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Viol puis suicide d’une jeune fille de 14 ans : l’échec de notre société
03·06·21

Viol puis suicide d’une jeune fille de 14 ans : l’échec de notre société

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(cc) Anemone123 via Pixabay

Fabrice Claes
Traducteur Fabrice Claes

Ça aurait pu être votre fille. Une fille, jeune, de quatorze ans, a été victime d’un viol commis par un groupe de garçons. Une fille, jeune, de quatorze ans, a dû vivre en supportant que les images du crime circulent sur Internet. D’une telle vie, elle n’en a pas voulu. Une fille, une enfant encore, a été atteinte au plus profond de son être. C’est un crochet dans l’estomac. Et elle n’est pas la seule. Une fille mineure sur quatre et un garçon mineur sur dix subissent des abus sexuels. En 2019, 201 plaintes pour viol collectif et pas moins de 4 664 plaintes pour viol ont été déposées. Ce n’est que le sommet de l’iceberg, et sous la ligne de flottaison, il fait glacial.

Plaintes qui aboutissent peu

L’indignation sert souvent de moteur. À la colère succèdent les appels à l’action. Les gouvernements ont établi des centres de prise en charge des violences sexuelles, où les victimes peuvent demander des soins médicaux, des enquêtes médico-légales et éventuellement une assistance policière ou judiciaire. Il existe aussi des numéros d’appel d’urgence et des sites web consacrés aux victimes. La loi sur le revenge porn sanctionne toute personne qui diffuse sans autorisation des photos d’autres personnes nues. Les peines pour viol sont passées de cinq à dix années de prison. Mais le problème qui demeure, c’est que les plaintes pour viol n’aboutissent que trop peu devant un juge. Dans le passé, un dossier sur deux était classé sans suite. Et avec le dossier, la douleur de la victime. Et même lorsque l’affaire se conclut par un procès, les coupables ne sont pas toujours condamnés, ou le sont trop légèrement. Danièle Zucker, spécialiste de l’analyse des comportements criminels, a publié une étude qui établit qu’à peine quatre coupables sur cent sont sanctionnés. Certes, tous les viols ne méritent pas la même peine. Certes, les preuves sont souvent difficiles à produire. Mais il n’en demeure pas moins que ces chiffres font froid dans le dos.

Fil d’attentes pour des thérapies

Ça aurait pu être votre enfant. La fille avait besoin d’assistance psychologique. La famille avait cherché de l’aide et après une longue attente, elle a enfin pu obtenir un rendez-vous pour une thérapie. Mais deux jours avant, elle s’est donné la mort. C’était trop tard. Non seulement c’est insupportable, mais c’est aussi un problème qui date. La moitié des enfants souffrant de problèmes psychologiques doivent attendre au moins une demi-année pour obtenir de l’aide. Ces files d’attente, elles existent depuis vingt ans déjà. Il est temps d’investir notre argent dans des missions aussi essentielles. D’investir beaucoup plus dans les soins psychologiques plutôt que dans des futilités comme des séances de coaching nature, aussi curatives soient-elles. Ce n’est pas une question de volonté, mais une question de devoir.

La société entière en échec

Aussi, comme on ne peut pas tout couler dans des lois, il faut également changer les mentalités. Comment se fait-il que des jeunes ne voient pas d’inconvénient à violer une jeune fille pour ensuite diffuser les images de cet acte sur les réseaux sociaux ? On nous apprend de mieux en mieux à avoir des relations sexuelles en toute sécurité, mais nous apprend-on vraiment ce qu’est le consentement ? Lorsque cela arrive à leur enfant, les parents tiennent généralement à ce que cela ne s’ébruite pas, car ils regrettent de n’avoir pas été capables de protéger leur enfant. Donnons-nous aux victimes suffisamment d’espace pour s’exprimer ? Lorsqu’une fille, par honte et par chagrin, ne voit pas d’autre issue après un viol et la diffusion des images de ce viol, c’est une société entière qui est en échec.

C’est leur enfant. Pour les parents, ces considérations arrivent trop tard. Ils doivent enterrer leur fille. « Une petite fille, fraîche de quatorze printemps », comme l’aurait dit Boudewijn de Groot, grand chanteur à texte néerlandais. Une petite fille plongée dans le froid et le silence.

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