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Mobilisations universitaires pour Gaza : les limites de la protestation
08·05·24

Mobilisations universitaires pour Gaza : les limites de la protestation

Temps de lecture : 2 minutes Crédit photo :

(c) Belga

Bart Haeck
Auteur
Dominique Jonkers
Traducteur Dominique Jonkers

Le mouvement de protestation qui agite le milieu universitaire contre l’intervention israélienne à Gaza a tout d’une miniature du débat politique sur la nécessité d’un large boycott : il s’agit de louvoyer entre indifférence et non-engagement.

À Gand, une centaine d’étudiants occupent un bâtiment universitaire depuis lundi, estimant que l’université devrait rompre ses relations académiques avec Israël en signe de protestation contre la guerre à Gaza. Ça y est : la vague de protestation qui échauffe les esprits aux États-Unis a bel et bien atteint la Flandre.

Ce débat va bien au-delà de la centaine d’étudiants qui manifeste à Gand. Bien souvent, les manifestations de ce type ne sont guère plus qu’un modèle réduit d’un mécontentement bien plus large, cristallisant un ample débat public sans omettre aucune question difficile.

Un des points de ce débat est particulièrement facile à trancher : protester contre le conflit à Gaza et en débattre est plus que légitime. L’indignation et la compassion pour la souffrance humaine valent mieux qu’indifférence ou cynisme. En ce sens, on préfère voir les étudiants protester que s’abstenir de protester. L’université se doit d’être un lieu d’engagement civique.

Mais elle se doit aussi d’être un lieu de raison. Et c’est là que se pose immédiatement une question plus délicate : que diable les activistes espèrent-ils raisonnablement obtenir ?

Exercer un effet réel sur le conflit ? Cela relève du rêve, et du rêve lointain. C’est pour cette raison que certains étudiants mettent surtout la pression sur leur université elle-même. Ils veulent qu’elle coupe tout lien avec le monde universitaire israélien. Sur le plan émotionnel, cette attitude donne lieu à un ressenti favorable, car on peut alors se dire que l’on n’a plus rien à voir avec les souffrances à Gaza.

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Mais peut-on vraiment assimiler une université israélienne à l’État israélien ou aux partis de la coalition gouvernementale ? L’université de Gand estime que non, et souhaite continuer à envisager la coopération avec les universitaires israéliens « projet par projet ». Ça tient la route. La discussion prend un tour différent selon qu’on parle d’une faculté d’ingénieurs liée à l’industrie de l’armement, de recherche en mathématiques abstraites ou d’histoire de la musique.

Voici un autre argument : le monde universitaire, quel que soit le pays, se doit d’être un lieu où la pensée est libre. Et où l’on peut remettre en question la logique de guerre qui préside à l’offensive contre Gaza. C’est ce que le recteur de la VUB, Jan Danckaert, a fait valoir il y a quelques jours : en Israël aussi, on manifeste, et le monde universitaire exprime ses critiques. En ce sens, le monde universitaire israélien est bien plus un allié qu’un ennemi.

Et puisque le débat qui a cours dans le monde étudiant est une miniature d’un débat de société plus large, les questions posées se répercutent également dans la sphère politique. Par exemple, quel serait le sens d’un boycott commercial ?

Le plus simple, pour répondre à ces questions, consiste à préciser ce que l’on ne veut surtout pas. D’une part, il faut éviter qu’un excès de pragmatisme se transforme en cynisme et en indifférence. Ce n’est pas une possibilité à envisager, dans ce conflit où quelque 10 000 enfants sont déjà morts. Par ailleurs, un boycott radical peut avoir pour principal résultat de nous donner bonne conscience, sans faire la moindre différence pour qui que ce soit sur le terrain.

La voie à suivre se situe quelque part entre les deux, à tâtons dans le brouillard d’un univers géopolitique violent, oscillant entre indifférence et absence d’engagement.

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