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18·05·18

La N-VA et les Palestiniens, deux poids deux mesures

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(cc) MamaClown

Roel Wauters
Auteur⸱e
Ludovic Pierard
Traducteur⸱trice Ludovic Pierard

Notre ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders (MR), devait-il rappeler à l’ordre l’ambassadrice israélienne en Belgique ? Son partenaire de gouvernement, la N-VA, estime que non. Mais le parti en lui-même est ébranlé par cette question.

« Elle s’est contentée de communiquer le point de vue de son pays. » Pour Peter De Roover, chef de groupe N-VA, Simona Frankel a simplement fait son travail.

L’ambassadrice israélienne a été rappelée à l’ordre par notre ministre des Affaires étrangères, le MR Didier Reynders. Pour la Belgique, elle a dépassé les bornes en affirmant que tous les manifestants palestiniens tués dans la bande de Gaza étaient des « terroristes ». Soixante ont été abattus par des soldats israéliens à proximité de la barrière de sécurité.

Tous les partis, majorité comme opposition, ont estimé que les déclarations de Mme Frankel étaient indécentes. Mais pour la N-VA, une condamnation publique n’était pas nécessaire. « Je ne suis pas d’accord avec les propos qu’elle a tenus, mais au moins, elle a été claire », explique Peter De Roover. « C’est bien là ce que j’attends d’une ambassadrice. »

D’où vient cette discordance ? La N-VA n’était-elle pas le parti qui prenait fait et cause pour les peuples opprimés ? Lorsque les protestations catalanes ont été écrasées à l’automne dernier par les autorités espagnoles, les nationalistes flamands se bousculaient au portillon pour témoigner leur soutien. Aujourd’hui, c’est le calme plat.

Bien entendu, la nature du confit est tout autre, les antécédents historiques infiniment plus complexes et la région concernée bien plus éloignée. « Avec l’Espagne, nous partageons un seul espace démocratique : l’UE », justifie son porte-parole, Joachim Pohlmann.

Un avis que ne partage pourtant pas l’Alliance libre européenne. Ce bloc de partis européens, dont fait partie la N-VA, a organisé l’accueil du ministre-président catalan, Carles Puigdemont, à Bruxelles. Aujourd’hui, elle prend fait et cause pour les Palestiniens. « L’Europe doit condamner cette violence disproportionnée », déclare Gunther Dauwen. « Des enfants sont assassinés. »

La N-VA plaide d’abord pour une certaine nuance. « Si ce débat n’est mené qu’avec des prises de position simplistes, la première victime sera la vérité », explique Joachim Pohlmann. Ou comme le dit Peter De Roover : « Dans ce cas-ci, il n’y a pas de coupable tout désigné. »

Deux poids, deux mesures ? C’est ce qui ressort de la déclaration du ministre-président flamand, Geert Bourgeois (N-VA), qui, en plus de l’armée israélienne, a condamné le Hamas pour avoir échauffé les esprits du côté palestinien. Une résolution similaire a été adoptée hier au parlement flamand.

Willy Kuijpers

Les nationalistes flamands évitent les déclarations fortes et, quand ils s’expriment, ils veillent à maintenir un certain équilibre. La N-VA navigue ainsi entre deux courants qui traversent le parti : les adeptes d’un nationalisme des peuples et les pro-israéliens.

Nombreux sont ceux, issus de feu la Volksunie, qui ont conservé une certaine sympathie pour la cause palestinienne. « C’est dans les gènes du parti, je suis en cela la tradition de Willy Kuijpers », déclare Piet De Bruyn, parlementaire flamand. Les anciens de la Volksunie s’engagent dans toute l’Europe en faveur des minorités opprimées. Piet De Bruyn lui-même s’est déjà rendu cinq fois en Palestine et en Israël depuis 2008. Une tendance que partage aussi Geert Bourgeois.

D’un autre côté, la N-VA n’est pas insensible aux intérêts juifs à Anvers. Le bourgmestre, Bart de Wever, a envoyé un tweet, juste avant que la violence se déchaîne, dans lequel il félicitait Israël pour ses 70 ans d’existence. Sans oublier que la question palestinienne est revendiquée par la gauche, un élément auquel plusieurs membres de la N-VA préfèrent ne pas être associés.

Ludo Van Campenhout, échevin à Anvers, entretient d’excellentes relations en Israël. Il accepte de prendre position. « Je regrette chaque victime. Mais les Israéliens auraient-ils tiré si ces protestations avaient été totalement pacifiques ? La responsabilité de ces violences repose sur les Palestiniens du Hamas. » Ludo Van Campenhout et Piet De Bruyn siègent ensemble dans le groupe flamand. « Les opinions divergent au sein du parti, mais ce n’est pas un problème. »

La N-VA n’a pas l’intention d’apostropher Didier Reynders à propos de cet incident diplomatique. Cette affaire ne lui rapportera rien sur le plan électoral, bien au contraire. Mieux vaut éviter d’irriter l’ancienne garde ou la communauté juive. Il n’y a pas d’unanimité au sein du parti, admet une source bien informée. Quoi de plus humain dès lors que d’éluder la question ?

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