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13·01·17

Le blues des Belges n’est pas incurable

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

(c) Pixabay

Le Belge traverse une crise de confiance. Nous nous méfions de tout et de tout le monde. Telle est la conclusion d’une enquête de grande envergure publiée cette semaine dans le journal francophone Le Soir sous le titre « Noir Jaune Blues ». Vous n’en avez pas entendu parler ? Ah ces Wallons et leur système de numération indo-arabe, on y comprendra jamais rien ! Mais inutile de faire un effort de compréhension : avec mon sang arabe et ma connaissance du français, j’ai pu décortiquer le rapport et vous traduire les chiffres en bon néerlandais. Malheureusement, il vous faudra aussi vous coltiner mon interprétation, toute personnelle, de la chose.

Le principal constat à poser est que 20 ans après la marche blanche, une marche noire traverse aujourd’hui notre pays de part en part. La marche de l’espoir s’est arrêtée et a fait place au défaitisme et à la démagogie. À peine 21 % de la population fait encore confiance aux médias, soit même pas la moitié du pourcentage obtenu en 1997. Les grands leaders européens n’inspirent plus confiance à personne : de 47 % en 1997 à un bien triste 9 % aujourd’hui. Même l’enseignement, la police et la justice ne sont plus capables d’inspirer plus de deux Belges sur dix. Peut-on en vouloir aux huit autres ? Difficilement.

D’une part, car ces « institutions » ne se privent effectivement pas de nous décevoir à l’occasion. Alors que nos rues se remplissent d’hommes en treillis et d’armes lourdes, la zone de police qui couvre la commune de Molenbeek doit se contenter du plus petit budget par habitant du pays. Revoir la dotation ? « Euh oui, enfin vous savez, la dotation, on n’y a pas touché depuis des décennies, c’est un peu délicat. » Pas grave, nous n’avons qu’à donner les dernières pièces qu’il nous reste en poche pour financer quelques emplâtres sur des jambes de bois.

En attendant le « nettoyage » de Molenbeek. Et pendant ce temps, les dossiers qu’il faudrait attaquer à la brosse dure, mais auxquels personne n’ose se frotter, s’accumulent. Comme le revenu cadastral, pour n’en citer qu’un parmi tant d’autres. Sept Belges sur dix sont d’avis qu’un leader charismatique doit reprendre les rênes du pays et 57 % de la population affirment comprendre, dans une plus ou moins grande mesure, le mur construit par les Hongrois pour se protéger de l’invasion de réfugiés. En attendant la théorie de ces écervelés d’Américains et de leur clown peroxydé.

Le verre à moitié vide

D’autre part, on ne peut pas non plus en vouloir aux Belges d’avoir perdu confiance en tout, grands plaintifs que nous sommes. Effacé, hypercritique, défaitiste, le tout saupoudré d’une pointe de cynisme, le Belge sert son opinion sans modération ni demi-mesure. Pour nous, le verre n’est jamais à moitié plein. Il est pour l’instant à moitié vide, sera bientôt entièrement vide, avant que même le verre ne disparaisse. On est comme ça, c’est dans notre nature.

Et dire que nous pourrions pourtant être si fiers de notre coquille vide ! Nous sommes par exemple le seul pays qui peut se prévaloir d’être dans le top cinq de l’OCDE à la fois pour son équilibre entre travail et temps libre et pour ses indicateurs de revenu. En fait, à quelques exceptions près, notre pays est le plus grand redistributeur de richesses au monde. Alors les Vikings, on fait moins les malins, hein ?

L’avenir n’est pas rose ? Mais bon sang, ouvrez les yeux ! Et tout ce talent dont regorge notre pays ? Un tas de jeunes entrepreneurs ont de quoi faire rougir les ténors de la Silicon Valley, à l’image de Khadija Hamouchi, jeune Molenbeekoise de 25 ans, partie en Californie pour concrétiser son projet de préparer les jeunes au marché du travail par les réseaux sociaux. Quel exemple à suivre !

D’où vient cette soudaine impulsion positive ? Ma résolution de vivre plus sainement en 2017. À en croire l’American Academy of Neurology, les Belges seraient tous malades. Les sujets ayant un taux de cynisme trop élevé courent, selon l’étude, un risque de démence significativement accru. Mais que nos décideurs politiques ne se servent pas de ce résultat comme prétexte pour justifier leur manque d’ambition et de dynamisme. Nous, les Belges, avons peut-être besoin de temps en temps d’une cure de détox fondée sur des éléments un rien plus consistants que la tendance du moment.

Les téléspectateurs de la série familiale Thuis (soap opera belge diffusé sur la chaîne publique VRT, ndlr) risquent de m’envoyer au bûcher, mais il pourrait être intéressant de demander à Franky et Simonne (deux des personnages de la série, ndlr) d’entamer leurs jérémiades un quart d’heure plus tard (la série est diffusée juste après le journal télévisé, ndlr). Nous laisserions ainsi au bulletin d’information la possibilité de couvrir, en plus de l’unique sujet culturel, les phénomènes sociaux qui prolifèrent sous les radars ou les avancées scientifiques spectaculaires que font chaque jour nos chercheurs.

Mais sans pour autant renoncer au regard critique essentiel que la rédaction doit porter sur tous les malheurs de ce monde, tout en veillant à en faire un grand cirque télévisuel. Ne nous infligez pas cela. Grand cynique devant l’éternel, je veux bien faire des efforts pour vivre plus sainement, mais de grâce, ne me privez pas de ma demi-heure quotidienne d’informations-poubelles. Démence ou pas.

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