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Pauvreté : et si on liait le montant des amendes covid au revenu des individus ?
21·04·21

Pauvreté : et si on liait le montant des amendes covid au revenu des individus ?

« Devons-nous plonger les gens dans la pauvreté pour lutter contre le coronavirus ? », s’interroge Fanny Cloquet.

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

Crédit: Josh Appel sur Unsplash

Auteur⸱e
Geneviève Bernard
Traductrice Geneviève Bernard

J’investis dans la force des personnes socialement vulnérables et construis avec elles une politique plus sociale. J’accompagne, par exemple, une jeune famille dans le cadre du projet de rénovation gantois Gent Knapt Op. La famille bénéficie d’un budget et d’un accompagnement pour l’installation de doubles vitrages dans son appartement. Nous rénovons les installations électriques et sanitaires pour répondre aux normes de qualité actuelles. Les bénéficiaires remboursent le montant de la rénovation lorsque l’habitation change de propriétaire.

Ils peuvent ainsi jouir d’un logement sûr et de qualité à l’efficacité énergétique plus que doublée. Me fondant sur la relation de confiance établie avec la famille, je fais le lien avec les services existants, qui lui fournissent une aide en matière d’éducation, de soins de santé et d’orientation professionnelle. Avec le CPAS, nous cherchons des solutions pour la famille en ce qui concerne son alimentation, sa consommation d’essence et les vêtements des deux enfants. Le couple a connu des débuts difficiles sur le plan financier : peu après la naissance de leur premier enfant, le père est tombé gravement malade, ce qui l’a empêché de travailler pendant quatre ans.

Dommages causés à la société

Un samedi, à l’issue de ma visite, le père de famille m’a expliqué qu’ils avaient ce jour-là célébré l’anniversaire de son frère. Dix membres de la famille se trouvaient chez son frère à cette occasion –- ce qui constitue bien sûr une infraction grave aux mesures de lutte contre le coronavirus. La police s’est rendue sur les lieux et chaque adulte a écopé d’une amende de 750 euros. En tant qu’organisateur, le frère s’est vu infliger une amende de 4 000 euros.

Le couple n’était pas suffisamment informé des règles en vigueur ; il n’avait pas non plus connaissance de ses droits de la défense.

Il faut incontestablement prendre des mesures contre les personnes qui enfreignent les règles visant à lutter contre la propagation du coronavirus. Cependant, les amendes infligées dans ce cadre sont disproportionnées. L’obligation de verser 4 000 euros est lourde de conséquences pour l’intéressé ; et 750 euros représentent plus des deux tiers du revenu mensuel du couple que j’accompagne. Une première amende infligée sans avertissement ne devrait jamais avoir de telles conséquences. 200 euros auraient suffi pour servir de leçon à cette famille.

Les amendes élevées causent des dommages à la société. Pour les payer, les contrevenants sont soumis à un plan de remboursement, ce qui leur laisse peu de marge pour assurer à leurs enfants une alimentation saine, par exemple. Il est cynique qu’une société, d’une part, consacre de l’argent, du temps et des ressources à l’amélioration de la position sociale et du logement des gens pour, d’autre part, les replonger sauvagement dans la pauvreté.

Vers un système finlandais ?

Les amendes doivent être proportionnelles à la situation financière des individus. Le principe fonctionne dans les deux sens. Pour une partie de la population, les amendes fixes sont proportionnellement si faibles qu’elles ne pèsent pas bien lourd dans la pratique. Pour d’autres personnes, par contre, les amendes fixes entraînent des difficultés démesurées.

Un anniversaire avec dix proches n’est absolument pas acceptable. Tout comme une lockdown party bien plus nombreuse, dont les organisateurs paient parfois les amendes avec le sourire. Si les autorités choisissent de frapper au portefeuille des contrevenants, la mesure ne doit pas être appliquée de manière arbitraire. Comme observé dans les pages économiques du journal De Standaard du 15 avril : bien que, l’année dernière, la majorité des Belges se soit enrichie de 45,5 milliards d’euros, la pandémie a rendu les personnes défavorisées encore plus vulnérables. Un système de sanctions exacerbant cette situation perd de sa légitimité. Seules des mesures équitables peuvent augmenter l’adhésion à la loi. Toute autre mesure l’affaiblit.

Dans de nombreux pays européens, les amendes sont liées au revenu. Des pays comme l’Allemagne, la Suisse, le Danemark, la Suède et la Finlande appliquent le système des « jours-amendes ». Tout contrevenant est passible d’une amende dont seul le montant varie. La Belgique prend volontiers comme modèle les pays scandinaves. Il est grand temps qu’elle fasse un pas en avant à cet égard également.

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