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01·02·19

« Pourquoi il est urgent d’enterrer l’absurde subside de 170 millions accordé aux magazines et journaux papiers »

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(cc) Pexels via Pixabay

Auteur⸱e
Traducteur⸱trice Benoit Robert

Kris Peeters, ministre de l’Économie (CD&V), ouvre le débat autour du subside annuel de 170 millions d’euros accordé à la distribution des journaux et magazines en papier. Ce généreux soutien public à bpost prête le flanc aux critiques, tant sur le plan juridique qu’économique et éthique. Parmi les reproches avancés : concurrence déloyale, philosophie contraire aux objectifs de développement durable et soutien accordé à un secteur particulièrement polluant et prompt au gaspillage.

Rappelons tout d’abord qu’avec 52 sièges à la Chambre, le gouvernement actuellement en affaires courantes est loin d’avoir la majorité. On peut donc s’étonner que Kris Peeters, Vice-Premier ministre et ministre de l’Emploi, souhaite revenir, juste avant les élections, sur le dossier du contrat controversé, comme nous l’apprend le quotidien De Tijd de ce mercredi. Le ministre serait guidé par la volonté de prévoir un délai suffisant au cas où le contrat devrait être modifié.

Il faut dire que les montants et les intérêts économiques impliqués sont conséquents. Chaque année, bpost reçoit quelque 170 millions d’euros de l’État afin d’assurer la distribution des journaux et magazines en papier. Ce contrat est entouré d’une certaine opacité : les pouvoirs publics n’en ont jamais divulgué la version initiale.

Concurrence déloyale

Tout d’abord, ce type de subside entrave la concurrence dans le secteur des médias. Les pouvoirs publics versent arbitrairement d’importantes sommes d’argent qui profitent à certains acteurs traditionnels, au détriment des nouveaux arrivants. On ne peut donc pas vraiment dire que tout le monde est traité sur un pied d’égalité, bien au contraire.

Tout un tas d’arguments – parfaitement recevables – a par ailleurs été avancé pour démontrer que le renouvellement du contrat de bpost est une mauvaise idée. Ajoutons en outre que ces avantages accordés à certains acteurs nuisent à l’esprit d’innovation de l’ensemble du secteur : ils soutiennent une ancienne branche d’activité au lieu de poser le choix radical d’investir dans le numérique ou de lui donner un coup de pouce. Ce qui est absurde, d’autant que notre secteur médiatique a besoin de tout le soutien nécessaire pour être prêt à lutter contre les nouveaux géants numériques comme Facebook et Google.

Avantageux pour les éditeurs à gros tirage

D’autant qu’on ne parle pas de petits montants : imaginez que les pouvoirs publics consacrent chaque année 170 millions d’euros pour aider le secteur des médias à basculer dans l’ère de la digitalisation. Cela donnerait un sérieux coup d’accélérateur au renforcement qualitatif du secteur et stimulerait l’émergence d’un journalisme florissant. L’actuel mécanisme de subside ne « pilote » rien du tout : les acteurs traditionnels en profitent sur la seule base de leur tirage. Les éditeurs à gros tirage, avec leurs titres populaires, en bénéficient donc davantage que des acteurs plus petits qui font paraître des publications de qualité.

Particulièrement polluant

Une troisième bonne raison de supprimer cette mesure est qu’elle ne s’inscrit pas dans une optique de durabilité. Continuer à soutenir des publications papier en injectant de telles sommes est presque révoltant en ces temps de débat sur le climat : les pouvoirs publics alimentent ainsi un gaspillage quotidien de matières premières, d’énergie et de combustible. L’impression de papier est une activité très polluante et la distribution des journaux et magazines par la route coûte très cher, y compris pour l’environnement. Tout cela pour un produit que nous jetons dans la corbeille à papier.

Puissant lobby

Pour finir, précisons que relancer à ce stade le contrat avec bpost va à l’encontre d’une logique de bonne gouvernance. En effet, ce type d’aides publiques fait actuellement l’objet d’une importante procédure judiciaire auprès de la Cour européenne de Justice à Luxembourg. L’État belge a de très grandes chances de sortir perdant de ce conflit juridique. Pourquoi le ministre de l’Économie Kris Peeters (CD&V) continuerait-il dès lors à soutenir une telle mesure, fondée sur des bases juridiques instables, au sein d’un gouvernement minoritaire en affaires courantes ? On ne peut qu’en déduire que le lobby des médias traditionnels doit être exceptionnellement puissant pour qu’un ministre démissionnaire se laisse aller à ce genre d’annonce.

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