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La N-VA est-elle devenue trop pragmatique ?
25·09·19

La N-VA est-elle devenue trop pragmatique ?

Bart Maddens est politologue à l’Université de Louvain (KU Leuven), et proche du mouvement flamand.

Temps de lecture : 3 minutes
Auteur⸱e
Fabrice Claes
Traducteur Fabrice Claes

Alors, ce confédéralisme ? Telle fut la question posée à Theo Francken (N-VA) par le journaliste Michaël Van Droogenbroeck dans l’émission De Ochtend ce 23 septembre 2019. « Malheureusement, nous ne disposons pas des bonnes pièces du puzzle, répondit Francken. Il est impossible de former une majorité des deux tiers avec le PS, et il reste les partis extrémistes qui ont grandi, mais qui ne jouent aucun rôle. C’est regrettable, mais nous devons jouer avec les cartes que nous avons a en main. »

La N-VA menée en bateau ?

C’est surtout cette dernière phrase qui provoque mon amertume. Le pragmatisme extrême est devenu le puits sans fond dans lequel la N-VA a puisé ses excuses jusqu’à l’écœurement ces cinq dernières années. Ce ne sont pas les exemples qui manquent. En replongeant un peu dans les archives de Doorbraak.be, je suis tombé par hasard sur un texte de Peter De Roover, publié le 11 août de l’année dernière (2018) : « La N-VA se fait-elle mener en bateau ? »

De Roover, dans son article, répondait aux critiques qui manifestaient leur énorme déception par rapport à la participation de la N-VA au gouvernement fédéral. N’oubliez pas, disait-il, que nous n’avons pas de majorité absolue au parlement. En politique, les résultats se mesurent toujours sur une échelle de zéro à cent. « Je n’avancerai pas de chiffre pour les gouvernements auxquels nous participons (fédéral ou flamand), mais quoi qu’il en soit, il est indéniable que nous avons poussé la barque bien loin du quai, tout comme il est indéniable que nous serons bien loin d’atteindre le cap à la fin de cette législature. »

La N-VA en général et Peter De Roover en particulier se sont illustrés comme nul autre dans l’art du pragmatisme. Le pragmatisme est un concept très pratique à évoquer quand, par exemple, il s’agit de vendre aux électeurs l’idée d’une coalition avec le PS.

Il est vrai que la N-VA n’a toujours pas de majorité absolue au parlement. Son nombre de sièges s’est même considérablement réduit. Le parti doit donc mettre de l’eau dans son vin. Telles sont les règles du jeu démocratique. Qu’on le veuille ou non, le PS est incontournable au niveau fédéral. Et ce n’est pas notre faute si une fois de plus, nous ne trouvons pas d’allié pour aboutir au confédéralisme… Il faut jouer avec les cartes qu’on a en main, vous savez.

Il n’y a pas d’alternative

Du reste, quelle est l’alternative ? Rester sur la ligne de touche et laisser le champ libre au PS de former un gouvernement arc-en-ciel sans majorité flamande ? Ou bien, la mort au cœur, former malgré tout un gouvernement avec le PS et préserver la Flandre du pire ?

En d’autres termes, il faudra s’attendre à ce que sur l’échelle de zéro à cent, l’œuvre de la N-VA se rapproche une fois de plus du zéro. L’inverse serait difficile d’ailleurs, car la N-VA a perdu les élections. Mais nous resterons clairement au-dessus de zéro car, voyez-vous, le parti aura obtenu que soit organisée une grande conférence institutionnelle qui évoquera une nouvelle réforme de l’État à l’horizon 2024. Et comme nous avons pris nos responsabilités au fédéral, nous avons obtenu… (complétez la phrase par les autres concessions que le PS fera à la N-VA).

Est-ce le discours que Peter De Roover s’exerce d’ores et déjà à prononcer ? Se prépare-t-il déjà à ce qu’il devra dire, en sa qualité de chef de groupe N-VA à la Chambre, lors du débat d’investiture d’un gouvernement bourguignon ? Je ne pense pas. Je suis certain que lui aussi, il frémit à l’idée d’un accord entre N-VA et PS sans confédéralisme. Comme la plupart des membres de la N-VA, d’ailleurs.

Recherche N-VA irresponsable

La volonté de compromis de la N-VA doit surtout s’apprécier à l’aune du jeu de perception qui se joue actuellement. Je m’explique : la formation d’un gouvernement sans majorité flamande ne sera possible que si c’est la faute d’une N-VA jugée « irresponsable ». Le scénario est le même qu’en 2011. Si la N-VA, entre autres par la voix de Theo Francken, tient à se montrer aussi raisonnable, c’est pour que les partis traditionnels éprouvent davantage de difficultés à faire porter le chapeau aux nationalistes.

Rien de grave en soi, c’est vrai. Pas de panique. Mais quand même : la courte histoire de la N-VA suit deux fils rouges, à savoir le pragmatisme et l’imprévisibilité. Le cartel avec le CD&V en 2004, le revirement de Siegfried Bracke, l’omerta communautaire stricte sous Michel Ier, jusqu’à la récente décision de faire partie de la même fraction que les anticatalans de Vox au parlement européen…

À chaque reprise, bon nombre de flamingants se disent : « Non, ce pas-là, la N-VA ne le franchira pas. » Puis, ils crient à l’imposture. Qu’en sera-t-il cette fois-ci ?

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