L’année dernière, le terrible accident causé par le footballeur Sofian Kiyine a suscité l’émoi. Sous l’emprise de l’alcool, le joueur d’OHL a percuté une salle de sport à Flémalle où des enfants jouaient encore quelques instants plus tôt. Par miracle, l’accident n’a fait aucun blessé. Si le drame a été évité de justesse, le footballeur au pied lourd peut remercier le ciel. À croire qu’il a roulé sur un trèfle à quatre feuilles dans sa course effrénée.
Aujourd’hui, la décision du tribunal de police ravive la colère populaire. Le chauffard s’en tire avec une gueule de bois et un éthylotest antidémarrage qu’il a fait installer de son propre chef dans son véhicule. Signe qu’il a tiré des leçons de l’accident, mais aussi que le juge s’est sans doute montré particulièrement indulgent à son égard. Ce n’est guère une punition : on ne peut conduire avec plus de 0,5 pour mille d’alcool dans le sang, voilà tout.
Il semblerait que Sofiane Kiyine ait peur de récidiver. Entendons-nous bien : l’homme n’a rien à faire derrière les barreaux, comme l’a réclamé la foule à grands cris après l’accident. Comme nous l’avons déjà écrit à maintes reprises dans ces colonnes, une peine de prison n’est pas toujours la meilleure solution. Il n’empêche que nous étions en droit d’attendre un signal fort de la part du juge après ce comportement irresponsable.
Sécurité routière: la police se prend pour le boss et écrit ses propres lois
On comprendra aisément pourquoi le sujet fait grand bruit en Flandre, région où les radars-tronçons fleurissent et où les amendes pleuvent. Dans le nord du pays, l’incrédulité règne. Même parmi les avocats et les professeurs d’université. Le pénaliste Joris Van Cauter a ainsi déclaré qu’il ne pouvait imaginer un seul instant qu’un tribunal de police flamand puisse faire preuve d’autant de clémence.
Si l’on peut assimiler de tels propos à du chauvinisme flamand, il est difficile de lui donner tort. En cas d’infraction liée à l’alcool, le juge n’annule la peine que dans 1% des cas en Flandre, contre 12% en Wallonie. Les chiffres, tirés d’un échantillon de 1500 jugements, parlent d’eux-mêmes.
« En cas d’infraction liée à l’alcool, le juge n’annule la peine que dans 1% des cas en Flandre, contre 12% en Wallonie. »
Loin de nous l’idée de faire du communautarisme. Christophe Deborsu, journaliste politique francophone, l’a lui-même exprimé en ces termes : « En Wallonie, des gens meurent sur les routes à cause du laxisme politique. » Cette phrase fait écho à un constat sans appel : il y a deux fois plus de morts sur les routes en Wallonie qu’en Flandre, alors que la population y est pour ainsi dire inversement proportionnelle.
Le sud du pays compte également beaucoup moins de radars-tronçons. Quid du permis à points, qui a fait ses preuves en matière de prévention dans de nombreux pays ? Le MR et le PS, qui ne sont pratiquement jamais sur la même longueur d’onde, le scandent à l’unisson : c’est non !
Comme l’a récemment déclaré l’ancien ministre de la justice Koen Geens (CD&V), il en va de la survie de notre État de droit. Les juges doivent davantage justifier leurs décisions afin d’aider les citoyens à mieux les comprendre. À défaut d’explication, force est de constater que la sécurité routière n’est pas aussi importante de l’autre côté de la frontière linguistique.
Sécurité routière : rouler à tout prix, quitte à écraser des enfants
