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Crise sanitaire: les femmes paient à nouveau le plus lourd tribut
29·04·20

Crise sanitaire: les femmes paient à nouveau le plus lourd tribut

Temps de lecture : 4 minutes Crédit photo :

Image par Gerd Altmann de Pixabay

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Les écoles maternelles resteront encore fermées un moment, tandis que les établissements de l’enseignement primaire et secondaire rouvriront au compte-goutte. Et parmi les enfants qui ne sont pas encore autorisés à assister physiquement aux cours, reste à savoir combien d’entre eux auront accès à la garderie.

Ce redémarrage restrictif par phases s’explique par plusieurs raisons, il ne s’agit pas ici de critiquer le processus. Furia (ASBL flamande féministe, critique et solidaire, NDLR) souhaite néanmoins porter plainte contre les experts et autres responsables politiques qui ont mis sur pied les stratégies de déconfinement, estimant que ces derniers n’ont que trop peu tenu compte des conséquences de la fermeture des crèches, des écoles et des initiatives d’accueil, ainsi que de la suppression de toutes les activités extrascolaires pour les personnes qui s’occupent (de l’enseignement) des enfants. Ces personnes méritent tout le soutien des autorités, et non pas uniquement de la compassion stérile. Le travail d’assistance est le grand oublié de la crise actuelle. Ce travail se manifeste dans de multiples domaines, mais nous mettons ici l’accent sur les parents avec des jeunes enfants.

Moins de concentration

Qui peut croire une seconde qu’il est possible de passer une journée de travail plus ou moins normale quand viennent s’ajouter l’accueil et l’accompagnement scolaire ? Il ressort d’une étude du Centre d’expertise en sciences familiales de l’Odisee Hogeschool que les parents d’enfants en bas âge sont plus à cran et éprouvent davantage de difficultés à se concentrer au travail (à domicile).

Sans doute est-ce encore vivable au sein des ménages composés de deux parents où l’un des deux (souvent la femme) ne travaille pas à temps plein, où la maison est suffisamment vaste que pour disposer d’un lieu de travail à l’écart, et où les journées de travail peuvent s’étaler du petit matin aux heures tardives du soir, à la faveur d’un employeur compréhensif. Mais qu’en est-il des parents isolés (en grande partie des mères seules) ? Qu’en est-il des ménages qui vivent dans des espaces exigus ? Et quid si votre enfant nécessite des soins d’urgence supplémentaires ? S’il est vrai que la crise actuelle peut permettre à certains d’avoir plus de temps, en cas de chômage partiel notamment, la perte de revenus et l’incertitude jouent indéniablement sur le moral.

Il aura fallu six semaines de confinement pour que voit le jour une solution provisoire pour les parents ayant un enfant âgé de moins de douze ans ou atteint d’un handicap : jusqu’à la fin de l’année scolaire, les parents concernés pourront demander des jours de congé parental supplémentaires, qui viennent s’ajouter aux congés parentaux classiques. Or ce régime de congés semble fermé aux parents adoptifs et aux indépendants. Comme s’ils ne se heurtaient pas aux mêmes obstacles. Sans compter que ce régime s’accompagne d’une perte de revenus, au même titre que les congés parentaux ordinaires, que tout un chacun n’est pas en mesure d’absorber : hormis les parents isolés, les allocations accordées se situent en dessous du seuil de pauvreté pour toutes les catégories.

Il y a fort à parier que ce seront (à nouveau) les femmes qui auront principalement recours à ce système, comme c’est déjà le cas pour les congés parentaux ordinaires. Les femmes ont en effet une rémunération moyenne inférieure à celle des hommes. Lorsque leurs revenus diminuent, l’impact sur les revenus du ménage est alors moindre. Si le travail reprend alors que de nombreux enfants doivent encore rester à la maison – scénario qui se profile – cette inégalité risque de se creuser davantage. Car le télétravail n’est pas toujours possible.

Congé « corona » pour les parents

Quand viendra l’heure du bilan, dans quelques mois, nous constaterons vraisemblablement que les femmes auront assumé le gros des tâches supplémentaires (non payées). Le but n’est pas ici de causer du tort aux nombreux pères qui donnent du leur : il se trouve simplement que la répartition inégale du travail familial entre femmes et hommes est démontrée dans chaque étude portant sur l’emploi du temps des ménages, et aucun indice de changement ne semble se dessiner.

Les médias confortent les femmes dans leur rôle social : ils montrent la plupart du temps des mères lorsqu’il est question d’accueil et d’accompagnement scolaire des enfants. Tout comme les volontaires qui confectionnent des masques : des femmes, elles aussi. Si nous avons tout le respect du monde pour leurs efforts, nous nous demandons en revanche si ce mode de production convient à la situation.

Les inégalités sociales se creusent

Force est de constater que la crise sanitaire exacerbe les nombreuses disparités sociales que nous connaissons, et que de nombreuses mesures ne sont pas appropriées ou ne font que creuser les inégalités existantes. Divers acteurs sociaux ont à ce titre exprimé leur inquiétude au cours des dernières semaines. Il est primordial que ces préoccupations trouvent écho dans les stratégies de déconfinement.

En ce qui concerne le travail familial, les entreprises pourraient par exemple écourter la semaine de travail des parents qui s’occupent des soins, en maintenant leur salaire, afin d’alléger la source de stress. Les virologues peuvent quant à eux réfléchir à la manière d’agrandir la bulle familiale, car elle a beau être saine d’un point de vue virologique, ce n’est pas toujours le cas sur le plan social. Les experts et les pouvoirs locaux peuvent réfléchir à des initiatives d’accueil de qualité à petite échelle, en établissant un calendrier à cet effet. Les hautes sphères politiques doivent dégager plus de fonds pour le congé « corona » des parents, afin qu’ils ne subissent idéalement aucune perte de revenus.

Bien plus qu’il y a quelques semaines, notre société repose désormais sur d’innombrables heures non rémunérées de travail familial. Or il ne fait aucun doute que ce travail s’avère précieux. Il est donc grand temps de partir en quête de solutions ad hoc, à la mesure de la crise actuelle et sur le plan structurel, tout en réfléchissant à la place que notre société accorde aux soins.

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