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30·09·15

Tomorrowworld : le rêve tourne au cauchemar

Temps de lecture : 5 minutes Crédit photo :

(cc) Giles Moss

Mick Van Loon
Auteur⸱e
DaarDaar
Traducteur⸱trice DaarDaar

Dans la nuit de samedi à dimanche, des milliers de fêtards participaient au festival Tomorrowworld, la version américaine de Tomorrowland qui se tenait à Chattahoochee Hills, près d’Atlanta. Ils ont été littéralement pris en otage par les organisateurs. Après avoir été contraints de parcourir quelque 12 kilomètres à pied, les festivaliers ont été tout bonnement abandonnés à leur triste sort sous la pluie, sans nourriture, sans eau, sans abris et sans vêtements adaptés. Nombre d’entre eux ont dû dormir dans la boue le long de la route. Les dix mille détenteurs d’un billet pour le dimanche ont ensuite appris, le matin même, qu’ils n’auraient pas accès au site. Pour sûr, l’affaire ne restera pas sans suite : les États-Unis, ce n’est pas la Belgique, et les victimes de ce fiasco ont d’ores et déjà décidé d’unir leurs forces pour intenter un procès contre les organisateurs.

La version américaine du Tomorrowland belge, organisée pour la troisième fois dans les environs d’Atlanta, a été le théâtre de pluies torrentielles. Les intempéries ont transformé les trois mille hectares du site en un gigantesque marais. Après le dernier morceau du DJ Hardwell, les visiteurs ont eu toutes les peines du monde à quitter le festival : la pluie avait rendu les chemins et certains accès totalement impraticables. L’organisation a alors interdit aux chauffeurs de taxi et aux services de transport d’approcher le site, tandis que d’autres véhicules restaient immobilisés dans la boue.

Debbie Wilmsen, porte-parole du festival TML : « Il a plu pendant cinq jours sans interruption. Le site est entouré de chemins de sable. La pluie a tôt fait de transformer le site en un gigantesque bain de boue. Les allées et retours incessants des navettes et des voitures n’ont fait qu’aggraver la situation, rendant au bout d’un moment tout déplacement impossible. Fatigués d’attendre, beaucoup ont pris la route à pied et se sont égarés dans les bois entourant Chattahoochee Hills. Le site se trouve en rase campagne américaine. Les véhicules n’y sont pas légion et celui qui ne connaît pas le coin peut très vite se perdre », nous explique Debbie Wilmsen.

Quelle était l’ampleur des dégâts ? Un témoin raconte : « Samedi, après le concert de Hardwell, les festivaliers d’un jour ou qui dormaient à l’hôtel ont voulu rentrer. Ils ont dû marcher entre huit et douze kilomètres pour rallier les différents points de rassemblement, où devaient les attendre des navettes. Mais une fois arrivés sur place, ils n’ont trouvé personne. »

« Beaucoup n’avaient pas de portefeuille sur eux, le festival étant entièrement « cashless ». Et puis, ils avaient déjà payé leur bracelet d’entrée, alors pourquoi risquer de perdre son portefeuille ? Pour la même raison, beaucoup n’avaient pas non plus leurs médicaments ou leur téléphone. Ils n’avaient évidemment pas prévu de rester bloqués de cette façon pendant des heures. »

Douze kilomètres à pied dans le froid et la pluie

« Ceux qui avaient quand même leur téléphone ont eu une autre surprise : il n’y avait aucun réseau disponible à des kilomètres à la ronde. Sans compter qu’il pleuvait des cordes et que la température avait fortement chuté. La plupart d’entre nous étaient frigorifiés. »

« J’ai pour ma part quitté le site du festival à 1 h 40. Nous avons d’abord dû marcher douze kilomètres pour atteindre un endroit où des navettes étaient censées nous attendre. Mais elles n’y étaient pas à notre arrivée. Nous avons alors appris que des chauffeurs Uber embarquaient des festivaliers à un kilomètre et demi de là. C’était effectivement le cas, mais il y avait une file d’attente de quatre heures. »

