Mon ami Dorian, merci pour ta lettre ouverte. Je suis les événements de la journée tandis que j’effectue un long voyage en train à travers les rizières de Java, et s’il devait y avoir un mot qui résumait la situation ce serait : Weimar.
Une « démocratie » de faible alliage, un enchevêtrement complexe qui creuse la tombe de la réelle démocratie. Cela fait des mois que je suis très pessimiste pour l’avenir des démocraties occidentales et aujourd’hui marque un grand tournant. Nous détruisons nos démocraties en refusant de les innover. Referendum ! Connais-tu quelque chose d’aussi primitif ? Euh oui… les élections. Cocher une case à côté d’un nom ou des initiales d’un parti. Est-ce vraiment la meilleure façon de décider collectivement et rationnellement ? Je suis furieux, non seulement contre ceux qui ont voté pour le leave, mais plus encore contre Cameron qui a proposé le référendum dans son programme électoral afin de prendre des voix à Farage. Et dire qu’il a cru qu’il pourrait s’en débarrasser de cette façon, l’idiot. L’histoire se souviendra de lui comme l’homme responsable de la mort de la Grande-Bretagne et de l’UE dans sa forme actuelle. Je ne mentionne même pas que cela aura des conséquences gigantesques sur l’économie belge et sur sa prospérité. Notre économie va se contracter à cause de petits jeux politiciens d’outre-manche. Et maintenant ? Est-ce que les Pays-Bas, la Grèce et la France vont organiser des référendums similaires ? Allons-nous encore assister à ce genre de blagues de mauvais goût au nom de la « démocratie » ? Tu sais que j’ai vécu et étudié à Cambridge, que j’ai rédigé mon doctorat en anglais, et que j’ai publié pendant des années dans un magazine archéologique au Cambridge University Press. Il est encore tôt pour pleurer cette rupture. Aujourd’hui, je suis juste en colère. Nous vivons des événements historiques et nous creusons notre propre tombe. Je n’exclus plus la violence politique généralisée en Europe. Et ce train roule à travers les rizières luxuriantes et oubliées. A l’horizon la silhouette d’un volcan. Bien à toi, David.
(Traduction: Jonathan Moskovic)