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12·07·16

Tant que la Belgique n’est pas un pays ordinaire, le combat flamand reste de mise

Temps de lecture : 4 minutes
Pierre Lambert
Traducteur⸱trice Pierre Lambert

Est-il encore nécessaire de faire du 11 juillet une journée de combat ? Pieter Bauwens (rédacteur en chef du site d’info Doorbraak proche du mouvement flamingant ) estime que oui.

La Flandre n’est plus un « trou à rats » et la « maladie flamande » a cessé de désigner dans le monde les conséquences physiques de la paupérisation. La Flandre a fait son chemin. C’est une évolution dont on peut s’enorgueillir, surtout un 11 juillet. Les générations qui nous ont précédés ont connu la prospérité. Mais nous devons aussi faire en sorte que les prochaines générations puissent progresser dans cette voie.

« L’identité belge est une boîte vide, ou plus exactement un agglomérat de deux ou trois boîtes vides »

Les Flamands ne sont plus des citoyens de seconde zone en Belgique. Excepté à Bruxelles. Il ne faut plus savoir « se débrouiller en français » pour gravir les échelons. Quoique cela reste utile, car le néerlandais ou le « flamand » est une langue encore largement méconnue de l’autre côté de la frontière linguistique. Cette confusion des langues ne nous empêche pas d’être #tousensemble ou, si c’est impossible, #allinred. L’identité belge est une boîte vide, ou plus exactement un agglomérat de deux ou trois boîtes vides. Mais cela explique-t-il la nécessité d’un mouvement flamand ?

Eh bien non, pas besoin pour cela de mouvement flamand. Par contre, celui-ci reste nécessaire aussi longtemps que la Belgique n’est pas un pays normal. Il garde sa raison d’être tant que the great pretenders s’obstinent à dire que la Belgique est un pays ordinaire. Et ce, alors qu’il est marqué par les divisions communautaires dans presque tous les domaines, comme les grèves de ces derniers mois l’ont encore clairement montré. On a tenté de pallier ces différences en procédant à six réformes de l’État sans plan bien défini. Le résultat : une structure étatique arbitraire, non adaptée aux besoins inhérents à tout État performant. Et pour encore compliquer les choses, on plaide aujourd’hui pour une « réforme de l’État en sens inverse », qui ferait de nouveau fusionner des compétences autrefois scindées… Vous arrivez encore à suivre ?

Le mouvement flamand doit convertir la Fête flamande en occasion d’aller au fond des choses. La Belgique est le problème et non la solution. La Flandre et la Wallonie affichent des différences trop importantes sur les plans politique et socioéconomique. Qui plus est, le fossé ne cesse de se creuser avec Bruxelles. Comment élaborer une politique adéquate pour un pays aussi petit, traversé par des clivages aussi profonds ? C’est impossible. Cela donne lieu à une période prolongée de demi-décisions ou d’absence de décisions. Ou à l’imposition par un camp d’une politique non adaptée à l’autre camp. Ou encore à la minoration d’une partie par l’autre. Essayez donc de gouverner un État dans de telles conditions…

« Le mouvement flamand ferait bien d’accorder une plus grande attention à Bruxelles »

Le 11 juillet doit également être l’occasion de dresser un état des lieux. Le mouvement flamand ferait bien d’accorder une plus grande attention à Bruxelles. La façon dont le service de garde néerlandophone est tout bonnement relégué aux oubliettes, sans que personne ne s’en inquiète, est incompréhensible. Au même titre que la manière dont les lois linguistiques sont bafouées depuis des dizaines et dizaines d’années par le personnel communal, avec l’accord tacite de l’instance de contrôle, c’est-à-dire la Région de Bruxelles-Capitale. Si une Région peut ainsi enfreindre des lois pendant des décennies, quelle valeur doit-on encore accorder à la notion de légalité dans notre pays ? Bizarrement, cela ne semble poser aucun problème aux responsables politiques, pas même aux ministres flamands qui siègent au gouvernement bruxellois.

Les francophones misent de plus en plus sur une Belgique composée de quatre entités fédérées. La façon dont la Région de Bruxelles-Capitale est gouvernée est un argument solide pour s’opposer à une telle évolution. Des tunnels à la zone piétonnière et l’aménagement en toute hâte de centres commerciaux à Bruxelles et alentour en passant par le nouveau stade national (sur le parking C du Heysel, soit en territoire flamand), le poste de garde de généralistes néerlandophones et la loi sur l’usage des langues dans les communes.

« Les politiciens francophones n’ont pas eu le courage d’introduire un examen d’entrée pour les étudiants en médecine ; à eux maintenant de régler ce problème. Il n’est pas logique de refiler l’addition à la Belgique ou à la Flandre »

En dehors de Bruxelles, il existe aussi quantité de problèmes belges sur lesquels il conviendrait d’attirer l’attention le 11 juillet. Si le gouvernement fédéral a décrété un « stop communautaire », la réalité belge menace entre-temps de remettre en cause cette décision. Le dossier des numéros INAMI pour les francophones est au point mort au sein du gouvernement, la N-VA et le CD&V faisant barrage à juste titre. Il faut intensifier les pressions sur l’Open Vld pour éviter toute concession dans ce dossier. Les politiciens francophones n’ont pas eu le courage d’introduire un examen d’entrée pour les étudiants en médecine ; à eux maintenant de régler ce problème. Il n’est pas logique de refiler l’addition à la Belgique ou à la Flandre. Et qu’en est-il au juste des accords de coopération qui doivent être conclus depuis la sixième réforme de l’État ? Le silence qui règne sur cette question est suspect. La structure belge aurait-elle là aussi compliqué les choses plus que prévu ? Et que dire du bilinguisme fonctionnel des hauts fonctionnaires ?  Bien que cette exigence soit inscrite dans l’accord de gouvernement, on n’en entend plus non plus parler. Ou que penser du « vaudeville » autour des routes aériennes depuis et vers l’aéroport de Bruxelles-National à Zaventem où – une fois de plus – la Région de Bruxelles-Capitale exige de jouer les premiers violons pour répercuter les nuisances vers la Flandre ? Au fait, qu’en est-il de l’étude sur les transferts commandée par le ministre-président flamand Geert Bourgeois ? Et comment se fait-il que la Justice continue à accumuler les faux pas ?

Le 11 juillet est l’occasion d’expliquer clairement à nos compatriotes que le statu quo ne résout absolument rien en Belgique, ni pour les Flamands ni pour les francophones, et que la Belgique est effectivement un failed state sur le plan structurel qui, par ses contradictions internes, est incapable d’assurer notre sécurité ou notre prospérité. Donc, chers amis wallons, cessez de nier la réalité et séparons-nous ; quel sens cela a-t-il de continuer à vivre ensemble dans de telles conditions ?

 

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