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11·04·19

« Un cadre légal pour sanctionner l’intimidation des journalistes »

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(cc) Commons Wikimedia

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Le fonds de pension liégeois Ogeo Fund réclame un demi-million d’euros pour « calomnie et diffamation » pour les articles du dossier Land Invest Gate. Pol Deltour, de l’Association flamande des journalistes, considère cette énième affaire comme une « intimidation manifeste ». À l’instar du journaliste Rik Van Cauwelaert et du spécialiste du droit des médias Dirk Voorhoof, il estime qu’il est fondamental de mettre sur pied une initiative législative sanctionnant ce type de menaces, à l’image de ce qui se fait aux États-Unis.

À la suite des révélations publiées par Apache et Le Vif dans le dossier Land Invest Gate, politiquement sensible, Ogeo Fund réclame 500 000 euros aux journalistes Tom Cochez et David Leloup, au rédacteur en chef du Vif, Thierry Fiorilli, ainsi qu’à l’éditeur du magazine, Roularta. Jusqu’à l’année dernière, Ogeo Fund était l’actionnaire et le financier du promoteur immobilier anversois Land Invest, objet de vives controverses.

« C’est un coup de massue pour tenter de réduire les journalistes critiques au silence », dénonce Pol Deltour de l’Association flamande des journalistes

Les révélations d’Apache et du Vif ne mettent pas seulement Erik Van der Paal — le promoteur favori de Bart De Wever — et son comparse néerlandais Marc Schaling dans l’embarras : la direction d’Ogeo Fund est, elle aussi, explicitement visée.

Éminence grise du journalisme flamand, Rik Van Cauwelaert considère ce nouveau procès comme une « pure intimidation ». Pol Deltour, secrétaire national de la VVJ (Association flamande des journalistes) y voit également un cas manifeste d’intimidation : « C’est un coup de massue pour tenter de réduire les journalistes critiques au silence. »

Rik Van Cauwelaert rappelle qu’Ogeo Fund, le fonds de pension de l’intercommunale Enodia (anciennement Publifin), et sa filiale Nethys, se sont montrés tout sauf sympathiques envers les médias au cours des derniers mois. « Ils ont aussi cherché à atteindre des journalistes au sein de L’Avenir. »

En effet, au mois de mars, Nethys a fait licencier trois journalistes de la rédaction de L’Avenir qui critiquaient son rôle dans l’affaire Publifin.

D’après M. Van Cauwelaert, les liens politiques sont à nouveau indéniables dans ce nouveau procès.

Anti-SLAPP

Selon Dirk Voorhoof, expert en droit des médias, la succession d’« actions vexatoires » confirme qu’il y a « urgence à se doter d’une législation ou d’une jurisprudence anti-SLAPP condamnant lourdement les demandeurs qui abusent de la procédure. »

« Actuellement, il est très facile, notamment pour les entreprises, d’engager une procédure en espérant faire taire les journalistes », souligne Rik Van Cauwelaert.

Le terme SLAPP, originaire des États-Unis, désigne un procès intenté dans le but d’intimider et de museler la partie adverse. Mais outre-Atlantique, des mesures ont également été prises pour punir ces affaires.

Pol Deltour souligne lui aussi la nécessité de mettre en place des mesures anti-SLAPP structurelles. « Le défendeur a déjà la possibilité de réclamer des dommages pour une action téméraire et vexatoire, mais les sanctions restent symboliques. Alourdir les indemnisations permettrait déjà d’améliorer la situation. »

« Pour éviter ce genre de procès, il nous faut un cadre légal », juge Rik Van Cauwelaert. « Actuellement, il est très facile, notamment pour les entreprises, d’engager une procédure en espérant faire taire les journalistes. »

Le 21 janvier 2019, le Conseil de l’Europe a déjà émis un avertissement dans lequel il estime que dans ce dossier, l’intimidation ciblée met en péril la liberté d’expression dans notre pays.

En matière d’intimidation des journalistes, Rik Van Cauwelaert dénonce une évolution fâcheuse en Europe. « Au Royaume-Uni, on a constaté par le passé que les juges étaient très indulgents envers les demandeurs. En France, on assiste à une multiplication des procès de ce type, et l’Italie aussi a quelques antécédents. Le fait qu’en Europe, l’issue de ces procès soit de plus en plus souvent défavorable aux médias et aux journalistes est une source d’inquiétude. »

Dans les affaires sur la couverture du dossier Land Invest, le tribunal a toujours donné raison à Apache. La rédaction a donc toute confiance en une issue positive.

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