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L’identité de genre n’est pas une idéologie, mais un fait scientifiquement prouvé
04·06·24

L’identité de genre n’est pas une idéologie, mais un fait scientifiquement prouvé

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(c) Tim Mossholder

Auteur⸱e
Guilhem Lejeune
Traducteur Guilhem Lejeune

Les débats sur le genre s’invitent comme un sujet brûlant dans la campagne. Que ce soit dans les émissions Het conclaaf, De zevende dag ou Eerste keus, Tom Van Grieken crie sur tous les toits qu’il ne croit pas en l’existence des genres. « Première erreur, relève Piet Hoebeke. Il n’y a pas “des” genres : ce mot ne s’emploie pas au pluriel. Il y a des identités de genre. Ce qui montre bien qu’il faut définir cette notion avec précision. » Le spécialiste se propose de livrer la sienne. Urologue à l’hôpital universitaire de Gand, il a opéré de nombreuses personnes transgenres. Et en sa qualité de doyen de la faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Gand, il estime qu’il est important de communiquer sur le sujet. « Car l’existence du genre est établie par des preuves scientifiques : ce n’est pas une idéologie, c’est tout simplement un fait. »

Comment le genre s’exprime-t-il dans l’organisme ?

« Comparons notre ADN à une bibliothèque. Le génome est constitué de milliards de livres qui représentent les différents traits génétiques dont on hérite à la naissance. Cette bibliothèque est en grande partie identique chez les hommes et les femmes : seuls les chromosomes X et Y présentent quelques variations. Voilà pour la génétique, c’est-à-dire le génotype. Mais il y a aussi l’autre extrémité du spectre : le phénotype. Résumons les choses ainsi : parmi tous les livres disponibles, lesquels lit-on vraiment ? C’est l’épigénétique qui le détermine. Elle explique la différence de poids, tout comme celle de l’orientation sexuelle et du genre : certaines personnes sont ainsi nées hommes, mais en raison de toutes sortes de mécanismes épigénétiques, elles ne lisent pas les livres typiquement masculins. »

De quels types de mécanismes s’agit-il ?

« Plusieurs facteurs sont en jeu. Les perturbateurs endocriniens présents dans l’environnement, tels que les PFAS, peuvent en être un, de même que le stress de la mère sur le fœtus, ou encore la situation familiale, les radiations, la pollution, mais aussi des éléments positifs, comme le fait de grandir sans facteurs de stress. L’épigénétique est une science relativement récente. Citons un exemple typique d’influence épigénétique : la famine qui a frappé les Pays-Bas en 1944, connue sous le nom d’“hiver de la faim”. Les enfants conçus à cette période ont, par la suite, développé un appétit vorace — et un risque plus élevé d’obésité — parce que leur mère avait eu faim pendant sa grossesse. Autre exemple : une affection qui se caractérise, chez les petites filles, à une exposition accrue, avant la naissance, aux hormones mâles produites par la glande surrénale. Plus tard, 20 % d’entre elles sont lesbiennes, soit plus que la moyenne. Ces hormones ont donc joué un rôle épigénétique. De la même façon, plusieurs études épigénétiques ont mis en évidence des différences dans l’identité de genre. »

Peut-on choisir la partie du génome qui est lue ?

« Le grand danger, c’est de croire que tout cela est acquis. Or, ce n’est le cas que d’une fraction minime de l’ensemble des facteurs épigénétiques. Si un enfant grandit dans un milieu qui rejette l’idée du genre de manière très explicite, dogmatique, religieuse, ça peut finir par le travailler. Mais on n’a pas réellement prise là-dessus. »

Les différences d’identité de genre s’observent-elles aussi au niveau du cerveau ?

« Les IRM fonctionnelles, qui permettent de mesurer les fonctions cérébrales, ont révélé des différences chez les personnes transgenres. L’étude du cerveau menée par le neurobiologiste néerlandais Dick Swaab, un classique du genre, est également intéressante. Le cerveau des hommes et des femmes présente de légères différences. Mais ce qu’il a découvert, c’est que les cerveaux de femmes trans décédées présentaient le noyau typique des cerveaux féminins, alors même qu’elles étaient nées hommes. »

Tout cela en surprendra plus d’un. Ces derniers jours, je suis encore tombé sur une série de clichés en ligne : on ne serait femme que lorsqu’on a ses règles ou qu’on est de petite taille, par exemple.

« On peut être intersexe, ça existe aussi. Résumer les hommes et les femmes aux caractères sexuels primaires et secondaires, c’est bien trop réducteur. Le génotype et le phénotype ne peuvent pas être mis en correspondance parfaite. Mais pour en revenir à mes livres : tout le monde a dans sa bibliothèque les livres qui font grossir, mais tout le monde ne devient pas obèse. Cette variation s’applique également au genre. »

Pourquoi la question du genre fait-elle tant de bruit actuellement ?

« Il y a un courant conservateur très puissant, alimenté par les évangélistes américains, l’extrême droite européenne et la Russie. Ce sont eux qui font qu’on en parle. Mais ils se battent contre des moulins à vent, et il faut leur expliquer, encore et encore, qu’il existe des bases scientifiques solides expliquant ces différences d’identité de genre. Ce n’est d’ailleurs pas nouveau. Ça a toujours existé. C’est plus fréquent parce que les possibilités sont plus nombreuses. Et c’est devenu plus facile de l’assumer qu’auparavant. Mais il ne faut pas s’imaginer qu’il y aurait soudainement une “épidémie”. J’en profite d’ailleurs pour remettre les choses en perspective : la véritable problématique du genre concerne moins de 0,5 % de la population. »

 

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