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Bruno Tobback : un combat perdu d’avance ?
22·05·15

Bruno Tobback : un combat perdu d’avance ?

Temps de lecture : 4 minutes Crédit photo :

Contexte : L’actuel président des socialistes flamands (SP.A) Bruno Tobback (45) et l’ancien secrétaire d’Etat à la Lutte contre la fraude John Crombez (41) sont tous deux candidats à la présidence du parti. Le résultat du scrutin sera connu le 13 juin prochain. Cette date avait été avancée après une période post-électorale tumultueuse pour le SP.A, relégué depuis mai 2014 dans l’opposition. Si le programme des deux hommes est relativement comparable, celui de John Crombez se révèle davantage de gauche.

Mercredi soir, c’était le débat des candidats à la présidence du parti socialiste flamande (SP.A) à Gand. John Crombez, le grand favori, est au comptoir entouré des membres du parti, tout sourire. Bruno Tobback, qui remet son poste en jeu, se tient quant à lui à vingt mètres de là, seul avec sa bière. Une anecdote qui en dit long…

Cette image donne l’impression que le combat est déjà gagné d’avance. C’est comme si les ténors du parti avaient déjà décerné la victoire à John Crombez. Bruno Tobback semble être encore le seul à lutter contre cette perception. Une réaction dépourvue de bons sens ? Difficile à dire. La prudence est toujours de rigueur : le parti ne se compose pas seulement de mandataires et personne ne peut prédire le vote des membres.

Pourtant, il faudrait un demi-miracle pour que Bruno Tobback l’emporte. Ces derniers mois (et années) les relations dans les hautes sphères du parti tournent au vinaigre. À tort ou à raison, certains qualifiaient Bruno Tobback de père fouettard, de dictateur. Selon eux, il n’hésitait pas à s’en prendre durement à ceux qui le contredisaient, c’était un homme qui ne témoigne ni d’émotions ni de compassion.

Une autre anecdote : juste avant son investiture (en été 2011), il avait accordé un entretien avec sa colistière Joke Quintens. À cette occasion, elle avait dressé un portrait peu glorieux : « il y a longtemps, au début que nous nous connaissions, il se prenait pour un boute-en-train alors qu’il ne faisait rire que lui. Je me disais parfois, quel pauvre gars… Mais ça s’est arrangé. »

Ce sont les résultats qui comptent

Bon nombre trouvent que cela ne s’est pas arrangé, nous vous épargnerons les surnoms donnés, à tort ou à raison, à Bruno Tobback. Mais une chose est sûre : un parti politique, c’est comme une équipe de football. Le mécontentement latent refait surface quand les résultats sont mauvais.

Ne vous y méprenez pas : même sous Steve Stevaert, tout le monde n’était pas satisfait. Les socialistes grinçant des dents en raison de l’attitude autocratique de Steve Stevaert, étaient plus nombreux que l’on croit. Il en va de même avec la N-VA de Bart De Wever ou avec le VLD sous Guy Verhofstadt. Tant que l’homme à la barre est suffisamment populaire pour faire progresser le parti (en nombre de sièges et en prise de pouvoir), les conflits restent cloisonnés en interne. Si les résultats sont à la baisse, c’est à ce moment-là que ça dégénère.

Pas une question de contenu, mais de personnalités

Le débat dans la salle du Vooruit à Gand n’aurait pu changer la position de Bruno Tobback que d’un chouia. D’une part : la plupart des intentions de vote ont déjà été exprimées. D’autre part : le mécontentement est simplement trop grand. Peu importe que Bruno Tobback ait remporté le duel (il est de loin le meilleur orateur) ou que le parti remonte légèrement dans les sondages.

En publiant cette semaine une quinzaine d’interviews off the record avec des membres du parti, le quotidien De Morgen confirme le profond mécontentement au sein du SP.A. Tous ces témoignages ont eu lieu sous le couvert de l’anonymat et ne sont peut-être pas représentatifs de l’ensemble du parti. Si vous parlez toutefois de manière informelle avec des membres importants du SP.A, ils vous en dresseront tous une image désespérante. Le négativisme est omniprésent auprès des ténors socialistes, comme on peut le constater depuis des mois.

À la recherche de différences idéologiques

Le débat à Gand a également montré qu’il s’agissait d’une lutte de personnes et non d’idées. Parlons plutôt de non-débat, car, du point de vue du contenu, les arguments des candidats ne diffèrent quasi pas. Une divergence d’opinion est tout au plus perceptible sur le revenu minimum pour tous.

Bruno Tobback s’oriente plus vers le centre du spectre politique tandis que John Crombez adopte un profil plus à gauche. Ce dernier souhaite enthousiasmer son public, il « ose » aller à l’encontre des pensées dominantes. Mais, en fin de compte, ne sont-ils pas deux hommes politiques de centre-gauche qui souhaitent attirer le plus d’électeurs possible ? Ne représentaient-ils pas tous deux leur parti au gouvernement ? N’ont-ils pas contribué ensemble au renouvellement du parti ces dernières années ?

Malheureusement pour Bruno Tobback, il a dû souvent mordre sur sa chique quand son parti était membre du gouvernement. C’est toujours plus difficile de se démarquer lorsque son parti est en coalition. (Cette règle ne s’applique toutefois pas aux membres de la coalition suédoise actuelle, qui n’arrêtent pas de se voler dans les plumes…)

Ce qui devait être un débat contradictoire ressemble donc plus à une partie d’échecs où John Crombez prétend que son programme est différent de celui de Bruno Tobback. Objectif : ne pas montrer qu’il s’agit d’ambitions personnelles et qu’il veut régler ses comptes avec Bruno Tobback. Officieusement, on ne s’en cache pourtant pas dans le camp Crombez.

Que réserve l’avenir ?

Le camp Tobback veut également jouer sur ce tableau. C’est la raison pour laquelle Bruno Tobback a souvent donné raison à John Crombez : s’il n’y a aucune lutte idéologique réelle, il vaut mieux éviter un changement qui pourrait s’avérer néfaste. Un ténor du parti a d’ailleurs indiqué en marge du débat : « Tobback reste dans la roue de Crombez et refuse de prendre le relais. Par pure frustration, Crombez refuse à son tour de pédaler. »

Dans le même temps, le camp Crombez (c’est -à-dire la quasi-totalité des responsables du parti) s’accorde pour dire que Bruno Tobback étrangle le SP.A. Selon eux, il doit quitter la présidence afin de laisser le parti prendre une nouvelle bouffée d’air. Ce processus va cependant durer encore des années et le succès n’est pas garanti. Conclusion fâcheuse du débat de mercredi soir : peu ou aucune proposition innovante n’était de la partie. Aucun candidat n’a donné l’impression que les socialistes sont prêts à prendre leur avenir en main.

en V.O. sur le site de Deredactie.be : http://deredactie.be/cm/vrtnieuws/opinieblog/analyse/1.2346100

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