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21·02·17

Loi Francken sur les étrangers: «nous» et puis «les autres»

Temps de lecture : 2 minutes Crédit photo :

(c) Pixabay

Un détail nous a échappé. Tous ceux qui ont des origines étrangères, ou qui ont des amis qui en ont, que ces origines soient lointaines ou bien réelles, nous le diront: la nouvelle loi sur l’expulsion des étrangers, dont le projet a été approuvé la semaine dernière à la Chambre, porte violemment atteinte aux membres de ce groupe de concitoyens. Cette loi permet notamment que des étrangers nés et élevés ici se fassent expulser de notre pays, sur la base d’une «présomption» de menace «grave» à l’ordre public ou à la sécurité nationale.

Les risques des dispositions de cette loi ont entraîné, il est vrai, un débat virulent au Parlement et au sein de l’opinion publique. Mais l’honnêteté nous oblige à ajouter que ce débat a mis énormément de temps à se dessiner, et même qu’il n’a vraiment démarré qu’à la suite d’un billet d’opinion de Mathias Somers publié dans ce journal. Beaucoup trop tard, en tout cas, pour influencer le vote à la Chambre de façon utile.

Ce qui est en revanche passé totalement inaperçu, c’est la très grande importance symbolique qui a été attachée à la chose par les citoyens issus du groupe cible concerné. Ils se sentent visés, discriminés. Ils ne sentent plus les bienvenus, au sens presque littéral du terme. Ils se sentent aussi blessés par les réactions timides et tardives de l’opinion publique, y compris des milieux qui se veulent progressistes.

Et ils ont raison, ces citoyens.

Car même si Theo Francken (N-VA), le secrétaire d’Etat à l’Asile et la Migration, soutient dur comme fer que la loi ne se destine qu’aux auteurs présumés d’actes terroristes et aux grands criminels, on ne peut nier que le texte de loi couvre un domaine bien plus large. Il ouvre une brèche, en permettant à notre pays d’exclure des citoyens qui y sont nés, après une procédure administrative accélérée et sans procès. On pourrait parler de fait «historique», un peu comme la loi qui avait accordé, il y a 13 ans, le droit de vote aux étrangers lors des élections communales. Remarquez au passage l’écart entre les deux, en un laps de temps aussi court.

Pourquoi l’opinion publique est-elle restée aussi soumise? Pourquoi Groen et le sp.a se sont-ils opposés au projet aussi tard? Pourquoi les membres progressistes du CD&V sont-ils restés à ce point muets? Pourquoi tous ces libéraux, grands amoureux des libertés, se sont-ils tu? Une partie de la réponse réside à l’évidence dans la composition des centres de décision, des rédactions et des espaces d’opinion, qui sont encore si blancs, si monochromes, si incolores.

Nous n’oserons pas nous prononcer sur le potentiel d’efficacité de la nouvelle loi, car nous ne savons pas si elle permettra réellement de détourner de notre pays ceux qui lui veulent du mal. Mais en tout état de cause, cette loi scelle la distinction entre «nous» et «eux», entre les citoyens «A» et les citoyens «B».

Existe-t-il vraiment dans ce pays une majorité qui voit dans cette distinction un terreau propice à l’évolution de notre société? Nous avons l’obligation, vis-à-vis de nous-mêmes et de tous nos concitoyens, indépendamment de nos goûts et de nos couleurs, de répondre à cette question. Il est certes trop tard, mais mieux vaut tard que jamais.

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