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25·01·16

« Néerlandophone » ou « flamand »? Le combat des mots

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(cc) CC BY-SA 3.0

Auteur⸱e
Ludovic Pierard
Traducteur⸱trice Ludovic Pierard

René Coppens et Stefan Cornelis, parlementaires Open VLD, souhaitent rebaptiser la Commission communautaire flamande (VGC) en Commission communautaire néerlandophone (NGC). Une bien mauvaise idée pour Bernard Daelemans, membre du Vlaams Komitee Brussel.

Les parlementaires libéraux René Coppens et Stefan Cornelis, membres de la Commission communautaire flamande (VGC), ont ouvert le débat en proposant de changer le nom de la VGC, notre autorité bruxelloise flamande, en « NGC » ou Commission communautaire néerlandophone (Nederlandstalige Gemeenschapscommissie). Ils partent du constat que, bien qu’ils aient une autre langue maternelle, un nombre important de Bruxellois a appris le néerlandais, jusqu’à l’utiliser comme langue véhiculaire, et cherche de plus en plus souvent à se rapprocher de la culture néerlandaise. Néanmoins, ils s’identifieraient plus facilement à la langue elle-même qu’à « l’aspect flamand, où le lieu de naissance et la culture ont un effet davantage discriminant ». Dans ce contexte, le terme « néerlandophone » a une portée bien plus neutre que celui de « flamand » (à savoir, une personne venant de Flandre). Ils plaident par conséquent pour que, dorénavant, on ne parle plus de Flamands bruxellois ou de Bruxellois flamands, mais bien de Bruxellois néerlandophones. Suite à la décision d’accoler un logo « N » à tous les organismes flamands, l’étape suivante logique serait de changer le nom de la VGC.

Deux parlementaires SP.A ont contresigné la proposition du duo libéral, tandis que Bruno De Lille (Groen) applaudissait l’initiative. Il est vrai que ce dernier avait déjà par le passé soumis une proposition en ce sens. Pour la CD&V Paul Delva, tout changement de nom éventuel ne peut être décidé qu’en concertation et avec l’accord de la Flandre.

En revanche, Johan Van den Driessche (N-VA) estime que ses collègues commettent une erreur : « La VGC est un organe de l’institution politique baptisée « Vlaamse gemeenschap » (Communauté flamande), et c’est à cette dernière que le « V » renvoie, pas au terme « Vlaming » (flamand). En outre, la Communauté flamande fait déjà preuve d’ouverture, car ses institutions sont au service de tous les Bruxellois qui le souhaitent. Pour Dominiek Lootens (Vlaams Belang) aussi, c’est pour des raisons de qualité que de nombreux Francophones de Bruxelles optent consciemment pour une institution flamande en matière d’enseignement ou de soins. La marque « Flandre » est convaincante. Liesbet Dhaene (N-VA) estime, pour sa part, qu’on ne peut aborder ce débat en dehors de questions institutionnelles plus larges, sans compter l’énorme risque pris en empruntant cette voie : « Les Bruxellois néerlandophones laissent tomber la Commission communautaire « flamande ». Les Bruxellois néerlandophones laissent tomber la Flandre. » Et ce, alors que la Communauté française resserre ses liens avec la Wallonie et souhaite absorber la capitale dans une Fédération Wallonie-Bruxelles, sans même avoir sollicité l’avis des Flamands.

Je ne peux que m’associer à cette critique. De nos jours, des dizaines de milliers de Bruxellois se tournent vers les institutions flamandes pour profiter des services de qualité qu’elles leur offrent. Les écoles flamandes sont peuplées d’une majorité d’élèves dont la langue maternelle n’est pas le néerlandais, et ils suivent de leur plein gré les cours d’intégration organisés par la Flandre à Bruxelles. De plus en plus conscients que la Flandre est un partenaire aux épaules larges, avec une économie performante et un modèle d’organisation solide, ils apprennent le néerlandais dans le but de trouver un emploi et de renforcer leurs perspectives d’avenir. L’appellation « VGC » ne les a en rien rebutés.

Alors que des milliers de Bruxellois cherchent à se rapprocher de la Communauté flamande, qui ne leur est pas encore suffisamment connue, ses représentants politiques à Bruxelles vont s’en distancier, comme s’ils avaient intériorisé le discours des médias francophones. Il y a en effet belle lurette que les grands ténors de la politique du sud du pays diabolisent les Flamands. Une figure pourtant timorée telle que Luc Van den Brande (CD&V), ancien ministre-président flamand, avait déjà été qualifiée de « gauleiter » (ndlr: chef de district dans l’Allemagne nationale-socialiste) il y a près de 20 ans. Dès le début de cette législature, Laurette Onkelinx (PS) a attaqué le Premier ministre en affirmant que « le bruit des bottes résonne dans votre gouvernement ». Il est évident que cet alarmisme face au « péril flamand » influence l’opinion publique à Bruxelles, mais la réponse à ces attaques injustes devrait être d’infirmer ces caricatures. C’est d’ailleurs ce à quoi s’emploient au quotidien les organismes flamands et leurs chevilles ouvrières actives à Bruxelles. La visibilité du lien avec la Flandre devrait être renforcée pour mettre en valeur l’ouverture objective de ces institutions de qualité.

Il est par exemple symptomatique qu’un organisme tel que le Muntpunt rechigne à arborer le drapeau flamand le 11 juillet et qu’il règne en outre parmi les gestionnaires de ce projet de prestige une grande réticence à utiliser le logo de la Communauté flamande, qu’ils refusent d’apposer sur la façade. Pourtant, la majeure partie des moyens dont ils disposent provient de la Communauté flamande…

Peut-on rêver meilleur ambassadeur de la Communauté flamande « ouverte » que le Muntpunt et les nombreuses autres institutions flamandes qui investissent leur énergie positive à Bruxelles ? Pourquoi ne pourrait-on souligner qu’il s’agit également de réalisations flamandes ? Quelle honte y a-t-il à avoir un minimum d’amour-propre, voire de fierté flamande ? Ne devrions-nous pas tout doucement nous défaire de cette frilosité identitaire flamande et, en lieu et place d’un N « neutre », miser pleinement sur le « V », notre marque de qualité ?

Une opinion de Bernard Daelemans en V.O  sur Brussel Deze Week 

Traduite du néerlandais par Ludovic Pierard

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