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Les familles défavorisées, nouveaux boucs émissaires de la politique flamande
09·05·23

Les familles défavorisées, nouveaux boucs émissaires de la politique flamande

Ancien consultant en communication pour différents partis politiques, Noël Slangen est chroniqueur politique pour le quotidien Het Laatste Nieuws.

Temps de lecture : 2 minutes Crédit photo :

Photo de Josue Michel sur Unsplash

Noel Slangen
Auteur
Guilhem Lejeune
Traducteur Guilhem Lejeune

La saison de la chasse politique est ouverte et ce sont les ménages les plus défavorisés et les plus vulnérables qui sont dans le viseur. En Flandre, un enfant sur sept, soit 190 000 au total, grandissent dans une famille en situation de difficulté financière. D’aucuns affirment que toute cette pauvreté est « importée » : elle serait le fait de personnes de couleur et résulterait d’une maîtrise insuffisante du néerlandais. Que dire, alors, des 55 000 enfants touchés par la précarité, mais qui ne sont absolument pas issus de l’immigration ?

Celles et ceux qui ont pu sortir de la pauvreté expliquent souvent que leurs parents ont tout sacrifié pour ouvrir des débouchés à leurs enfants. Pour leur offrir, dans la mesure du possible, les mêmes conditions qu’aux autres, les enfants « normaux », ceux à qui on ne rappelle pas en permanence qu’ils sont mis sur la touche. Ce qui n’empêche pas la Flandre de leur tirer dessus à boulets rouges : la pauvreté infantile est un problème qui relève non pas de l’action publique, mais de la « responsabilité parentale ». Les allocations familiales — pudiquement rebaptisées « groeipakket », littéralement le paquet « grandir » — constituent actuellement, à hauteur de 53 %, le barrage qui permet d’éviter aux familles de tomber dans la pauvreté la plus extrême. Or, c’est précisément à ce dispositif que s’attaquent désormais la N-VA et Vooruit, arguant que les autorités s’occuperaient mieux des enfants en situation de pauvreté que leurs propres parents, en tout cas qu’elles savent mieux comment dépenser cet argent. L’Open VLD, pour sa part, estime que le problème réside non pas dans les plus bas salaires, mais dans le montant de ces prestations, jugé trop élevé. Chacune de ces propositions peut être étayée, si l’on cherche bien, par un exemple anecdotique de parents défaillants. Mais n’est-ce pas là le propre des préjugés ?

Prenons l’éternelle rengaine de la « boîte à tartines vide ». L’idée selon laquelle le principal problème de ces enfants serait de ne pas manger à leur faim, ou pas assez sainement, semble tout droit sortie du XVIIIe siècle. Comme s’il suffisait d’une miche de pain et d’une couverture pour régler le problème. Non : se trouver en situation de pauvreté, c’est avant tout être entravé dans son développement à cause de l’isolement et de la détresse financière, avoir en permanence le sentiment de ne pas être à sa place, éprouver de la honte, souffrir dans son amour-propre, devoir renoncer à ses rêves en permanence. La boîte à tartines n’est que le pâle reflet d’une problématique bien plus vaste.

« L’idée selon laquelle le principal problème de ces enfants serait de ne pas manger à leur faim, ou pas assez sainement, semble tout droit sortie du XVIIIe siècle. »

La lutte contre la pauvreté et l’égalité des chances relèvent des missions essentielles de tous les ministères, sans exception. À commencer par la politique du logement, dont l’inefficacité engendre tant de tensions et de violences domestiques. Il faut y ajouter l’enseignement, trop peu inclusif ; la mobilité, insuffisante, qui est source d’isolement ; et le marché du travail, fragmenté et verrouillé. Les partis au pouvoir ont, jusqu’ici, masqué leur incapacité à véritablement changer les choses par une série de réformettes destinées à la classe moyenne. La défiance qu’ils suscitent ne s’étant pas dissipée pour autant, ils se servent désormais des pauvres comme boucs émissaires.

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