Des élus désorientés face au message des manifestants pour le climat, ce n’est pas ça qui manque. Dans le monde politique, les réactions fusent en tous sens. Mais aucun parti n’a osé aller aussi loin que le CD&V et sa ministre régionale de l’Environnement et de l’Agriculture, Joke Schauvliege. Devant un parterre d’agriculteurs, ce week-end, elle n’a pas hésité à qualifier les récentes manifestations d’étudiants contre le réchauffement climatique de complot contre sa personne et contre sa politique agricole, complot fomenté par les associations de protection de la nature. La Sûreté de l’État connaîtrait d’ailleurs le fin mot des machinations orchestrées derrière ces protestations prétendument innocentes. Toujours selon Mme Schauvliege, il faut absolument que les adhérents du syndicat agricole flamand Algemeen Boerensyndicaat prennent conscience de ce qui se trame, et de la position délicate dans laquelle elle se trouve, elle qui a toujours tant aimé collaborer avec le monde agricole.
Ces insinuations contredisent de manière flagrante les propos qu’elle tenait la semaine dernière au sujet de ces mêmes manifestations. Elle se disait alors ravie de voir les étudiants l’aider à faire passer certaines mesures bloquées par une trop forte résistance. Il semble bien que la ministre tienne un discours différent selon les secteurs qui relèvent de sa compétence. Lorsqu’elle s’adresse aux agriculteurs, elle traite les groupements de défense de l’environnement de comploteurs. Lorsqu’elle s’adresse aux marcheurs pour le climat, elle les qualifie d’alliés. Une seule conclusion s’impose : la ministre n’est plus apte à exercer sa fonction.
À supposer, bien sûr, qu’elle l’ait été un jour. Jamais, en effet, Mme Schauvliege n’a osé, ou voulu, durcir le ton face à l’agro-industrie. Sa « carte forestière » est un échec retentissant. Quant à son programme « stop au béton », il manque totalement d’ambition. Et quand, par extraordinaire, elle lance une idée progressiste, comme la consigne sur les cannettes, la N-VA fait en sorte que l’idée reste lettre morte.
Et pourtant, c’est avec cette ministre-ci, et avec la politique qu’elle mène, que le CD&V entend répondre aux manifestants pour le climat. Mine de rien, le parti a adressé à toutes les écoles catholiques flamandes un courrier leur proposant de venir y dispenser un cours sur les questions climatiques. Aux termes de cette lettre, les mandataires du CD&V viendraient personnellement commenter la politique de la ministre. Les élèves pourraient ainsi cesser de faire l’école buissonnière.
L’idée est totalement aberrante. Tout d’abord, parce que mener en classe une action de propagande politique au profit d’un seul parti est tout simplement illégal. Ensuite, parce que la politique de Madame Schauvliege ne fait vraiment pas le poids, s’agissant de garder les candidats à l’école buissonnière en classe – surtout après la diffusion de son discours à l’Algemeen Boerensyndicaat. Si la plupart des partis politiques n’ont encore proposé aucun projet digne de ce nom en réponse aux manifestations pour le climat, une chose est sûre : le CD&V a complètement perdu le nord.