps de lecture : 4 minutes
Auteur
Fabrice Claes
Traducteur Fabrice Claes

Un peu plus d’un an avant les prochaines élections fédérales, flamandes et communales, la question se pose dans les QG de tous les partis : que faire du Vlaams Belang ? Après trois décennies d’existence, le cordon sanitaire est plus que jamais sur le point de craquer. Un scénario qui fait les affaires de la N-VA.

Aucun parti ne se réjouit à l’idée de former un gouvernement avec l’extrême droite de Tom Van Grieken. Mais depuis le scrutin de 2019, presque tous les sondages projettent le Vlaams Belang en première position dans les intentions de vote, bien que l’écart avec la N-VA, toujours deuxième, reste minime.

Il est donc très probable que Tom Van Grieken endosse bientôt le rôle de formateur. Un scénario de rêve pour le président du VB, qui ambitionne plus que tout de faire céder le cordon sanitaire. Bien plus qu’un ministère ou que la réalisation d’un point concret de son programme, ce que désire le plus ardemment Van Grieken, c’est de faire sortir son parti du camp des pestiférés de la politique.

Les présidents des partis flamands se dévoilent dans une série vidéo made in DaarDaar

Mais pour ce faire, un formateur a besoin de partenaires. À l’heure actuelle, seul un parti semble en mesure de s’allier au VB : la N-VA. Ce n’est pas pour rien que ces dernières semaines, et le week-end passé encore dans l’hebdomadaire gratuit De Zondag, Bart De Wever a sans cesse été interrogé sur la position de son parti vis-à-vis du Vlaams Belang. Ses réactions s’articulent inexorablement autour des deux mêmes points : il n’est pas impossible de gouverner avec le VB, à condition que le parti fasse un grand nettoyage. En fonction des interviews, la réponse varie entre « oui, mais… » et « non, sauf si… ».

La porte n’est donc pas grande ouverte, mais elle n’est certainement pas fermée non plus. Toutefois, le risque de voir le Vlaams Belang atterrir dans un gouvernement reste limité. Au fédéral, c’est impossible, car aucun président de parti francophone n’envisage même d’entamer quelque négociation que ce soit avec Tom Van Grieken.

Menaces et stratégie

Au niveau flamand, la situation est différente. Tout dépendra des chiffres : la N-VA et le Vlaams Belang doivent attirer ensemble une majorité des suffrages, car il est impensable qu’un autre parti accepte de former une coalition avec l’extrême droite. D’après les derniers sondages, les deux partis de droite pourraient obtenir une très courte majorité, d’autant plus fragile qu’elle devra tenir compte des députés flamands élus à Bruxelles pour les compétences communautaires.

Il n’y a pas que pour le VB qu’il est important d’avoir une majorité de droite au niveau flamand. La N-VA pourrait aussi trouver une telle configuration intéressante. Pas spécialement pour pouvoir gouverner avec le Vlaams Belang, mais bien pour pouvoir se servir de ce scénario comme argument lors des négociations au fédéral.

« Theo Francken confirme que la N-VA sera disposée à se passer des partis du centre à la Région si ceux-ci se passent d’elle au fédéral. »

Les propos de Theo Francken, qui, dans une interview récente à la VRT, a affirmé qu’il faudrait d’abord négocier au fédéral, puis du côté flamand, semblent confirmer cette théorie : « La fois dernière, le cd&v et l’Open Vld ont tout fait pour siéger avec nous au gouvernement flamand, puis ils nous ont planté un couteau dans le dos en embarquant sans nous au fédéral. »

En d’autres termes, Francken confirme que la N-VA sera disposée à se passer des partis du centre à la Région si ceux-ci se passent d’elle au fédéral. Il va de soi que cette menace sera d’autant plus prise au sérieux si un scénario s’avère possible pour « punir » tous les partis centristes à la fois. Et ce scénario, c’est une coalition avec le Vlaams Belang.

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Toutes ces considérations relèvent assurément de la spéculation, et les obstacles stratégiques sont légion. Il n’est pas exclu que les négociations pour former un exécutif fédéral s’éternisent une fois de plus. Le cas échéant, la N-VA paralysera-t-elle pendant tout ce temps la formation d’un gouvernement flamand ? Importerait-elle les blocages du fédéral au niveau flamand ? Voilà qui paraît tout sauf évident pour un parti qui se félicite de la capacité de la Flandre à s’autogérer.

Si le cordon sanitaire se brise quelque part, ce ne sera pas au fédéral ni à la Région flamande. Ce sera au niveau local. À cet égard, une décision de la majorité flamande actuelle fait ironiquement les affaires du Vlaams Belang : à partir des élections communales de 2024, la tête de liste de la liste récoltant le plus de voix pourra tenter de mettre sur pied une coalition pendant les deux premières semaines qui suivent le scrutin.

Ninove

En 2018, le cordon a eu bien du mal à tenir. Dans la commune de Ninove, il a à tout prix fallu former une coalition qui puisse tenir à l’écart la liste de Guy D’Haeseleer, membre du Vlaams Belang, qui avait pourtant récolté 40 pour cent des voix. À Grimbergen, l’accord conclu entre la N-VA, l’Open Vld et la liste de Bart Laeremans, un ancien du VB, a également fait couler beaucoup d’encre.

Au lendemain des élections de 2019, le Vlaams Belang s’est retrouvé en première position dans plusieurs communes, notamment dans le Pays de la Dendre, mais aussi à Ostende, Koekelare, Stekene, Eeklo, Leopoldsburg et Maaseik. Et en 2024, il faudra s’attendre à une liste bien plus longue.

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Dans toutes ces localités, le Vlaams Belang sera amené à prendre l’initiative. Pour de nombreuses sections locales de la N-VA, la tentation sera grande de naviguer avec le parti d’extrême droite, car elles ne voient plus aucune raison de l’écarter du pouvoir à tout prix. Et lorsque Bart De Wever entamera des négociations avec le Vlaams Belang au niveau de l’exécutif flamand, il sera encore plus difficile de maintenir que les sections locales n’auraient pas le droit de le faire.

De surcroît, De Wever a déjà mentionné qu’à gauche, le cordon sanitaire avait sauté, car les socialistes partagent le pouvoir avec le PVDA (PTB) dans la commune de Zelzate, non loin de Gand. Une analyse historiquement inexacte, car le cordon sanitaire, qui date de 1992, n’a jamais concerné ce parti. Cependant, entre les lignes, le message est sans équivoque : si la gauche peut diriger avec l’extrême gauche, pourquoi la droite ne pourrait-elle pas diriger avec l’extrême droite ?


Un an avant des élections qui s’annoncent cruciales pour l’avenir du pays, les présidents de partis flamands se dévoilent dans une série d’interviews inédites pour DaarDaar. Chaque semaine, un président différent sera mis en lumière. Au programme: une biographie le lundi, ainsi qu’une vidéo et un article/interview le mercredi.

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