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Terres agricoles : stop à la spéculation
17·11·22

Terres agricoles : stop à la spéculation

Petra Tas est coordinatrice au sein de Landgenoten. Cette organisation achète/gère des terrains agricoles et les louent aux agriculteurs bio.

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

Image par Benjamin Balazs de Pixabay

Personne ne contestera que Fernand Huts, grand patron de Katoen Natie, a réalisé une « bonne opération » en achetant des terrains au CPAS de Gand. Mais au-delà de cette affaire, ne serait-il pas temps de songer à ce dont notre société a besoin pour assurer son avenir ? En ce sens, nous nous référons souvent à la nature, aux forêts, à la biodiversité, mais presque jamais aux terres agricoles. Or, nous avons besoin de ces surfaces cultivables pour pouvoir produire localement. Sans compter que des terres bien gérées, à forte teneur en humus, contribuent à ralentir le réchauffement climatique, à préserver les nappes phréatiques et la beauté de nos paysages…

Elles se font pourtant de plus en plus rares. Plus d’un quart des parcelles cultivables de Flandre servent aujourd’hui de pâtures pour chevaux et moutons ou de jardins privés. Des entreprises de divers secteurs achètent des terres agricoles dans le but d’investir ou en vue d’une expansion future. Ces ventes ne sont pas contrôlées, et encore moins réglementées. À la différence de la France, il n’existe chez nous aucune politique qui encadre l’utilisation des terres agricoles pour la production alimentaire et l’économie au niveau local.

En Flandre, les terres agricoles sont ainsi devenues presque inaccessibles pour celles et ceux qui veulent se lancer dans le métier. En moyenne, un hectare de terre agricole coûte 63 000 euros. Il n’est plus rare que les prix atteignent ou dépassent la barre des 100 000 euros, surtout dans les provinces de Flandre occidentale et d’Anvers, ainsi qu’aux alentours des grandes villes.

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Même pour une culture maraichère modeste de 2 hectares – un départ classique pour une entreprise qui vise le circuit court – un nouveau venu dans la profession devra débourser 200 000 euros dans de nombreuses régions, rien que pour les terres. Aucune banque n’accepte de prêter un tel montant ! Sur toute une carrière, il lui sera impossible de rembourser une telle somme par le seul produit de ses cultures.

« Un agriculteur n’a aucun droit de regard sur les pratiques agricoles du bailleur. »

Le bail à ferme ? Malheureusement, la formule n’a pas bonne presse auprès des propriétaires terriens ni des notaires. La législation sur le bail à ferme donne l’impression aux propriétaires qu’ils « cèdent » leurs terres, car cette forme de location peut s’étendre sur une très longue période, et se transmettre parfois de génération en génération. De plus, les revenus locatifs sont plafonnés par la loi à un niveau très bas. Pour couronner le tout, un agriculteur n’a aucun droit de regard sur les pratiques agricoles du bailleur : si, par souci d’écologie, le propriétaire souhaite que le bailleur investisse dans la fertilité naturelle du sol et n’utilise pas de pesticides, il peut certes en discuter, mais jamais l’exiger.

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Aussi, tant les néophytes que les professionnels bien établis se retrouvent-ils dans une mauvaise posture : le capital le plus précieux de leur activité, leurs terres, devient de plus en plus difficile d’accès, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour le secteur agricole flamand. Par ailleurs, la moyenne d’âge des producteurs est de 54 ans et 87% des plus de 50 ans n’ont pas de successeur. La main-d’œuvre disparaît à vue d’œil, tandis que la relève, dont le secteur a cruellement besoin, se heurte à un mur. Une situation qui réduit aussi fortement les chances de réussite de la transition agroécologique.

Beaucoup d’agriculteurs en fin de carrière ne veulent pas être les derniers à exploiter leurs terres – et on les comprend. Ils font ainsi appel à l’association De Landgenoten pour s’assurer qu’elles soient transmises à un autre agriculteur biologique à leur retraite. Ma coopérative a pour mission de sortir les terrains agricoles du marché spéculatif. Nous nous investissons, citoyens et agriculteurs, pour que la génération suivante puisse encore cultiver sur des terres riches en humus. Mais cette tâche, les pouvoirs publics ne devraient-ils pas aussi s’en saisir ?

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