Arnaque, façon Uber

« Le comble est que ce service Uber nous a coûté deux cents dollars ! Quelques jours auparavant, Uber et Tomorrowworld avaient pourtant annoncé leur partenariat sur leur site respectif, en mentionnant un tarif forfaitaire de soixante dollars pour se rendre à Tomorrowworld et en revenir. Et comme la société Uber était un partenaire du festival, elle promettait une réduction supplémentaire de quinze dollars. Je suis finalement rentré à Atlanta à 7 h 30. En temps normal, le trajet prend quarante, quarante-cinq minutes à tout casser. J’aurais donc dû être dans mon lit à deux heures. »

« Quand nous sommes partis, nous avons vu des festivaliers dormir dans la boue le long de la route. Il faisait très sombre et il n’y avait aucune sécurité. La police, elle, brillait par son absence, car elle n’avait même pas été informée de la situation. Il y avait en tout et pour tout 5 préposés de l’organisation sur place. Pour gérer quelque cinq mille personnes attendant impatiemment de rentrer chez elles. Ils n’avaient apparemment même pas de talkies-walkies. »

« J’ai bien conscience qu’on ne peut pas agir sur la météo, mais quand on annonce deux cent mille personnes à un festival, on peut quand même raisonnablement s’attendre à ce que l’organisateur prévoit au moins un plan B, non ? Il est inadmissible de laisser des milliers de festivaliers ainsi en plan, d’autant qu’ils avaient déjà déboursé une sacrée somme pour participer à l’événement. »

Happy, happy

Et alors que le festival virait au drame, la page Facebook et le compte Twitter du festival n’en laissaient rien transparaître. Au contraire, à en croire les publications, tout semblait y aller pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les médias américains qualifieront cette attitude de « significant communications failure ». Cela n’a pas pour autant empêché l’équipe de TMW de faire circuler, après le festival, un post Instagram arborant le message « thanks everyone for making our job awesome! We love to capture those amazing moments, happy and dressed-up people and the amazing show!” »

Sur son site, Tomorrowworld a annoncé dimanche matin, troisième et dernier jour du festival, que les lieux ne seraient accessibles que pour les festivaliers séjournant au camping Dreamville. Motif invoqué : « The experience of the TomorrowWorld visitors is always TomorrowWorld’s number one priority ». Et les organisateurs d’ajouter : « Les fortes pluies des trois derniers jours ont considérablement réduit fortement la capacité d’accueil des parkings au site. Le bien-être de nos festivaliers a toujours été notre première priorité, ce pour quoi nous sommes contraints de fermer les parkings d’un jour et les zones d’embarquement et de débarquement de festivaliers désireux d’accéder au site. »

L’organisation a immédiatement remboursé les visiteurs qui avaient acheté une entrée pour le dimanche. Ceux qui avaient également payé pour une navette ou une place de parking ont été invitées à se manifester auprès l’organisation afin de récupérer leur argent.

Mais, les États-Unis, ce n’est pas la Belgique : pas question là-bas de calmer les mécontents avec quelques tickets-boissons. De nombreux festivaliers ont déjà pris contact avec des avocats pour réclamer des dommages et intérêts.

Selon Wilmsen, l’organisation a pris toutes les mesures de précaution nécessaires pour garantir le confort des festivaliers sur le site. « Nous avons fait comme en Belgique. Nous avons recouvert certaines zones de foin et d’écorces de bois et y avons installé des tapis. Chattahoochee Hills est un site gigantesque, que nous ne pouvons pas recouvrir entièrement de plaques de roulage. Et puis, il a plu sans interruption. Nous avions beau remettre du foin, à un moment, il était trempé et tout était à refaire. J’ai demandé qu’un rapport des événements soit établi. Nous sommes en train de l’analyser. Mais de toute façon, le centre de contrôle d’Atlanta est comparable à ce que nous avons mis en place en Belgique : il se compose notamment d’un représentant des autorités et d’un chef de la sécurité. L’organisation repose sur les mêmes valeurs que la version belge. Nous allons à présent nous pencher sur ce que nous aurions pu mieux faire pour faire face à cette situation et sur l’origine des problèmes de communication. »

Article en V.O. de Mick Van Loon sur Newsmonkey

Traduit du néerlandais par DaarDaar

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