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31·08·18

Communales 2018: pourquoi les Wallons sont plus raisonnables que les Flamands

L’auteur  de cette opinion, Bart Maddens, est politologue (Université de Louvain – KUL) et proche du mouvement flamand.
Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

CC0 Unsplash

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Le mandat de nos conseillers communaux touche à sa fin. Le peuple les a élus en 2012. Certains, du moins. D’autres doivent leur victoire au vote électronique. Dans la foulée des élections, il est en effet apparu qu’un problème technique avait faussé le scrutin électronique.

Si, par mégarde, vous mainteniez votre doigt trop longtemps sur le parti de votre choix, le deuxième écran reprenant la liste des candidats s’affichait immédiatement, et la personne qui avait le bonheur de se trouver derrière le logo du parti choisi obtenait ainsi automatiquement une voix de préférence. Après coup, les électeurs avaient la possibilité d’annuler ce vote non intentionnel. Mais tous ne l’ont pas fait, donnant ainsi un bonus aux heureux candidats concernés. Un avantage qui n’est pas des moindres, quand on sait à quel point un siège au sein du conseil communal peut se jouer dans un mouchoir de poche.

Face à ce problème, les autorités ont botté en touche. Le rapport officiel du « collège des experts » en a à peine fait état. Une erreur ponctuelle, voilà tout. De manière générale, le vote électronique a fonctionné sans faille.

Or deux ans plus tard, rebelote. À un degré plus grave, cette fois. Lors du dépouillement électronique des votes le soir même du scrutin, plusieurs anomalies ont fait surface à Bruxelles. Après maintes recherches, il s’est avéré que les électeurs qui avaient modifié leur vote n’avaient pas été correctement enregistrés.

Dans l’isoloir, il nous est en effet possible de réfléchir un tant soit peu, de revenir à l’écran précédent et d’introduire un autre vote si l’envie nous en prend. Rien de bien sorcier. Et pourtant : les ordinateurs se sont montrés incapables de faire marche arrière à cause d’un bug du logiciel. Le profane naïf serait alors tenté de penser que les ordinateurs de vote sont testés au préalable, au cas où, afin d’éviter de tels incidents. Il n’en est rien. Malgré l’immense impact sociétal des élections, les responsables s’y prennent manifestement comme des manches.

En 2014 également, ceux-ci avaient d’abord relativisé le problème. Le bug n’avait touché que peu de bureaux de vote, disait-on. Avant de connaître l’ampleur exacte du problème, les résultats étaient déjà rendus publics. La faute à une pression politique. Ce n’est qu’après la parution du rapport du collège des experts, un mois plus tard, que lumière a été faite. La Wallonie et la Communauté germanophone ont aussi été touchées. Au total, ce sont 2 250 suffrages exprimés dans 57 urnes qui sont passés à la trappe. Selon une simulation, de tels chiffres auraient pu avoir une influence sur la répartition des sièges au sein du parlement de la Communauté germanophone. Mais l’impact réel sur l’issue des élections n’a jamais fait l’objet d’une enquête.

Anne-Emmanuelle Bourgaux, professeur de droit public à l’ULB, a analysé l’incident en détail. Elle a dressé un constat affligeant du déroulement du processus décisionnel le soir des élections. Le problème est que les instances responsables ne savent pas exactement comment le système fonctionne. Elles doivent donc s’en remettre aveuglément aux informations parfois contradictoires fournies par une firme privée, déléguant ainsi le contrôle des opérations électorales à des tiers.

Au sein d’une démocratie, cette méthode est tout simplement inadmissible. Aujourd’hui plus encore qu’en 2014. Nous savons maintenant que la manipulation des élections depuis l’étranger constitue une menace réelle. État défaillant notoire, la Belgique fait office de cible toute désignée. Des experts en tous genres nous martèleront encore que rien ne peut aller de travers avec le vote électronique. Mais qui les croira encore ?

Pour le parlement wallon, le vaudeville de 2014 était la goutte de trop. De fait, toutes les communes ont décidé de revenir au bulletin de vote en papier et au crayon en 2015. De son côté, la Flandre s’accroche coûte que coûte au vote électronique. Preuve ultime que les Wallons sont plus raisonnables que les Flamands. Bien que des exceptions existent, comme Hendrik Bogaert, du CD&V. En sa qualité de secrétaire d’État fédéral au cours de la précédente législature, il s’est farouchement opposé au vote électronique. « Dans une démocratie, les élections sont bien trop importantes que pour être confiées à des ordinateurs », estimait-il. Bogaert qui, soit dit en passant, était alors en charge de la modernisation et de la digitalisation de l’État. Dès lors, si même cet homme-là souhaite se débarrasser des ordinateurs de vote, qui sommes-nous pour le contredire ?

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