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Quand Filip Dewinter (VB) est présenté par des médias flamands comme expert en collaboration
02·02·23

Quand Filip Dewinter (VB) est présenté par des médias flamands comme expert en collaboration

Depuis le 1er janvier, la VRT diffuse une série documentaire en dix épisodes intitulée « Het verhaal van Vlaanderen » (l’histoire de la Flandre) et présentée par une vedette du petit écran: Tom Waes.

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

DAVID PINTENS (BELGA)

Auteur⸱e
Dominique Jonkers
Traducteur Dominique Jonkers

Si l’éventualité d’une motivation nationaliste dans la série « Het Verhaal van Vlaanderen » vous dérange, imaginez-vous ce qu’il en serait si elle était assortie de l’interprétation experte du député Vlaams Belang Filip Dewinter, un verre de la célèbre bière anversoise Koninck à la main.

Filip Dewinter s’est récemment signalé à notre attention par les visites qu’il a effectuées en Syrie, en Russie et auprès des criminels néonazis d’Aube dorée, un groupuscule d’extrême droite grec. Depuis cette année, il se signale également à notre attention par son adaptation moderne de l’idéologie nazie Blut und Boden (sang et sol), qu’il appelle « omvolking » (le Grand Remplacement). Or certains médias semblent voir dans Filip Dewinter un fin connaisseur de l’histoire de la collaboration flamande.

Dans un article de VRT NWS consacré aux déprédations commises sur la tombe d’August Borms, collaborateur et nationaliste flamand, on a donné à Filip Dewinter l’occasion de commenter ce personnage historique. Seul invité à s’exprimer, donc sans contradiction, il a eu amplement l’occasion de dresser d’August Borms le portrait d’un homme à qui l’on doit le respect. D’un homme qui, pendant la Première Guerre mondiale, a pris fait et cause pour les Flamands dans les tranchées. Mais aussi d’un homme qui s’est effectivement rangé au côté des Allemands pendant la Deuxième Guerre mondiale. « Il avait ses bons et ses mauvais côtés ».

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Pas un mot sur Borms le recruteur, qui envoyait les Flamands servir de chair à canon sur le front de l’Est, tel un Fouad Belkacem du temps. Pas un mot sur son télégramme à Adolf Hitler, manifestant à ce dernier « sa confiance et sa fidélité indéfectibles à l’égard du Führer ». Pas un mot sur les voyages d’August Borms à travers l’Allemagne nazie et les territoires occupés, voyages où Filip Dewinter, lui-même grand pigeon voyageur, devrait pouvoir se reconnaître.

Au printemps 1943, August Borms et sa famille visitaient l’usine IG Farben d’Auschwitz (où les nazis pratiquaient le travail forcé), et y étaient « très cordialement accueillis ». L’année suivante, fuyant l’avance alliée, Borms se réfugiait en Allemagne, conseillant au passage le « Vlaamsche Landleiding » (Landsleitung Flandern – un gouvernement flamand en exil, NdT), en vue de préparer la reconquête de la Flandre. Pas un mot sur ce sujet.

« Que Filip Dewinter s’exprime en qualité d’homme politique pour demander une surveillance vidéo, on peut l’admettre. Mais qu’il s’exprime pour formuler des commentaires historiques, c’est tout autre chose. »

En revanche, Filip Dewinter évoque l’exécution d’August Borms après la guerre. Son séjour en prison, ainsi que quelques mots héroïques prononcés jusque devant le peloton d’exécution ont fait de lui un martyr. Le coup de grâce fut bref, la réhabilitation est toujours en cours. Notamment sous la forme d’une commémoration annuelle au cimetière de Merksem. Les rigolos qui viennent de saccager sa tombe (pour la deuxième fois) ne font que contribuer à cette idolâtrie.

Que Filip Dewinter s’exprime en qualité d’homme politique pour demander une surveillance vidéo, on peut l’admettre. Mais qu’il s’exprime pour formuler des commentaires historiques, c’est tout autre chose. À ce propos, on notera d’ailleurs que l’administration communale se tait dans toutes les langues. L’échevine compétente, Els van Doesburg (N-VA), a refusé de s’exprimer sur le sujet, alors qu’elle avait libéré des milliers d’euros, la dernière fois, pour restaurer la tombe endommagée. Dans l’espace béant qu’elle laisse ainsi ouvert apparaissent aujourd’hui les révisionnistes.

Dans le quotidien Gazet van Antwerpen, le même Filip Dewinter, intervenant une fois de plus comme unique expert, affirme qu’August Borms a été un personnage important, évoquant l’existence d’une Bormshuis (Maison Borms) à Anvers. « Cela montre bien, ajoute Filip Dewinter, combien August Borms fut un personnage emblématique d’Anvers pendant l’entre-deux-guerres ».

À moins que… À moins que cela ne montre combien cette Bormshuis, s’inscrivant dans la même mouvance que l’IJzerwake et le Frontnacht, se soucie comme d’une guigne du passé nazi, ou encore combien elle souhaite réécrire certains pans de l’histoire du mouvement flamand.

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