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Des terrasses sur des places de parking : une occasion de repenser la ville
02·06·21

Des terrasses sur des places de parking : une occasion de repenser la ville

Les nombreuses terrasses éphémères permettent une avancée dans un domaine où les politiques de mobilité des quinze dernières années avaient largement échoué : la suppression des places de parking.

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(cc) Bridgesward via Pixabay

Auteur⸱e
Guilhem Lejeune
Traducteur Guilhem Lejeune

Il se produit ces jours-ci, dans les rues de Bruxelles, un phénomène qui tient du miracle. Les nombreuses terrasses éphémères permettent une avancée dans un domaine où les politiques de mobilité des quinze dernières années avaient largement échoué : la suppression des places de parking. Un changement qui pourrait bien s’inscrire dans la durée.

Si vous avez pris un verre à l’extérieur la semaine dernière, peut-être étiez-vous installé sur l’une des centaines de terrasses implantées sur des places de stationnement en cette année particulière. Et en commandant votre deuxième bière, peut-être vous êtes-vous dit : « Tiens, c’est tout de même curieux qu’il nous ait fallu le coronavirus pour en arriver là. » En effet, une terrasse déployée sur deux places de parking permet facilement de faire le bonheur d’une douzaine de citadins — voire d’une grosse vingtaine sans les règles de distanciation sociale.

Petit miracle

Le fait que tant de terrasses aient fleuri sur des parkings peut être qualifié de petit miracle. Car si en théorie, la suppression des places de stationnement constitue l’un des principaux moyens de désengorger le trafic, sa mise en œuvre pratique n’avait que très péniblement avancé à Bruxelles ces dix dernières années. Les chiffres les plus récents le montrent bien : en vertu de l’accord de coalition du gouvernement bruxellois, pas moins de 6 000 places doivent disparaître chaque année. Or fin 2021, soit un peu plus d’un an après sa constitution, le gouvernement n’affichait que 1 200 suppressions au compteur. Les équipes précédentes n’avaient guère fait mieux.

Alors que l’aménagement de pistes cyclables « covid » avait suscité un tollé, le silence est désormais assourdissant. Même sur la page du groupe Facebook « L’automobiliste en a marre » — au sein duquel la ministre bruxelloise de la Mobilité, Elke Van den Brandt (Groen), avait été visée par des menaces de mort —, bon nombre de membres prennent maintenant la défense des terrasses, « car l’horeca a tout de même beaucoup souffert ».

Débat clivant

Une indulgence qui en dit long, car le débat sur la place de la voiture en ville se caractérise d’habitude par des prises de position tranchées et un cruel manque d’empathie. D’un côté, des citoyens plutôt jeunes et progressistes, qui aiment le vélo et ne possèdent pas de voiture, veulent renverser la table dans une ville défigurée par la voiture. De l’autre, un important groupe d’automobilistes, généralement plus âgés et conservateurs, Bruxellois et navetteurs de l’arrière-pays, freinent des quatre fers. Ces derniers ne peuvent pour la plupart même pas imaginer une vie sans voiture particulière. Quant aux commerçants de Bruxelles, ils appartiennent le plus souvent au second camp.

Or, l’installation des terrasses sur les parkings vient complètement chambouler cette ligne de fracture. Tout à coup, ce sont les entrepreneurs de la capitale eux-mêmes qui deviennent favorables à une réduction de l’espace accordé à la voiture en ville. Résultat : les automobilistes en colère se mettent à douter.

Rendre la ville plus conviviale

Une véritable aubaine : l’occasion de faire un grand pas en avant dans l’organisation de l’espace public. Car autant il est facile de descendre en flammes les projets d’un opposant sur un groupe Facebook, autant il est difficile de soutenir, lors d’un repas entre amis, que plus une seule place de parking ne doit disparaître.

Le gouvernement bruxellois et, surtout, les communes, se voient offrir sur un plateau d’argent le soutien nécessaire pour rendre la ville plus conviviale. Comment ? En commençant par pérenniser les terrasses sur les places de parking, y compris au-delà de 2022. Dans bon nombre d’endroits, leur multiplication permet de rendre la vie plus agréable. En même temps, un piège se profile : une offre excédentaire dans les quartiers centraux. Citons l’exemple du parvis de Saint-Gilles, une place publique qui se retrouve, de facto, presque entièrement privatisée. Bonne chance pour y trouver une place assise gratuite.

Pousser la réflexion plus loin

Avec le bon équilibre, les terrasses ne sont donc qu’un des moyens d’agrémenter le paysage urbain. Espérons que nos décideurs pousseront la réflexion plus loin et seront capables de considérer la situation dans son ensemble. Quoi qu’il en soit, le succès de l’implantation de l’horeca dans la rue traduit avant tout une adhésion à une remise à plat du compartimentage classique de l’espace public. Pour y parvenir, d’autres solutions existent : l’aménagement d’espaces verts dans nos villes de plus en plus chaudes, mais aussi de bancs publics et d’aires de jeux pour les enfants dans des rues piétonnisées. Au fond, les clients qui prennent du bon temps en terrasse s’en rendent bien compte.

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