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Activités extrascolaires des enfants, la dernière (mauvaise) blague belge
01·02·21

Activités extrascolaires des enfants, la dernière (mauvaise) blague belge

Temps de lecture : 5 minutes Crédit photo :

(cc) Bottomlayercz0 via Pixabay

Pieter Bauwens
Auteur⸱e
Maxime Kinique
Traducteur Maxime Kinique

Bienvenue en Absurdie !

On observe une forte augmentation des contaminations par le coronavirus chez nos enfants. Mais qu’est-ce qu’une augmentation, et à partir de quand peut-on dire qu’elle est forte ? S’il n’y avait jusqu’ici que peu de cas de coronavirus chez les enfants, c’est tout bonnement parce que moins de tests étaient pratiqués chez ces derniers. Désormais, on teste des écoles entières, alors le nombre de contaminations connues augmente. Forcément. Peut-on cependant en conclure que les cas sont aujourd’hui plus nombreux ? En chiffres absolus, le nombre de contaminations chez les enfants reste faible comparé au nombre total de cas de Covid 19.

Une hausse de 128 %, mais..

« Le virologue Steven Van Gucht a annoncé cet après-midi lors de la conférence de presse de Sciensano que c’est surtout chez les moins de 10 ans que le nombre de contaminations augmente fortement, avec une hausse qui atteint aujourd’hui pas moins de 128 %. Dans cette tranche d’âge, on recense aujourd’hui une moyenne de 171 nouvelles contaminations quotidiennes, contre 74 il y a une semaine », peut-on lire dans HLN du 29 janvier 2021.

La moyenne hebdomadaire s’établit à présent à 2.210 contaminations quotidiennes. Vu cette évolution, la part de cette tranche d’âge dans les chiffres totaux reste limitée. Van Gucht aurait donc tout aussi bien pu dire que les 0-19 ans ne représentent que 0,8 % des hospitalisations !

Panique à bord !

Pourtant, ce sont toujours les discours alarmistes qui prédominent, à l’image de ce qu’a écrit De Tijd dans son édition du 27 janvier. Van Gucht y déclare que « l’augmentation de la contagiosité du virus amplifie la crainte que la pandémie joue au yoyo entre les générations. Le virus commence à circuler abondamment parmi les jeunes, qui le transmettent ensuite dans leur famille, avant qu’il vienne contaminer les personnes les plus âgées et vulnérables. C’est un scénario que nous devons éviter coûte que coûte car si la communauté scientifique s’accorde toujours à dire que les enfants propagent moins le virus que les adultes, il n’en reste pas moins qu’ils peuvent déclencher la chaîne d’infections. »

Ils transmettent pourtant moins..

Ils peuvent déclencher la chaîne d’infections ? Comme tout le monde, en fait. Et qu’est-ce qui dit qu’ils transmettront le virus à leurs parents, alors que nous savons bien que les enfants sont de moindres agents transmetteurs que les adultes. Rien ne dit, non plus, qu’on enregistre aujourd’hui davantage de cas dans les écoles qu’hier. Des flambées de contaminations et des cas atypiques, on en connaît depuis le début de l’épidémie, mais ils n’étaient pas médiatisés comme aujourd’hui. C’est comme cela que fonctionnent les médias : s’il n’y a qu’un seul accident, ça ne les intéresse pas, mais si l’on en enregistre trois coup sur coup, il ne fait aucun doute qu’ils s’empareront de l’affaire et ne la lâcheront plus, et qu’ils n’hésiteront pas à parler de vague, même si le nombre d’accidents n’a pas augmenté dans des proportions significatives.

En attendant, les mesures en vigueur dans les écoles, primaires y compris, ont été renforcées. Les écoles imposent le port du masque ou les communes le rendent obligatoire dès la cinquième ou sixième année du fondamental, même si l’on peut se réjouir que Van Gucht ait dit ouvertement qu’on ne pouvait pas parler de troisième vague. Un net durcissement des mesures actuelles de restrictions ne semble dès lors pas à l’ordre du jour.

