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Dominique Jonkers : « L’apprentissage des langues reste un premier pas vers la compréhension de l’autre »
08·01·24

Dominique Jonkers : « L’apprentissage des langues reste un premier pas vers la compréhension de l’autre »

En ce début d’année 2024, DaarDaar met en avant ses traducteurs et traductrices. C’est grâce à leur excellent travail que nous pouvons vous offrir quotidiennement le meilleur de la presse flamande en français, et ce, depuis plus de huit ans !

Retrouvez toutes les traductions de Dominique Jonkers pour DaarDaar ici.

Temps de lecture : 3 minutes
Fanny Dubrulle
Auteure

Comment est né ton intérêt pour les langues?

Mon intérêt pour les langues est né… avant moi. Je suis né à Liège dans une famille néerlandaise immigrée en Belgique juste après la deuxième guerre mondiale. A l’époque où les frontières étaient encore bien réelles. Il y avait à peine quatre ans que les armes s’étaient tues… Mon père, déporté en Allemagne pendant trois ans, avait appris à cette occasion le français, l’allemand et le patois de Forêt-Noire. Expatrié à Liège, il s’était mis au wallon. J’ai appris le néerlandais comme chaque bébé apprend la langue de ses parents. Sauf qu’à ma naissance, mes deux grands frères fréquentaient déjà l’école primaire… en français, et parlaient systématiquement cette langue entre eux, sauf en présence de nos parents.

Quand nous allions voir mes grands-parents aux Pays-Bas, pratiquement chaque week-end, tout le monde parlait néerlandais, bien sûr, mais nous regardions la télévision – les Flintstones (Les Pierrafeu, en français) et autres dessins animés américains en VO anglaise sous-titrée en néerlandais. Sans compter, sur les émetteurs de télévision allemands, les émissions culturelles et les spectacles de variété. Dans un tel contexte familial, comment voulez-vous rester unilingue ? Personnellement, je parle couramment français, anglais et néerlandais, je comprends et traduis l’allemand, mais ma maîtrise active est limitée, et j’ai des notions d’espagnol qui ne demandent qu’à s’améliorer.

Pourquoi t’engages-tu dans DaarDaar ?

Parce que linguistiquement, je suis né le cul entre deux chaises. Partout où j’allais, j’étais l’autre. A l’école, j’étais Li Flamind di Gates (j’avais beau expliquer la différence entre Flandre et Pays-Bas, sans résultat) et dans ma famille néerlandaise, j’étais de kleine Belsj. Tout ce que j’ai lu sur l’histoire des guerres des siècles passés procède de cette constatation : l’ennemi était une image. Le schleuh, l’hidalgo, la perfide Albion, que sais-je. Le mépris, puis la haine de la culture inconnue et de la population incomprise. Les uns disant « Nach Paris » et les autres, « on ira pendre notre linge sur la Ligne Siegfried ». Et tout ça sous le même credo : « Gott mit uns ! One nation under God ! Dieu et mon droit ! ». L’apprentissage des langues – donc des cultures – reste un premier pas vers la compréhension de l’autre et vers l’éradication des conflits.

Quels sont tes sujets de prédilection ?

Dans mon esprit, la qualité première d’un traducteur est la curiosité. Une insatiable curiosité. Car contrairement à un adage particulièrement stupide, la curiosité n’est pas un vilain défaut : c’est une qualité primordiale. Ce qui est un vilain défaut, c’est l’indiscrétion. Tout autre chose.

Alors mon sujet de prédilection, c’est peut-être bien celui dont je ne sais rien aujourd’hui, mais que je connaitrai mieux demain parce qu’une traduction m’aura obligé à m’y intéresser.

Quelle est ton expression néerlandaise préférée ? 

“De beste stuurlui staan aan wal”. Cette expression est très typiquement néerlandaise, puisqu’elle évoque l’univers maritime ; et elle n’est pas simple à traduire. On propose souvent comme équivalent français le dicton « Les conseilleurs ne sont pas les payeurs », mais il y manque une importante nuance : celle de l’hostilité manifestée par l’homme agissant – celui qui prononcera probablement cette phrase – à l’égard du fâcheux condescendant, spectateur passif, qui se permet d’émettre critiques et opinions mal informées. En même temps, l’expression est universelle, comme chacun d’entre nous l’a déjà constaté un jour ou l’autre.

Apprenez des expressions flamandes en français grâce aux dessins animés « Pardon? »

Quelle est l’expression néerlandaise la plus difficile à traduire ? 

Encore une fois, il s’agit de termes ancrés très profondément dans la culture néerlandaise, et qui expriment un certain sens du bien-être : « leuk » et « gezellig ».

Quel est l’article qui t’a le plus marqué et pourquoi ?

Nous vivons une époque où de nombreux élans généreux sont dévoyés par des personnes qui préfigurent un retour des ligues de vertu du 19e siècle. Qu’il s’agisse du wokisme, de l’écriture inclusive, des safe spaces que réclament ou exigent certains, de la réécriture de l’histoire, voire de la littérature à la lumière de notre petit présent. S’il faut déboulonner les statues de Léopold II, il faut aussi déboulonner celles de Napoléon, de César, de Michiel de Ruijter, de Cervantes (ancien soldat des armées impériales), de Beaumarchais et de Rimbaud (tous deux marchands d’armes), du Prince d’Orange…

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Quels sont tes conseils, tes outils favoris pour apprendre le néerlandais ?

L’enfant qui apprend le néerlandais à l’école mais se heurte à la maison à un environnement hostile, ou réticent, aura beaucoup de mal à apprendre la langue. Plus tôt l’enfant est plongé dans une autre langue, plus vite il l’apprendra. Après tout, tous les enfants du monde apprennent leur langue – même les plus difficiles à nos yeux – sans douleur, simplement parce que l’enfant apprend tout très facilement.

Sinon, il suffit d’avoir vraiment envie d’apprendre. C’est comme le tennis ou le piano ou le foot : si on n’a pas envie, on n’y parviendra jamais. S’immerger dans la langue. Voyager en pays néerlandophone, y habiter, parler aux gens, lire la presse, regarder la télé en néerlandais, etc.

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