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« Dénigrant », « choquant »… un présentateur sportif néerlandais avoue un viol à la TV sur le ton de la blague
29·04·22

« Dénigrant », « choquant »… un présentateur sportif néerlandais avoue un viol à la TV sur le ton de la blague

Depuis la parution de cet article dans la Gazet Van Antwerpen et la publication de la traduction sur DaarDaar, Johan Derksen a annoncé jeudi qu’il allait arrêter l’émission “Vandaag Inside”. L’ancien joueur n’a toutefois pas présenté ses excuses et s’est dit victime de la « cancel culture« .

Temps de lecture : 4 minutes
Virginie Dupont
Traductrice Virginie Dupont

Mardi soir, Johan Derksen, personnalité de la télévision néerlandaise, a déclaré sur le plateau de Vandaag Inside qu’il avait un jour introduit une bougie entre les jambes d’une femme inconsciente. Il a avoué le viol avec la même désinvolture dont il fait preuve pour raconter des blagues à la table du talk-show. Mais entre-temps, une tempête d’indignation s’est levée aux Pays-Bas.

Johan Derksen, habitués des plateaux télé aux Pays-Bas, choque par la décontraction avec laquelle il confesse son « erreur de jeunesse ». « Comment un homme peut-il se sentir à ce point en sécurité et se croire autorisé à raconter cette histoire en public, humiliant une fois de plus toutes les femmes ? »

« Nous étions de sortie avec le gardien de but de Veendam et deux demoiselles. Elles étaient tellement ivres qu’elles vomissaient partout. Je n’en suis pas fier, mais ce genre de choses arrive quand on est jeunes. Une des filles était allongée, inconsciente, sur un canapé. Il y avait une grosse bougie. Nous l’avons introduite entre ses jambes, et nous sommes partis. »

C’est en réponse à une question sur un collègue accusé d’agression sexuelle – Johnny De Mol, fils du magnat de la télévision néerlandaise John De Mol – que Johan Derksen (73 ans), invité régulier du talk-show, a avoué avec une certaine indifférence comment il a violé une femme lorsqu’il avait 22 ans. Bien qu’il se dise « mort de honte », il a raconté son « erreur de jeunesse » avec la légèreté qui caractérise ses interventions sur l’actualité lorsqu’il est convié à la table du talk-show. Notons que son histoire a été accueillie par les rires des présentateurs et des autres invités.

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« Elle a eu de la chance, pour le même prix, il aurait pu y avoir une batte de baseball dans la pièce », a réagi le co-animateur René van der Gijp (61 ans), suscitant une nouvelle vague de rires sur le plateau. L’humoriste Steven Brunswijk (38 ans) s’est demandé à voix haute « quelle était la taille de cette bougie ». Lorsque Johan Derksen a répondu qu’il s’agissait d’une « grosse bougie », ils ont à nouveau éclaté de rire.

« Mais bon, vous avez peut-être pensé qu’elle était consentante sous l’effet de l’alcool ? », a demandé le présentateur Wilfred Genee (54 ans) à Johan Derksen. « Techniquement, un procureur peut considérer ça comme un viol », a répondu Johan Derksen. « Mais si on se met à exhumer des affaires de ce type, on peut remonter très loin. Ce genre de choses arrive, nous avons tous commis des erreurs de jeunesse. »

« Déconcertant et blessant »

Hors caméra, on n’a absolument pas rigolé. « Comment un homme peut-il se sentir sûr de lui au point de déterrer cette histoire en public et de s’en délecter ? », tweete l’autrice néerlandaise Susan Smit.

Mariëtte Hamer, commissaire du gouvernement néerlandais à la lutte contre les comportements sexuellement inappropriés, a parlé d’un « moment de télévision choquant », « dénigrant et blessant » pour les victimes de violences sexuelles. L’employeur de Johan Derksen, Talpa, est également « extrêmement choqué » et s’entretiendra avec lui dès que possible.

Mais le journaliste sportif s’est déjà défendu vigoureusement dans les pages du journal Algemeen Dagblad. « Je ne retire pas un mot de ce que j’ai dit, je ne présente pas non plus mes excuses. C’est une erreur de jeunesse que j’ai confessée, et qui m’a rendu vulnérable. » Mercredi soir, Johan Derksen a nuancé son récit dans une nouvelle émission de Vandaag Inside. Il aurait placé la bougie entre les jambes de la jeune femme sans la pénétrer avec cet objet. « Ça reste barbare, et je me suis mal comporté à l’époque », a-t-il déclaré.

Steven Brunswijk a répondu sur la chaîne néerlandaise Radio 1 que cette histoire relève selon lui de la fiction. « Je suppose que Johan Derksen n’a pas vraiment fait ça. »

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C’est également ce qu’espère Goedele Liekens, présentatrice télé et membre de l’Open Vld. « Ce genre d’humour – de mauvais goût – est typique du mâle alpha. »

Liesbeth Kennes, spécialiste des violences sexuelles, s’est également indignée de cette scène. « Une autre époque ? Quand je vois comment ils en rigolent et en rajoutent, il est clair que les temps ne semblent pas avoir changé tant que ça. Ceux qui disent que #MeToo est allé trop loin racontent n’importe quoi ! Il est souvent question de zone grise », affirme-t-elle. « Mais ici il s’agit littéralement d’un abus d’une personne vulnérable. Et que les victimes soient mineures, porteuses d’un handicap ou inconscientes parce qu’elles sont ivres n’a aucune importance. Je mets tout ça dans le même panier. »

Déjà controversé

Johan Derksen travaille depuis plusieurs années avec Wilfred Genee et René van der Gijp dans différents talk-shows. Ensemble, ils ont régulièrement suscité la controverse. Lorsqu’un bateau de la fédération néerlandaise de football a défilé lors de la Gay Pride, René van der Gijp a affirmé que « le football n’est pas un sport pour les gays ». Et quand le journaliste de VTM Bo Van Spilbeeck a annoncé qu’il effectuerait désormais ses reportages en tant que femme, René van der Gijp, rebaptisé pour l’occasion « Renate », s’est pavané en robe et en perruque dans le studio. Et Johan Derksen de qualifier les transgenres d’« anormaux ».

« Techniquement, un procureur peut considérer ça comme un viol », a déclaré l’intéressé, qui ne doit pas craindre les poursuites. « L’incident est presque certainement prescrit », a déclaré le pénaliste néerlandais Max den Blanken. Johan Derksen a raconté qu’il avait 22 ans au moment des faits, qui se seraient produits en 1971. Ce n’est qu’en 2013 que le délai de prescription des infractions sexuelles graves a été aboli aux Pays-Bas.

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« Aujourd’hui, ce genre de délits graves est imprescriptible. Mais cette affaire était déjà prescrite avant que la loi soit modifiée. Et ce qui est prescrit est prescrit », souligne Roy Heerkens de Slachtofferhulp Nederland. « Mais cet acte est bien sûr moralement répréhensible à tous égards. »

Même si la victime dépose une plainte à la police, le système judiciaire ne pourra rien faire. Il n’en aurait pas été autrement si les faits s’étaient déroulés en Belgique. « La politique de poursuite des violences sexuelles s’est également endurcie en Belgique », explique l’avocat et professeur de droit pénal Joachim Meese (UA). « Mais ça n’aurait aucun impact sur des faits datant d’il y a cinquante ans. Ils seraient prescrits chez nous aussi. »

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