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30·03·17

La Flandre exporte bel et bien des armes vers l’Arabie saoudite

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(c) FlanellKamerasFilm

Traducteur⸱trice David Wesel

« La Flandre n’exporte pas d’armes vers l’Arabie saoudite », a déclaré Geert Bourgeois, ministre-président du gouvernement régional flamand, en réponse à un appel lancé par le ministre fédéral de la Coopération au développement Alexander De Croo pour un embargo sur les armes contre l’Arabie saoudite. Le mouvement pacifiste Vredesactie affirme le contraire.

Il ressort d’une étude menée en 2011 par le Vlaams Vredesinstituut (Institut flamand pour la Paix) que les appareils de combat Eurofighter franco-britanniques achetés et déployés par l’Arabie saoudite dans la guerre contre le Yémen sont équipés de matériel radar produit par l’ancienne entreprise flamande Cassidian Belgium (auparavant EADS DS Belgium, reprise en 2015 par Advionics). L’acheteur était installé en Allemagne, mais la marchandise a tout de même trouvé le chemin de l’Arabie saoudite. Le gouvernement flamand affirme « ne pas être au courant ».

« Les perpétuels bombardements saoudiens ont provoqué une catastrophe humanitaire au Yémen. Des millions de personnes souffrent de la faim. Hôpitaux, écoles et ports sont détruits. Et des armes flamandes seraient utilisées à cette fin ? Hallucinant ! », déclare Bram Vranken, porte-parole du mouvement pacifiste Vredesactie.

Le gouvernement flamand affirme qu’aucune licence d’exportation n’a été accordée à destination de l’Arabie saoudite. Vredesactie constate que les autorités flamandes n’ont en fait pas la moindre idée de l’endroit où aboutissent les produits pour lesquels elles délivrent une licence d’exportation.

Licences d’exportation

Le matériel radar peut théoriquement aussi bien s’employer dans des avions civils que militaires. Il s’agit de produits ‘liés à la défense’ qui doivent dès lors répondre aux exigences du décret sur le commerce des armes. Celui-ci stipule qu’une licence d’exportation doit être délivrée par les autorités avant que ces produits ne puissent être vendus à l’étranger.

Dans le cas d’entreprises en Région flamande, il revient ainsi aux autorités flamandes de vérifier au préalable si les produits vendus ne risquent pas de se retrouver entre les mains de régimes qui violent les droits de l’homme et de la femme. Pour une exportation vers un autre pays de l’Union européenne comme l’Allemagne, cela ne pose cependant jamais problème.

La destination finale du produit vendu est déterminée par le ‘end user certificate’, ce qui interdit en théorie la revente par l’acheteur vers une tierce destination. Les autorités ne sont toutefois pas obligées d’imposer une telle limitation de l’utilisation finale. L’application correcte de ce certificat ne fait en outre l’objet d’aucun contrôle probant. En réalité, le gouvernement flamand ne sait donc pas où les produits dont il autorise l’exportation terminent leur course.

D’après les chiffres de 2015, la véritable destination finale des produits à double usage qui quittent la Flandre est inconnue dans 69,4 pour cent des cas. Pour l’exportation au sein de l’Union européenne, le décret flamand sur le commerce des armes fonctionne selon un système de licences d’exportation générales qui ne précisent pas la véritable destination finale.

Éternelle controverse

La législation sur le commerce des armes est au cœur d’une grande controverse depuis de nombreuses années déjà. Rien n’a en fait changé depuis le transfert de cette compétence du niveau fédéral aux gouvernements régionaux. Ce qui apparaît en théorie comme un système probant de licences d’exportation après examen de la destination finale est en fait un chèque en blanc. Année après année, il s’avère que ce système n’est qu’une astuce administrative servant à légitimer l’exportation de produits controversés à usage militaire vers des pays qui prennent des largesses avec les droits humains de leur propre population ou de celle de leurs voisins (comme l’Arabie saoudite au Yémen).

La législation en vigueur, qui prend maintenant la forme d’un décret en Flandre, est sempiternellement modifiée pour répondre à la critique de mouvements pacifistes. En réalité, le système reste inchangé. La procédure formelle permet aux autorités de se dédouaner lorsque les produits dont elles ont autorisé l’exportation se fraient un chemin jusqu’à un utilisateur final douteux. Il suffit pourtant aux autorités de consulter les sérieuses études internationales de respectables institutions de recherche telles que le Stockholm International Peace Research Institute pour savoir qui sont les véritables demandeurs de certains produits.

Le cockpit comme cœur de cible

Des entreprises flamandes telles qu’Advionics se spécialisent depuis des dizaines d’années déjà dans les instruments de cockpit pour avions. Ces petits composants ont beau représenter une part minime du coût total élevé des avions de combat, ils n’en sont pas moins essentiels pour permettre à un pilote de faire ce à quoi servent ces avions : mitrailler et bombarder des civils généralement sans défense dans des pays lointains, de l’Indonésie à l’Arabie saoudite.

Le gouvernement flamand propose maintenant une énième modification du décret sur le commerce des armes. « Cette proposition ne résout pas le problème de l’incertitude qui entoure l’utilisation finale. Une occasion manquée », conclut Vredesactie.

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