« Les scientifiques qui ont un avis différent ne l’exposent pas sur la place publique »

Les médias ne relaient qu’un seul son de cloche, ce qui laisse accroire qu’il y a unanimité chez les virologues et autres spécialistes. Rien n’est moins vrai, mais les scientifiques qui ont un autre avis se gardent bien de l’exposer sur la place publique. Ils ont souvent beaucoup de choses à dire et développent leur point de vue et leurs arguments de manière approfondie, mais ils font cela « off the record ». Ils ne souhaitent pas réagir en leur nom propre, de sorte qu’il ne reste guère que Georges-Louis Bouchez – un comble ! – pour occuper l’espace face aux spécialistes des médias.

Si les virologues le disent…

Les médias font preuve d’esprit critique lorsqu’ils interviewent nos politiciens, mais les experts ont eux carte blanche. Ce sont eux qui dictent le ton. Le citoyen n’a droit qu’à un seul son de cloche, on ne lui présente pas la problématique dans toutes ses composantes. Les virologues ne se soucient que du virus alors que les politiciens doivent tenir compte des différents intérêts de la société et trouver un équilibre entre économie, bien-être, bonheur, solidarité entre les générations, et jusqu’à quel point celle-ci doit être poussée.

Mais on constate également que les politiciens ont tendance à se réfugier derrière les virologues. Lorsqu’ils annoncent dans les médias une énième restriction de telle ou telle liberté, ils s’empressent d’ajouter que cette décision a été prise sur les recommandations des virologues. Nos ministres devraient venir défendre leurs décisions au Parlement, en présentant les arguments des virologues et les compromis qui ont été décidés entre les différents intérêts de la société. Si les mesures faisaient l’objet d’un vrai débat démocratique, le citoyen pourrait prendre connaissance des arguments des uns et des autres et se forger sa propre opinion.

Activités extrascolaires des enfants

Intéressons-nous à présent à la dernière mesure en date, qui change la donne en ce qui concerne les loisirs des enfants et des adolescents. Un quotidien évoque un jugement de Salomon, mais je parlerais quant à moi plutôt d’un compromis à la belge : on prend aux uns pour donner aux autres. Soit il y a un gros problème avec le virus chez les jeunes et il est incompréhensible d’offrir davantage d’opportunités d’activités à nos adolescents, soit il n’y a pas de problème et il convient alors de se demander pourquoi les moins de 12 ans devraient effectuer un choix entre leurs hobbies et porter un masque en classe.

Cette dernière mesure est un compromis et comme tous les compromis à la belge, il n’est logique qu’aux yeux de celles et ceux qui étaient présents à la table de réunion et ont participé à l’ensemble des discussions. Une fois que ces participants ont quitté la salle de réunion et doivent défendre le compromis qui a été conclu, ils se rendent bien compte de son caractère absurde. Mais il n’y a pas moyen de faire marche arrière. Une fois que vous mettez le pied dans l’engrenage du compromis à la belge, il n’est plus possible d’en sortir.

Travail législatif bâclé

L’étape suivante consiste à transposer les mesures qui ont été décidées dans une loi. Ou plutôt dans un arrêté ministériel rédigé à la va-vite, et tant pis si certaines dispositions sont sujettes à différentes interprétations.  La ministre a beau parler de « foutaises juridiques », elle doit faire en sorte que ses arrêtés non débattus au Parlement n’alimentent pas ensuite des discussions interminables.

Dans le cas qui nous occupe, il apparaît que le compromis est difficile à transposer dans une législation juridiquement étanche. Il s’agit d’une simple « recommandation ». Même s’il est probable que le Conseil d’État ferme les yeux face à un législateur qui aurait bâclé son travail, on est en droit de se demander s’il y a encore quelqu’un, à Bruxelles, pour se demander si tout cela a encore un sens…

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