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Les établissements scientifiques belges, entre dépannage temporaire et mégalomanie
20·10·20

Les établissements scientifiques belges, entre dépannage temporaire et mégalomanie

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

Photo by Thomas Somme on Unsplash

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Six des dix établissements scientifiques fédéraux ont à leur tête un directeur par intérim. Le « dépannage temporaire » le plus long dure depuis neuf ans. Le nouveau secrétaire d’État sait donc par où commencer.

Heureusement que Thomas Dermine (PS) est devenu secrétaire d’État à la Relance : il pourra en profiter pour assurer celle des établissements scientifiques fédéraux, des institutions telles que le musée d’Art et d’Histoire, la Bibliothèque royale, les Archives de l’État et l’Institut royal météorologique (IRM), dont il est le ministre de tutelle.

Ces établissements sont pour ainsi dire les joyaux de la couronne de la société scientifique. À l’exception des Archives de l’État, tous portent le label « royal » dans leur nom. Ils devraient être en plein essor, mais voilà un moment qu’ils s’étiolent. Et s’ils restent alimentés régulièrement, c’est parfois sous perfusion.

Alors, certes, les infrastructures sont entretenues. Au parc du Cinquantenaire, qui abrite le musée d’Art et d’Histoire, le musée de l’Armée et Autoworld, d’importants travaux de toiture sont en cours. Il n’empêche que ces dernières dizaines d’années, les établissements scientifiques fédéraux (ESF) n’ont été que très peu gâtés. Ils ont dû subir des restrictions budgétaires et se soumettre à la rigidité des règles administratives, souvent placés sous la tutelle de secrétaires d’État n’ayant qu’un poids limité au sein du gouvernement fédéral, mais des attributions étendues : la politique scientifique n’était pas la première priorité.

Un peu comme un gouvernement en affaires courantes

L’organigramme des dix ESF reflète bien le désintérêt dont ils font l’objet, puisque sur les dix établissements, six ont à leur tête un directeur par intérim. Et il ne s’agit pas seulement d’un dépannage provisoire dans l’attente d’une nomination : Martine de Mazière (Institut d’aéronomie spatiale) et Daniel Gellens (IRM) sont en place depuis 2011. C’est au service d’appui BELSPO qu’il appartient de rédiger les offres d’emploi. Mais devinez quoi : le président qui en a la charge, Pierre Bruyere, est aussi un intérimaire. Le malaise est donc complet : difficile de vanter la bonne gouvernance de l’État…

« Quand on commence comme intérimaire, on ne fait pas de grands changements, on n’a pas de projets à long terme », résume Martine de Mazière. « C’est un peu comme un gouvernement en affaires courantes. Au bout d’un certain temps, j’ai tout de même commencé à prendre des décisions stratégiques. Le problème, c’est qu’on ne connaît pas ses perspectives d’avenir. Faut-il réduire la voilure sur le plan des activités scientifiques ? C’est risqué. Du coup, on travaille deux fois plus. Mes collègues me demandent parfois si je suis folle. » Alors, l’est-elle ? « Je fais ça pour l’établissement. »

Hilde De Clercq est directrice par intérim de l’Institut royal du patrimoine artistique depuis 2017. « Les établissements ont le droit d’être gérés le mieux possible. Mais en tant qu’intérimaire, on est censé faire tourner la boutique, pas définir une politique. Il en résulte un manque de stabilité. À mes yeux, il est nécessaire de tracer une voie durable même lorsque la direction est en flottement. Nous avons des employés motivés et talentueux qui méritent mieux que de faire du sur place. »

Et ce n’est pas que rien n’est fait. Différents secrétaires d’État ont tenté de réorganiser les dix ESF au cours des dernières législatures — plusieurs fois au travers de projets mégalomanes. « On organise les choses tantôt par clusters, tantôt par pôles », explique Sara Lammens, directrice par intérim de la Bibliothèque royale depuis 2017. On a envisagé des collaborations, des fusions, mais les projets ont échoué à chaque fois. Il faudrait examiner en détail toutes les options qui s’offrent à chaque établissement selon son mode de fonctionnement. Nous, par exemple, nous ne sommes pas seulement un centre de documentation ou une bibliothèque : nous faisons aussi de la recherche, nous publions, nous organisons des conférences, des concerts et des expositions. »

Un accord de gouvernement qui donne de l’espoir

Mais cette fois, il y a de l’espoir. Jamais l’accord de gouvernement ne s’était autant intéressé aux ESF. « On parle par exemple d’une étude qui devrait permettre de cerner les besoins clairement », se réjouit Hilde De Clercq. « Qui fait quoi ? Quelles sont les synergies possibles ? Le fonctionnement de chacun serait ainsi mieux pris en compte. Je ne suis pas favorable à la clusterisation des établissements. Il n’y a pas de solution unique pour nous. On cherche aussi à savoir s’il est possible de travailler de manière plus indépendante, par exemple en utilisant nos propres ressources. Et à appliquer des règles de recrutement plus souples, car avec le Selor, les procédures durent parfois des années. »

L’Institut d’aéronomie spatiale aimerait également jouir d’une plus grande flexibilité. Il assure notamment des études pour l’Agence spatiale européenne et participe à des appels d’offres de la Commission européenne. « Ce n’est pas simple pour nous », se lamente la directrice. « On évolue dans un environnement concurrentiel, mais on nous impose le carcan administratif des règles de l’État. »

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