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27·11·17

La carte blanche qui a fait pleurer Bart De Wever

La semaine dernière, le président du SP.A anversois, et candidat socialiste aux élections communales, Tom Meeuws a rédigé une carte blanche publiée par le quotidien De Morgen. Il y dénonce l’ « immocratie » qui règne actuellement dans la métropole. DaarDaar vous propose ci-dessous la traduction de cette tribune, à laquelle le bourgmestre Bart De Wever (N-VA) a réagi face caméra, exprimant sa tristesse et sa colère face à des insinuations qui ne sont, selon lui, pas correctes. Une réaction qui fait également suite aux révélations du site d’investigation Apache.

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(c) capture d’écran VRT NWS

Auteur⸱e
Maxime Kinique
Traducteur Maxime Kinique

Vous voulez bâtir haut et grand, mais les prescriptions urbanistiques vous en empêchent ? Mettez-vous donc à table avec l’échevin compétent ! Si vous avez les moyens de vous acquitter d’une « paaitaks » (contribution matérielle à l’aménagement et l’entretien du domaine urbain public en vue d’obtenir des permis de bâtir ou de ne pas être soumis au champ d’application de certains décrets, ndlr), vous n’aurez plus à vous embarrasser des règles qui contrecarrent vos projets.  

Les promoteurs qui, à Anvers, veulent s’essuyer les pieds sur les prescriptions urbanistiques ont tout intérêt à aller frapper à la porte de l’administration communale. Des hauteurs de construction ou des volumes de construction voluptueux en flagrante contradiction avec les règles de bon aménagement du territoire ? C’est un problème qui peut se régler dans le cadre d’une négociation en tête à tête avec l’échevin.

Cela fait quelques années déjà que des arrangements en tout genre peuvent être conclus à Anvers dans le dos des fonctionnaires urbanistes et du directeur de l’urbanisme – un homme dont le silence est assourdissant -, et ce au grand mécontentement des promoteurs et des architectes bien intentionnés, qui se plaignent régulièrement de cette situation dans les couloirs de l’administration communale anversoise. « Faudra-t-il vraiment que nous forcions la porte de l’échevin ? Pourquoi certains collègues ont-ils des droits que nous n’avons pas ? En bref, à Anvers, même les promoteurs immobiliers ne sont plus soumis à un traitement équitable. »  

La raison à cela réside dans la manière dont le collège anversois appréhende les « charges urbanistiques », une notion inscrite dans un règlement flamand qui s’applique à toutes les administrations communales. Une commune peut demander à un promoteur de contribuer à l’aménagement et à l’entretien du domaine public. En soi, c’est une bonne chose dans la mesure où les bénéfices réalisés sont partagés avec la communauté. Hélas, à Anvers, cette règle a été transformée en un instrument permettant d’attribuer des permis qui ne respectent pas les règles et ont fait l’objet d’un avis négatif.   

En 2016, le collège a officialisé ce système perfide. Les promoteurs qui veulent construire à Anvers plus haut ou plus grand que ce que les règles autorisent se mettent à table avec l’échevin compétent. Les promoteurs qui jouent le jeu ont plus de droits que les autres. Ces promoteurs-là ne sont plus soumis aux règles ou aux avis urbanistiques. À Anvers, l’« immocratie » s’est installée.

Terrain de jeu équitable 

Deux dossiers récents illustrent ce phénomène. À Hoboken, un promoteur immobilier a l’objectif de construire une tour de logements à un carrefour très fréquenté, à l’arrière d’un quartier populaire et à proximité immédiate d’une école. La hauteur de construction a été fixée là-bas à six étages. Le promoteur entend toutefois construire un immeuble de seize étages et reçoit un avis négatif de l’administration. Mais la menace des ombres portées, de la congestion du trafic ou des avis urbanistiques négatifs n’impressionnent guère le collège échevinal, que le promoteur attendrit en promettant de s’occuper du gros œuvre d’une salle de gymnastique et en donnant un peu d’argent pour aménager un parc dans une rue voisine. Les riverains n’ont pas d’autre option que d’introduire un recours auprès de la maison de la province. 

Même histoire dans les environs du centre musical Trix à Borgerhout. Là-bas, un promoteur veut construire 122 appartements au-dessus d’un supermarché. Un projet de construction qui s’étend sur neuf étages. Sans concertation, un plan est déposé sur la table, qui ne prévoit ni isolation acoustique pour les appartements, ni nouvelle zone de chargement et déchargement pour le supermarché. Le fonctionnaire urbaniste émet un avis négatif. 

Trois ans plus tard, le promoteur revient à la charge. Cette fois, le collège lui octroie un permis, à condition de réaliser des investissements acoustiques et de s’acquitter d’un dédit d’1,5 million d’euros, dont 500 000 euros pour la rénovation de la salle de concert afin d’amadouer Trix. L’organisateur de concerts n’entend toutefois pas participer à ce petit jeu et demande de recommencer le projet de construction, dans le respect cette fois de relations de bon voisinage. En résultent des menaces de la part du promoteur. L’organisateur de concerts se tourne alors en dernier recours vers la province, où le fonctionnaire urbaniste rejette le permis octroyé par le collège. 

Ce sont là quelques exemples de dossiers où le collège anversois outrepasse arbitrairement toutes les règles de bon aménagement du territoire. Les promoteurs qui ont de l’argent – y compris pour payer des avocats onéreux et des procédures interminables – sont servis. L’aménagement du territoire a fait place à des promoteurs immobiliers qui jouent à Minecraft avec le domaine public.

Dans une démocratie, les politiciens garantissent à tout un chacun un terrain de jeu équitable sur fond de sécurité et d’égalité juridiques. Un tel système ne peut fonctionner qu’avec des fonctionnaires compétents et qui peuvent donner des avis en toute indépendance sur les conditions pour pouvoir octroyer un permis, charges urbanistiques comprises. Les échevins et leurs collaborateurs de cabinet peuvent se mettre à table. Cela rejaillira positivement sur les rapports entre fonctionnaires et politiciens. Et contribuera à restaurer la foi du monde de l’immobilier et de l’entrepreneur lambda dans la démocratie. Mais pour cela, il faut vite mettre fin à ce régime d’« immocratie » que l’on connaît actuellement à Anvers. 

Visionnez ici la réaction du bourgmestre anversois Bart De Wever

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