Si la mission de la Défense nationale était de nous énerver, elle y est parvenue avec brio. L’armée recherche des femmes, et où va-t-elle les chercher ? Au centre commercial de Wijnegem. Si vous avez raté Kamp Waes, dont l’un des candidats les plus costauds était pourtant une femme, voici de quoi vous rattraper. Même les scénaristes de Loslopend wild & gevogelte, la série comique de la VRT sur les différences entre les femmes et les hommes, n’auraient pas pu imaginer un meilleur sketch : un parcours d’accrobranches en hauts talons et vêtements de camouflage, sacs Rituals et H&M sur le dos. Mission failed. Try again.
Cherchez ailleurs
Bien entendu, il faut aller chercher les candidates là où elles sont. Certes. Mais je ferais quand même remarquer que des candidates, on en trouve aussi, et en nombre suffisant, à la gare d’Anvers. Il faut dire qu’en termes de stéréotypes, il est difficile de faire mieux qu’un centre commercial. Le problème, c’est que l’armée cherche justement à se défaire des stéréotypes de genre. Notre défense sait qu’elle doit lutter contre une réputation négative à cet égard et elle tente de démontrer que les femmes ont bel et bien leur place dans ses rangs. L’overdose de testostérone n’est clairement pas nécessaire pour devenir un ou une bonne militaire, dans les services d’appui comme dans les fonctions de combat.
Cette entreprise de séduction du public féminin n’est pas sans intérêt pour l’armée. Elle sait très bien que c’est auprès des femmes qu’il y a le plus de recrues potentielles. Depuis des années, la Défense lutte contre une grave pénurie de candidats. Elle s’est fixé pour cette année un objectif de 2 000 nouvelles recrues. Sachant que les 2 200 femmes que compte notre armée ne constituent que 8,7 du personnel militaire, la conclusion est évidente.
Puériculteurs et plafonneuses
L’armée est confrontée aux mêmes obstacles que d’autres métiers en pénurie. Prenons la liste publiée il y a deux semaines par l’Office flamand de l’emploi, VDAB. Une part significative des fonctions à pourvoir sont généralement assimilées soit à des hommes, soit à des femmes. En effet, combien de puériculteurs et d’hommes de ménage connaissez-vous ? Et combien de plafonneuses, de techniciennes de maintenance et de bouchères ?
Ces fonctions seraient-elles soudainement moins en pénurie si le public en avait une vision moins genrée ? Bien sûr que non. Il existe d’autres facteurs qui expliquent ces pénuries. Cependant, cela ne ferait de mal à personne. Ce n’est pas pour rien que le VDAB tient à ce que ses offres d’emploi soient non genrées. Ce n’est pas pour rien que son moteur de recherche d’emplois ne demande pas votre genre quand il cherche un emploi qui vous convient.
Et ce n’est pas pour rien que l’enseignement s’efforce, depuis des années, à attirer les filles vers les filières scientifiques et technologiques.
Le cliché des filières
Les rapports sur le décrochage scolaire le démontrent : la progression est lente. Toutefois, on remarque que les filières dites « douces » attirent davantage de garçons et les filières « dures » davantage de filles. Il y a donc une évolution, mais elle est d’une lenteur phénoménale. Il est donc évident que pour changer les choses, il faut recourir à tous les moyens possibles, y compris les plus modestes. Mais les clichés qui assimilent les femmes au shopping n’en font pas partie.