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27·09·16

Un ours polaire, ça ne pleure pas

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(c) VRT Nieuws

Pleurer : un signe de faiblesse ou d’humanité ? Au cours de l’histoire, les larmes des personnalités politiques ont toujours été interprétées de plusieurs façons. Des interprétations divergentes, mais souvent simultanées. Les partisans de Bart De Wever attendent une autre attitude de la part de leur leader, dont l’image est aux antipodes de l’émotivité publique.

De l’interprétation des larmes en politique

Les larmes que le président de la N-VA, Bart De Wever, a laissé échapper sur les ondes de la radio publique flamande constituent évidemment un événement politique. Il suffit, pour s’en convaincre, de consulter tous les médias, même sociaux.

Les réactions furent pour le moins contrastées. Pour les uns, les larmes de De Wever dévoilent l’homme qui se cache derrière le politique souvent cassant, pour les autres, De Wever instrumentalise ses émotions afin de détourner l’attention des difficultés qu’a rencontrées son parti ces dernières semaines.

Ces deux réactions sont surprenantes. Il faut vraiment avoir une image négative de l’humanité pour penser que De Wever fait couler ses larmes sur commande lorsqu’il parle de sa relation avec son père.

Et d’autre part, qu’y a-t-il de neuf lorsqu’on prétend que Bart De Wever est « un être humain » ? Quelle que soit l’opinion que l’on se fait du personnage, force est de constater qu’en interview, il s’engage toujours émotionnellement et intellectuellement, ce qui est plutôt rare en ces temps où la langue de bois règne en maître.

Les procès d’intention de ce genre n’ont rien d’exceptionnel. Lorsque le président américain, Barack Obama, n’a pas pu retenir ses larmes au moment d’annoncer un durcissement des conditions d’accès aux armes afin de lutter contre les fusillades, nous avons pu lire les mêmes analyses. Pour les uns, Obama jouait la comédie, et pour les autres, jamais un président n’avait été aussi authentique.

Ce que démontrent ces analyses, c’est que les crises de larmes d’une personnalité politique doivent toujours trouver une explication. Ou plutôt des explications, car elles sont souvent multiples. Lorsque Margaret Thatcher, la Dame de Fer, a avoué qu’elle pleurait parfois le soir, cela lui a valu autant de compassion que de railleries.

Et tel est le destin réservé à De Wever, un homme politique taillé du même bois que Madame Thatcher. Si les crises de larmes constituent bel et bien un moment de faiblesse, elles ne sont pas interdites pour autant. Ceci dit, comme ce fut le cas pour Margaret Thatcher, il est impossible de savoir sur quoi déboucheront les larmes de De Wever.

Par exemple, le personnage peut paraître plus sympathique aux yeux du public, ce qui ne manquera pas de frustrer tous ceux qui remettent en question la politique du président de la N-VA en ces temps de discorde au sein du parti, de désirs d’état d’urgence et de trous dans le budget fédéral.

Une mise en scène cynique ?

Il existe encore une autre interprétation. Dans l’actualité politique belge, les larmes de Bart De Wever suivent entre autres celles de Bert Anciaux (lors de sa démission en 2002), de Patrick Janssens (sur l’épaule de l’acteur Gene Bervoets), de Meryame Kitir (après la fermeture de Ford Genk), de Philippe Muyters (sous le feu des critiques pour ses mensonges au Parlement flamand) et de Caroline Gennez (à la journée familiale du sp.a au zoo d’Anvers).

Un homme politique de la trempe de De Wever n’a pas sa place dans ce palmarès. En effet, ses partisans n’avaient pas hésité à railler Patrick Janssens lorsque celui-ci avait éclaté en sanglots lors de sa défaite face à De Wever dans la course à la Maison communale anversoise. Autant dire qu’ils attendent une autre attitude de la part de leur propre leader, dont l’image est aux antipodes de l’émotivité publique : « Eisbären müssen nie weinen », comme le disait la chanson new wave du groupe Grauzone dans les années quatre-vingt. Les ours polaires ne doivent jamais pleurer. Apparemment, Bart De Wever n’est plus un ours polaire.

Alors finalement, ces larmes sont-elles le fruit du hasard ou d’une mise en scène cynique et tout à fait consciente ? Le doute est permis. En tout cas, elles rappellent celles d’un ancien président de la Volksunie, Fons Borginon, lors d’une interview dans De Morgen en 2001. Lui aussi avait craqué en répondant à une question sur son père – Borginon et De Wever ont un passé familial et politique similaire. De surcroît, l’interview avait aussi eu lieu à un moment où la Volksunie était sur le point d’imploser et où Borginon ne parvenait plus à rassembler ses troupes.

Je ne dis pas que la N-VA va imploser, mais je constate des points communs entre Borginon et De Wever, également envahi par l’émotion lors d’une question sur son père décédé. Mais aussi à un moment inédit dans sa carrière. Un moment où la pression se révèle si forte que même les ours polaires en arrivent à pleurer.

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