Joachim Coens, le président du CD&V, l’a déjà annoncé à plusieurs reprises. Son collègue libéral, Egbert Lachaert, aimerait aussi le faire. Mais c’est le petit jeune, Conner Rousseau, qui s’est lancé le premier : il a transformé son parti en mouvement. Ne dites plus sp.a, dites Vooruit : « En avant ». Cela dit, malgré la flamboyante présentation numérique de ce week-end, nul ne sait encore quelle est la valeur ajoutée de ce changement.
« Un mouvement peut aussi s’adresser aux non-affiliés », explique Rousseau. Un argument quelque peu étrange, car c’est ce que font déjà d’autres partis. Même son prédécesseur organisait déjà, avec succès, des soirées-débats avec des non-membres. Chez Groen, on peut même devenir bénévole pour le parti sans être affilié. Quant au CD&V, il faisait participer, il y a dix ans déjà, des non-membres à la rédaction du programme du parti. Autre caractéristique censée faire la différence : « Un mouvement demande aussi des idées aux gens ».
Rousseau surfe ici sur un concept que la Rue de la Loi semble avoir redécouvert. En effet, même pour la réforme de l’État, on organise désormais des consultations citoyennes, à l’heure où ces mêmes citoyens passent leurs journées à donner leur avis sur Twitter et sur tous les autres réseaux sociaux. S’il y a trente ans, la parole citoyenne faisait défaut, aujourd’hui, c’est plutôt de leadership que nous manquons.
« Dorénavant, il n’y a plus aucun tabou. »
Quand quelqu’un prononce cette phrase, il faut toujours rester sur ses gardes, car il s’agit souvent d’une projection des tabous contre lesquels lutte la personne qui la prononce. Puis, quels tabous, au juste ? Au parlement, tout le spectre politique est représenté, de l’extrême gauche à l’extrême droite, et le politiquement correct a disparu depuis longtemps.
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Il va donc encore falloir définir clairement en quoi un mouvement peut faire la différence. Mais une autre question se pose : comment un parti de gouvernement tel que le sp.a/Vooruit peut-il tout à coup révolutionner sa manière de faire de la politique ? Comment peut-on se renouveler de manière crédible quand on est, depuis des décennies, un parti du système et quand on participe aux discussions en coulisses, à la distribution des mandats et au petit jeu stérile de la majorité contre l’opposition ? Pour se renouveler, tant sur la forme que sur le fond, il vaut mieux partir d’une position indépendante. En ce sens, Conner Rousseau joue gros, et nous espérons qu’il dévoilera bientôt la manière dont il compte s’y prendre.