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12·04·18

Décocher des tirs lors d’un mariage, une tradition également flamande

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(c) Pixabay

Cathy Galle
Auteur⸱e
Maxime Kinique
Traducteur Maxime Kinique

La vague d’indignation qui vise actuellement les cortèges nuptiaux nous ferait presque oublier que la Flandre elle-même possède une vieille tradition de tirs à l’occasion d’une fête de mariage. Une tradition toujours bien vivace, surtout dans les zones rurales.

Les détonations de canons et de fusils de chasse constituent une tradition flamande très ancienne

À Genk, le cortège nuptial turc a de nouveau suscité une grande vague d’indignation en raison des tirs qui ont été décochés. « Une démonstration de domination de la part d’un groupe déterminé qui se sent inattaquable », a commenté la secrétaire d’État à l’Égalité des chances Zuhal Demir (N-VA) sur sa page Facebook.

Décocher une salve de tirs à l’occasion d’une fête de mariage ne constitue pas, toutefois, une coutume dont la communauté turque a l’apanage. C’est également une très ancienne tradition flamande. La plupart du temps, c’est un canon qui est utilisé mais il arrive également que les tirs émanent d’un fusil de chasse. « C’est une tradition qui est encore très vivace en Flandre, surtout dans les zones rurales », estime Laure Messiaen du Landelijk Expertisecentrum Alledaags Erfgoed (LECA).

Cette ancienne tradition est encore pratiquée régulièrement dans les provinces d’Anvers et de Flandre occidentale, surtout, mais beaucoup moins en province de Limbourg. « Cette salve de tirs avait autrefois pour fonction de protéger le bonheur des jeunes mariés », explique Messiaen. « Les fortes détonations étaient censées chasser les mauvais esprits et les forces occultes. Par le passé, on faisait exploser de l’acétylène dans de vieux bidons à lait. La déflagration s’entendait dans un rayon d’au moins 3 kilomètres. »

Cela fait plusieurs décennies déjà que les bidons à lait ont été remplacés par des canons à soufre. « On aurait dit un orgue du Moyen-Âge », rigole Charlotte en repensant aux tirs décochés la veille de son mariage. Il y a cinq ans, Charlotte épousait Christof à Erpe-Mere. « Décocher ou non une salve de tirs, ce n’est pas une décision que vous prenez en tant que futurs mariés. Dans notre cas, ce sont nos amis qui ont décrété que c’était nécessaire. Ils avaient loué un canon à soufre et après une réception au cours de laquelle l’alcool a coulé à flots, ils ont pris une petite cuiller et ont introduit de la poudre jaune dans les tuyaux en acier du canon orgue. Ils ont ensuite frappé de toutes leurs forces avec un marteau sur le canon, jusqu’à ce qu’il explose. » Des détonations tonitruantes allaient en résulter et se faire entendre dans un rayon très large autour du lieu de la fête.

Des détonations qui allaient également inciter certaines personnes à porter plainte, se souvient Charlotte. « Nous avons reçu la visite de la police mais lorsque les agents ont vu que nos amis disposaient d’une autorisation de l’administration communale, nous avons surtout eu droit à des félicitations pour notre mariage. Les agents en question sont même restés pour boire une bière. » En guise de bouquet final, le soutien-gorge de Charlotte et le pantalon de Christof ont été brûlés avant que les initiales du couple soient gravées dans la chaussée avec du soufre.

Amende SAC

Depuis l’instauration des sanctions administratives communales, les communes peuvent choisir elles-mêmes les comportements qu’elles veulent sanctionner et peuvent également infliger elles-mêmes des amendes SAC. En matière de salves de tirs, un grand nombre de communes ont depuis lors imposé certaines restrictions. Comme ne plus tirer après 22 heures. La plupart des administrations communales admettent toutefois qu’il arrive que les éventuelles infractions soient couvertes sous le manteau de l’amour. « On ne se marie qu’une fois, hein ! », déclare avec indulgence un commissaire d’une zone de police de Flandre occidentale. « C’est une tradition flamande aussi ancienne que sympathique et au sein de notre zone, on parle peut-être de deux salves de tirs par mois. La tradition veut que plus le couple est aimé, plus les tirs durent longtemps. Mais s’ils durent vraiment toute la nuit, nous intervenons. Il y a des limites. »

Le commissaire de police pointe également le fait que combiner tirs et alcool peut se révéler dangereux mais relativise. « Lorsqu’une autorisation est décernée, nous encourageons vivement les gens à faire preuve de prudence. Et jusqu’à présent, je n’ai pas encore vécu d’expérience où les choses tournent mal. » Faut-il alors voir dans cette histoire une manifestation du principe « deux poids, deux mesures » ? Lorsque ce sont des Turcs qui célèbrent un mariage, nous hurlons au tapage alors que nous n’avons aucun problème avec des mariages flamands pourtant tout aussi bruyants ? Ce n’est pas l’avis de notre commissaire de police. « J’y vois plutôt l’expression d’une opposition entre la ville et la campagne », explique-t-il. « Dans les villes, les nuisances sont moins tolérées qu’à la campagne, peu importe qui les provoque. Dans les zones rurales, on peut parfois se permettre des choses qui déboucheraient automatiquement sur des plaintes en milieu urbain. »

 

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