Pas le moindre article n’en a fait mention dans la presse flamande de lundi, et pourtant, le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a échappé de peu à un remaniement, exactement comme en Flandre avec les péripéties du dossier de l’azote. Voilà qui en dit long sur l’après-scrutin de 2024 au sud du pays, mais également dans tout le royaume. Une bonne raison de lire ce qui suit ! (Quel beau teaser, ne trouvez-vous pas ?)
Chez nous, le dossier empoisonné s’appelle « la saga du master ». À l’heure actuelle, trois universités francophones dispensent une formation complète en médecine : Bruxelles, Liège et Louvain-la-Neuve. Pas la moindre dans le Hainaut, donc, qui, avec ses 1,35 million d’habitants, constitue pourtant la province la plus densément peuplée de la Wallonie. Et, coïncidence ou non, le Hainaut souffre plus que toute autre province de la pénurie de médecins. Pour tous les partis wallons, à l’exception d’un seul, la solution est évidente : créons un master en médecine à l’université de Mons. Cet établissement dispense déjà les trois premières années, ajoutons-y les années suivantes, afin que les médecins fraîchement diplômés soient encouragés à rester dans la région.
Le problème, c’est que le parti qui fait exception, c’est le MR, membre de la majorité au même titre que le PS et Ecolo. Georges-Louis Bouchez a répliqué : « Pas question. Ce master va coûter trop cher et nous sommes fauchés. De plus, il n’a jamais été démontré que les médecins qui finissent leur master dans une région restent dans cette région. »
Et le président du PS, Paul Magnette, de réagir furieusement : « Si le MR refuse, nous chercherons une majorité alternative. » Il faut savoir que ce scénario est réaliste, car avec Les Engagés (ex-cdH) en lieu et place du MR, nous serions toujours dans une situation de majorité.
La dramatisation – le gouvernement tombera-t-il ou non ? – durera une bonne dizaine de jours, un peu comme dans le dossier de l’azote. Cependant, ce week-end, le feu est passé au vert : il y aura bel et bien un master en médecine à Mons – PS et Ecolo contents – mais il ne peut rien coûter, et c’est à l’université de trouver l’argent – MR content.
Pourquoi le dossier de l’azote fait-il tant de remous en Flandre? La réponse en 8 questions
La morale de cette histoire est riche en enseignements.
- Après les élections de 2024, le PS et Ecolo aimeraient bien se passer du MR, qui n’arrête pas de mettre des bâtons dans les roues. Tant dans les entités fédérées qu’au fédéral, d’ailleurs. L’issue serait une tripartite avec Les Engagés, à condition néanmoins que le parti récolte suffisamment de voix. Il reste à savoir si les chrétiens-démocrates pourront profiter des querelles entre les partenaires de la majorité ou bien si la polarisation gauche-droite profitera surtout au PS, au MR et à Ecolo. Difficile à prédire.
- Le MR ne conservera le pouvoir que s’il brille dans les urnes. Pour l’instant, le MR semble surtout osciller autour des 20 pour cent obtenus en 2019. C’est trop peu. Bouchez a beau recourir à la stratégie du seul contre tous, comme la N-VA en Flandre, il risque bien de rester à la traîne, ce qui signifierait probablement la fin de sa carrière politique.
La saga du master a éclipsé, dans les médias francophones, l’échec de l’arrivée de Legoland à Charleroi. Tant mieux sans doute, car retourner le couteau dans la plaie ne peut que faire encore plus de mal. Si le parc d’attractions ne s’installe pas à Charleroi, c’est surtout parce qu’il y a eu du changement à la tête de Legoland : nouveau patron, nouvelle stratégie.
Autre conséquence de la saga du master : désormais, nous savons (à peu près) ce qui se passera en 2024. Une question demeure : quid de la Flandre ?
Dring Dring #2 : Flamands et Belges francophones sont-ils si différents ?
