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Action de parents au Parlement flamand : les enfants tenus de rester silencieux
27·01·23

Action de parents au Parlement flamand : les enfants tenus de rester silencieux

Temps de lecture : 4 minutes Crédit photo :

JAMES ARTHUR GEKIERE (BELGA)

Auteur⸱e
Fabrice Claes
Traducteur Fabrice Claes

La semaine passée, au Parlement flamand, depuis la zone réservée au public, un bébé en pleurs a irrité le député Jean-Jacques De Gucht, qui a exprimé toute sa vexation. Cela n’a pas empêché des parents de revenir hier avec leurs enfants afin de manifester leur mécontentement face aux problèmes d’accueil dans les crèches. Pour la neuvième semaine consécutive, et en plus grand nombre que jamais. « Jean-Jacques a certainement eu un impact, mais peut-être pas celui qu’il voulait », témoigne un parent. « Au fait, ça vous dérange si j’allaite mon enfant ici ? »

« Prière de ne pas changer les langes dans la salle de la Coupole. Je préfère vous le dire, parce que c’est déjà arrivé. » Avant que le groupe bigarré de 24 visiteurs puisse accéder à la tribune du public, un agent d’accueil explique les règles à suivre. Il faut rester assis, mais les enfants peuvent bénéficier d’une certaine tolérance. Il est défendu de manger, mais nous serons plus compréhensifs pour les enfants. À condition qu’ils ne fassent pas de bruit. « Car vous savez comment ça va : quand ça se passe mal, c’est le petit fonctionnaire qui trinque. »

L’homme est visiblement nerveux. Cela fait neuf semaines que des protestations dans les tribunes perturbent les travaux du Parlement, au grand dam de certains députés, avec l’épisode de la semaine passée pour apogée : un petit enfant s’est un peu trop exercé les cordes vocables pendant une intervention de Jean-Jacques De Gucht (Open VLD). Le député a fait la grimace, tout en disant qu’il trouvait « particulièrement bizarre » que des parents viennent avec leurs bébés et leurs enfants dans la tribune du public. Les partis de la majorité l’ont applaudi, sous le regard sidéré des parents présents dans les tribunes. « Nous ne nous attendions pas à un tel dédain. Ces gens sont tellement déconnectés du monde réel », ont-ils réagi.

Des députés agacés

Il faut dire que le groupe de parents attire l’attention. Il plane dans l’hémicycle un certain agacement pendant la séance plénière. Les enfants suscitent la distraction lors des débats, même si sur les sièges des députés, ça bavarde et ça scrolle à l’envi. De Gucht est absent, mais la présidente du Parlement, Liesbeth Homans (N-VA), lance un regard furieux à la tribune au moindre petit bruit. Sur les bancs de l’opposition, nous assistons à la réaction inverse : Celia Groothedde (Groen) ne cesse de sourire aux parents.

« J’aimerais toutefois souligner que nous ne sommes aucunement liés à quelque parti que ce soit », précise Heleen Struyven, du groupe d’action Crisiskabinet Kinderopvang.

Cette ex-avocate et mère d’un petit garçon de trois ans est l’une des initiatrices de l’action intitulée Kind en gezien. « La première fois que nous sommes venus ici, c’était en raison de la fermeture de plusieurs crèches le mercredi en raison d’un manque de personnel. Notre but est de faire ressentir de manière concrète le problème de l’accueil de la petite enfance aux décideurs politiques. Mais nous continuerons de venir jusqu’à ce que les enfants soient vraiment visibles. Notre mode de protestation est calme. Si nous avions voulu faire du bruit, nous nous y serions pris autrement. Je n’ai personnellement rien à voir avec la politique. Cependant, l’année passée, j’ai pu remarquer l’ampleur des dégâts dans les crèches. J’étais moi-même enfermée chez moi, avec un burn-out. La directrice de la crèche en avait aussi un, mais elle, elle a été obligée de continuer à travailler. C’est absurde. »

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Les autres parents forment un groupe différent chaque semaine. Cette fois-ci, ce sont quasiment toutes des personnes qui participent pour la première fois à l’action. « En voyant les députés applaudir la semaine passée, j’ai spontanément demandé un jour de congé pour pouvoir être présente ici aujourd’hui », témoigne une maman. Laure Dombrecht, 30 ans, s’est déplacée d’Aalter (Flandre-Orientale) avec Nisa, bientôt 3 ans, et Neva, 1 an. « Vous souvenez-vous des déclarations de Homans, il y a quelques mois ? Quand elle a crié que c’était au père, dans ce cas, de s’occuper des enfants pour soulager la mère ? C’est là que j’ai ressenti cette colère pour la première fois. Et la semaine passée, rebelote. Nous nous devions d’être là aujourd’hui. »

Les revendications des parents sont connues. Il faut plus de moyens pour la petite enfance. Il faut baisser la norme de huit ou neuf enfants par puéricultrice. Il faut rendre le métier plus supportable et les salaires plus attractifs. « Nous sommes ici pour soutenir le secteur de l’accueil de la petite enfance. C’est un secteur tellement important », assurent plusieurs parents présents. Parmi eux, nous retrouvons Astrid Marinus, 33 ans, mère de Jan (4 ans) et de Pim (2 ans). « Mes enfants étaient tellement attachés aux personnes de la crèche. Et moi aussi. J’étudie, mais à cause du manque de personnel à la crèche, j’ai dû mettre mes études entre parenthèses. »

Il faut être aveugle pour ne pas voir que tout le système d’accueil de la petite enfance est sous pression, ce qui fait vaciller toute la société, affirme Guillaume Soinne, 36 ans, papa du petit Edgar, 2 ans, et seul homme du groupe cette fois-ci. « C’est ma femme qui m’a envoyé », sourit-il. Les parents ont apporté des petits bouquins, des fruits, des biberons. Tout pour que leurs petits bouts se tiennent tranquilles.

Peut-on allaiter au Parlement ?

« J’ai demandé si je pouvais donner le sein à mon bébé », explique Alice Verlinden, 34 ans, accompagnée de sa petite Amy, de presque deux mois. C’est soit ça, soit le bruit. Mais je n’ai pas osé. Le fonctionnaire avait déjà l’air suffisamment stressé. »

Tout s’est déroulé sans incident. Après une petite demi-heure, le premier parent a quitté les lieux avec l’enfant le plus récalcitrant. L’un après l’autre, les parents quittent la tribune avant que leur enfant en ait assez. L’agent d’accueil est satisfait. « Moi non plus, je ne sais pas bien ce que je dois faire, dit-il. Prenez le cas de l’allaitement : le règlement ne dit rien à ce sujet. Ce n’est pas simple. Mais heureusement, cette fois-ci, tout s’est déroulé dans le calme. »

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