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08·01·18

Boef : La liberté d’expression n’est pas une liberté d’insulter

Le rappeur néerlandais Boef a suscité une vague d’indignation en Flandre et aux Pays-Bas après avoir insulté des femmes sur les réseaux sociaux la semaine dernière. Durant la nuit du Nouvel An, le chanteur a été ramené en voiture par trois femmes qu’il n’a pas hésité à qualifier de prostituées car elles se baladaient de bon matin en jupe et sous l’emprise de l’alcool. Ses propos ont fait coulé beaucoup d’encre, aussi bien sur le Net que dans les médias néerlandophones. 

Temps de lecture : 2 minutes Crédit photo :

photo (cc) Wendelin Jacober

Bart Brinckman
Auteur⸱e
Fabrice Claes
Traducteur Fabrice Claes

La polémique Boef suscite l’embarras, et ce, à plusieurs égards. Le rappeur néerlandais, également connu pour son vlog et sa propension au harcèlement, fait débat parce qu’il a comparé les femmes qui sortent en mini-jupe dans la rue à des « putes » et parce qu’il ne cesse d’en rajouter des couches.

Cependant, rien ne semble pouvoir atteindre l’artiste. En effet, le contraste est énorme entre le boycott organisé par les radios et sa popularité sur les plateformes numériques. Son tube le plus célèbre, Habiba, a été écouté 45 millions de fois en streaming. Le rappeur compte des centaines de milliers d’abonnés sur YouTube, Instagram et Spotify. Et jusqu’à présent, ses sponsors et les organisateurs de concerts ne le laissent pas encore tomber car ils défendent ce que l’on appelle pudiquement « leurs intérêts particuliers ».

En outre, le genre exercé est pour le moins spécifique. Boef, c’est-à-dire Bandit en néerlandais, n’a pas volé son nom d’artiste. Adolescent, il s’est retrouvé quelques années derrière les barreaux et en 2016, un tribunal néerlandais l’a condamné pour incitation à la révolte. Ce n’est pas le premier rappeur à avoir choisi la musique pour échapper à la criminalité. Si les rappeurs peuvent se révéler de véritables artistes des mots, le contenu de leurs textes manque souvent de subtilité. Toutefois, entre critique et censure, il y a un pas que l’on franchit souvent rapidement.

Autre problème : le risque de récupération politique. L’arrivée de Boef et la teneur de ses propos le rangent dans une catégorie culturelle bien particulière. Pour certains critiques, ses déclarations sexistes correspondent parfaitement à l’image de l’homme musulman misogyne. De quoi emballer le débat en ces temps de crise identitaire.

La liberté d’expression n’est pas la liberté d’insulter.

Les femmes se sentent offensées, et à juste titre. Le problème est même plus profond que cela. De jeunes filles d’origine étrangère ont toujours du mal à s’affranchir des contraintes imposées par les hommes. Au quotidien, elles luttent contre les reproches – comprenez : les insultes – qui leur sont adressés à cause de leur style de vie émancipé. Les hommes s’arrogent ainsi davantage de droits tout en remettant en question les valeurs occidentales. Les injures de Boef nous écartent donc encore plus du droit chemin.

La panacée n’existe pas. Ceci dit, les déclarations des uns et des autres, qui ont l’avantage de la clarté, ouvrent la porte au débat. Et le débat est préférable aux plaidoyers pour un boycott ou aux jugements hâtifs – et injurieux – des fans que l’on considère comme des « filles en manque d’estime de soi ».

Les excuses tardives de Boef paraissent forcées et mues par des considérations financières plutôt que par le regret. À l’ère du #MeToo, nous ne devons pas tout avaler sous le prétexte de la liberté artistique.

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