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Émissions d’azote: un décret met en péril la ferme de l’abbaye d’Averbode
26·04·22

Émissions d’azote: un décret met en péril la ferme de l’abbaye d’Averbode

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

Photo by Austin Santaniello on Unsplash

Auteure
Fabrice Claes
Traducteur Fabrice Claes

« Devoir entendre qu’il faut fermer notre élevage laitier, c’est presque choquant pour nous », témoigne Marc Fierens, l’abbé de l’abbaye d’Averbode. En 2015, l’abbaye avait investi dans des technologies de pointe pour lutter contre les émissions d’azote.

« Nous nous soucions à cent pour cent de la nature et de sa préservation, assure Marc Fierens, l’abbé d’Averbode. Il y a quinze ans, avec la Vlaamse Landmaatschappij (VLM), l’agence flamande en charge de l’aménagement des zones rurales, nous avons investi dans le parc naturel qui entoure l’abbaye, afin de le protéger et d’y assurer un accès de qualité, mais aussi de diminuer l’érosion des sols et d’améliorer la qualité des eaux. »

Pourtant, il y a deux semaines, il a reçu un courrier, puis un appel téléphonique de Bruxelles, de la part de cette même VLM, pour lui signifier que l’abbaye doit cesser d’exploiter sa ferme d’ici 2025. Ou, plus précisément, que l’élevage de bétail doit cesser, parce que les émissions produites nuiraient à l’habitat environnant. Les champs, eux, peuvent rester. Le problème, c’est que les 60 hectares d’herbe et de trèfles, les 40 hectares de maïs et les 20 hectares d’orge d’hiver n’ont aucun sens sans les bœufs, dans la mesure où ces récoltes servent de fourrage pour les bêtes de l’abbaye.

Une abbaye fondée il y a 900 ans

Le dimanche, par beau temps, les visiteurs affluent à l’abbaye. Devant l’entrée, les glaces se vendent comme des petits pains et les promeneurs sont nombreux à admirer l’étang qui reflète les façades de l’abbaye et de l’église baroque rénovée il y a deux ans. Si l’église date du XVIe siècle, l’abbaye, elle, fut fondée il y a 900 ans. Fierens ne peut imaginer, après tous ces siècles, son abbaye sans la ferme. « Une ferme a toute sa place dans une abbaye. Ce n’est pas qu’une question de politique agricole ou économique. Il s’agit du lien que nous entretenons avec la terre et avec les animaux. Sans la ferme, ce lieu va mourir. »

Le gouvernement flamand s’est mis d’accord sur le décret qui vise à réguler les émissions d’azote, mais celui-ci doit encore être approuvé. Cette décision a du mal à passer à Averbode, qui avait reçu en 2015 un permis d’environnement de classe 1 pour investir dans une plus grande étable à vaches laitières, moyennant l’application de techniques de pointe pour limiter les émissions d’azote. Ce permis a été délivré après la délibération sérieuse de toutes les instances compétentes – en charge de la nature et des zones forestières, de l’agriculture et de la pêche, et du patrimoine – qui ont toutes marqué leur accord.

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Par précaution, l’abbaye avait même appliqué des règles qui n’étaient pas encore en vigueur pour le permis d’environnement, comme les dalles à faible émission sur lesquelles les vaches se tiennent. Ces dalles, en grande partie composées de caoutchouc, sont meilleures pour les pattes des animaux. Aussi, les ouvertures par lesquelles l’urine et les excréments s’échappent, ont été équipées de battants qui se ferment afin que l’ammoniac (un dérivé de l’azote) ne s’échappe pas dans l’atmosphère. De plus, les vaches peuvent se rendre d’elles-mêmes à l’extérieur pour paître, ce qui réduit également les émissions d’azote. Ces mesures ont contribué, en définitive, à la diminution des mauvaises odeurs dans l’étable.

Certes, le nombre de bœufs a doublé depuis les investissements, et le nombre de vaches laitières a plus que quadruplé, en passant de 30 à 130. C’était nécessaire, nous assure Fierens, car l’entreprise de transformation laitière ne voulait plus passer pour « seulement » 30 bêtes. « Nous avions l’autorisation d’agrandir la ferme, souligne l’abbé. Ce n’était pas le nombre de bœufs qui ne pouvait pas augmenter, mais les émissions d’azote. »

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Les pères d’Averbode ne sont pas les seuls à avoir reçu le funeste courrier. L’abbaye a invité, ce dimanche, des agriculteurs des environs qui partagent le même destin. Bart Baeyens élève des volailles à Oud-Turnhout, comme trois générations avant lui. « Il y a un an et demi, nous avons construit des bâtiments à faible émission. Le gouvernement nous a octroyé des subventions à cet effet, mais nous les attendons encore. Aujourd’hui, nous apprenons qu’il va falloir fermer et que nous serons compensés. C’est incompréhensible. »

« Ils veulent se débarrasser des fermiers »

Mattieu Alaerts exploite un élevage de vaches laitières à Tessenderlo. « Si nous avions habité un kilomètre plus près du centre de la commune, nous aurions pu poursuivre nos activités. Ils veulent se débarrasser des fermiers. Comment encore motiver les jeunes à pratiquer l’agriculture ? Comment encore assurer la sécurité alimentaire, dès lors que de nombreuses exploitations devront fermer leurs portes parce qu’elles ne trouvent pas de repreneurs ? »

Pour Niels Froyen et Nathalie Buntinx aussi, deux jeunes Limbourgeois qui exploitent depuis 2014 la ferme d’Averbode, c’est le rêve d’une vie qui part en fumée.

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