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Travaux au carrefour Léonard: un complot des Flamands ?
24·04·24

Travaux au carrefour Léonard: un complot des Flamands ?

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(c) Belga

Aurait-on pu mieux communiquer au sujet des travaux au carrefour Léonard ? Le croisement entre la E411 et le Ring de Bruxelles se situe sur le territoire de la Région flamande, qui pourvoit à tous les coûts des travaux et qui a averti depuis belle lurette qu’une rénovation était prévue. Le début des travaux n’a donc pas pu constituer une grande surprise. Des réunions de préparation ont eu lieu, et toutes les administrations, à Bruxelles comme en Wallonie, avaient été informées.

Mais manifestement, la circulation des informations fournies par la Flandre vers les responsables politiques manque de fluidité. Cette lenteur de la part des administrations est-elle due à la Flandre ? Rien n’est moins sûr. Il n’en demeure pas moins que tous les politiques francophones se sont mis à pousser des cris d’orfraie lorsque la sortie vers Waterloo a été fermée, et que la ministre flamande de la Mobilité, Lydia Peeters (Open VLD), a refusé de suspendre les travaux.

Une querelle communautaire

Son homologue wallon, le ministre Philippe Henry (Ecolo), a prétendu qu’aucune concertation n’avait eu lieu avec la Flandre, ce qui s’est avéré incorrect quelques jours plus tard. « La Flandre gère le Ring comme si Bruxelles et la Wallonie n’existaient pas », avait-il affirmé. Georges Gilkinet, ministre fédéral de la Mobilité, également Ecolo, a tenu quasiment les mêmes propos. La commune d’Auderghem, quant à elle, aimerait mettre en demeure la Flandre et envisage des procédures judiciaires.

Mais c’est surtout un autre parti, le plus petit en Belgique francophone, à savoir Défi, qui a vu dans ce différend une manière de redorer son blason. Il faut dire que le blason s’était bien terni depuis que l’ex-président, Olivier Maingain, s’est mis à accuser son successeur François De Smet de tout et n’importe quoi.

De Smet a sauté sur une occasion en or de marquer sur le terrain sur lequel s’était illustré l’ancêtre de Défi, le FDF : les attaques communautaires à l’emporte-pièce contre les méchants Flamands, animés des pires intentions envers Bruxelles. Voilà qui a fait du bien au parti, qui n’avait plus ouvert le feu depuis longtemps contre les voisins du nord du pays.

Le service d’études de Défi a même inventé, sans doute après une nuit blanche passée à brainstormer, une nouvelle expression pour l’occasion. François De Smet a taxé les travaux flamands de « nationalisme routier ». Dès que la Flandre entend toucher un tant soit peu au Ring de Bruxelles, par exemple en réaménageant des sorties, on pointe du doigt les Flamands en les accusant de vouloir isoler Bruxelles et ennuyer les chauffeurs francophones.

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Étouffer Bruxelles

Quel intérêt la Flandre aurait-elle à mettre dans l’embarras son principal partenaire commercial ? On ne se pose jamais la question. Et pour cause : objectivement, les accusations de ce genre sont impossibles à prouver. Par contre, cela n’empêche pas d’inventer encore et toujours des théories du complot plus farfelues les unes que les autres.

Les intérêts de la périphérie sont menacés par l’action délibérée du Parlement flamand, a déclaré un député bruxellois Défi, pour qui « l’attitude de la Flandre est totalement scandaleuse et leur gestion de ces travaux est d’un amateurisme total ». Visiblement, peu importe à Défi que la ministre Peeters ait fait constater par un expert indépendant la dangerosité du tunnel Léonard. Défi ne peut pas laisser passer une chance aussi inespérée deux mois avant les élections. Il s’agit de séduire un électorat fidèle de fransquillons en coupant les cheveux en quatre dès qu’une question communautaire pointe le bout de son nez.

Mais il n’y a pas que dans les cercles extrémistes que l’on avance des choses aussi saugrenues à propos de ces travaux de voirie.

Prenez par exemple l’édito de La Libre Belgique, dans lequel le rédacteur en chef De Meeûs est allé jusqu’à déterrer l’ancienne ministre Joëlle Milquet (CDH à l’époque, Les Engagés aujourd’hui), jadis poussée à la démission. Lors de négociations oubliées depuis longtemps, elle avait plaidé pour une fédéralisation de la forêt de Soignes, pour éviter que la Flandre étouffe la capitale en fermant des sorties d’autoroute. En dérobant la forêt de Soignes à la Flandre, on créerait un lien territorial entre Bruxelles et la Wallonie.

C’est la bonne vieille idée du corridor, qui ressurgit comme le monstre du Loch Ness à échéances régulières. Les Wallons et les Bruxellois veulent-ils réellement construire une route à quatre bandes à travers la forêt de Soignes pour se rapprocher ?

Il est étrange que cette idée délirante refasse surface en ce moment. En effet, les francophones croient-ils seulement maintenant qu’ils pourraient utiliser comme arme des réseaux routiers, au cas où la Flandre viendrait à déclarer son indépendance demain ? Dans un contexte européen, c’est absolument impensable. De plus, la Flandre n’aurait rien à gagner à dresser des barrières internes avec ses voisins.

Comment se fait-il qu’il en faille si peu pour que jaillissent des théories totalement loufoques mettant en scène une Flandre qui complote contre la Belgique francophone ?

Il y a longtemps, un collègue bruxellois m’a expliqué que les Flamands allaient un jour se venger de l’injustice qui leur a longtemps été faite. Je crains que la méfiance émotionnelle des francophones à l’égard de la Flandre soit inspirée par cette angoisse subconsciente.

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