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À Anvers, seule l’échevine décide de ce qu’est la culture
17·03·23

À Anvers, seule l’échevine décide de ce qu’est la culture

Kris Vanmarsenille est la rédactrice en chef du quotidien Gazet Van Antwerpen.

Temps de lecture : 2 minutes Crédit photo :

Photo de Zoë Gayah Jonker sur Unsplash

Fabrice Claes
Traducteur Fabrice Claes

Les relations déjà tendues entre la N-VA et le monde de la culture ne sont pas près de s’améliorer après l’intervention de l’échevine de la Culture Nabilla Ait Daoud (N-VA) dans l’aménagement du théâtre de l’Arenberg. Après avoir rejeté un poème de Ruth Lasters, elle a à nouveau restreint la liberté de personnes désireuses d’étendre et de moderniser la culture.

L’ampleur de l’affaire est, à vrai dire, assez limitée. Lors de la rénovation de l’Arenberg, il a été décidé de remplacer quatre des douze peintures classiques de la cage d’escalier par des photographies du célèbre artiste anversois Mous Lamrabat. Deux de ces photos montrent des femmes voilées.

L’ancien directeur de l’Arenberg a voulu, par ce petit geste, souligner subtilement le caractère jeune et cosmopolite de son théâtre. Cependant, pour Luc Lemmens (N-VA), membre du conseil d’administration des institutions culturelles anversoises, les photographies incriminées perturbaient de manière insupportable le somptueux intérieur classique. Il les considère même comme une offensive wokiste contre la culture flamande : les hommes blancs de la cage d’escalier ont été évincés par des femmes de couleur. Lemmens a lu avec tellement de zèle et si peu de discernement le livre de son président Bart De Wever, intitulé Woke, qu’il s’est lancé dans une croisade aveugle contre tout ce qui pourrait menacer les vieilles toiles et les hommes blancs. C’est son droit. Ce qui doit nous inquiéter, en revanche, c’est que l’échevine de la Culture ait fait enlever ces photographies au motif qu’elle ne pouvait pas accepter « que le passé soit effacé ».

« Si l’échevine de la Culture peut interdire quelques photos dans une cage d’escalier, il y a fort à parier que bientôt, elle se mettra à décider des spectacles qu’il sera permis de programmer. »

Depuis lors, le directeur a rendu son tablier. Et comment ne pas le comprendre ? Si l’échevine de la Culture peut interdire quelques photos dans une cage d’escalier, il y a fort à parier que bientôt, elle se mettra à décider des spectacles qu’il sera permis de programmer. Une bonne raison, pour un directeur, de jeter l’éponge. C’est d’ailleurs pour cette raison aussi que la poétesse Ruth Lasters avait démissionné en septembre 2022. Mais madame Ait Daoud n’a toujours pas compris ; elle croit encore que c’est à elle et à elle seule de définir ce qu’est la culture ou non. Pire encore : la vision de la culture par l’échevine se fonde sur l’ingérence même.

Suspendre quelques photos surprenantes au milieu d’une série de vieilles toiles, ce n’est pas une attaque du wokisme contre la culture traditionnelle. C’est une tentative de rendre accessible le patrimoine flamand à de nombreux jeunes Anversois aux origines très diverses, qui visitent régulièrement le théâtre et qui ne se reconnaissent dans aucune des peintures accrochées au mur. Les photos visaient à relier le somptueux bâtiment, témoin de l’histoire flamande, au monde et aux gens d’aujourd’hui. C’est un rôle magnifique que la culture, avec une telle échevine, ne pourra malheureusement pas jouer. Dans une ville aussi diversifiée qu’Anvers, c’est éminemment regrettable.

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