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10·05·16

Portrait: Lieven Boeve, patron de l’enseignement catholique flamand

Dave Sinardet, professeur en science politique connu des deux côtés de la frontière linguistique, vous propose en exclusivité sa sélection d’articles de la presse flamande sur DaarDaar, dans le cadre de notre campagne de crowdfunding.

Temps de lecture : 3 minutes Crédit photo :

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Auteur⸱e et
Caroline Coppens
Traducteur⸱trice Caroline Coppens

« L’enseignement catholique vend son âme. Formuler une telle proposition revient de facto à se dissoudre. » Hier, Bart De Wever, le président de la N-VA, a descendu en flammes les projets de Lieven Boeve. Le patron de l’enseignement catholique flamand veut donner aux élèves musulmans la possibilité de vivre leur religion à l’école, que ce soit par le port du foulard à la récréation ou par l’aménagement d’un lieu de prière séparé pour les élèves musulmans.

Depuis qu’il a repris le flambeau de Mieke Van Hecke à l’été 2014, le Ouest-Flamand insiste sur l’importance du concept de “l’école de dialogue” catholique. Dans cette optique, l’identité chrétienne occupe le centre, mais il y a de la place pour d’autres convictions. Le dialogue entre les idées doit permettre à chaque élève de réfléchir sur son identité.

En tant que doyen de la faculté de théologie à la KU Leuven, Boeve a réalisé une élaboration académique de ce concept. À l’Alma mater de Louvain, il a joué un rôle important dans la campagne pour le maintien de la lettre « K » dans le nom de la KU Leuven, et donc de son identité catholique. À présent, l’occasion lui est donnée d’appliquer ce concept jusque dans les cours de récréation de Flandre. « En tant qu’académicien, on reste en partie sur la touche », disait-il lors de son arrivée à la tête de l’enseignement catholique. « J’ai à présent l’occasion de mettre en pratique plus de vingt ans de réflexion, et de faire quelque chose en retour. » Boeve doit en effet sa carrière universitaire à une bourse d’études reçue après le décès prématuré de son père. Il était le premier de sa famille à poursuivre des études universitaires.

Sa croyance dans une école de dialogue était l’une des raisons pour lesquelles les évêques lui ont confié cette tâche. Avec une part de marché de deux tiers, l’enseignement catholique est de loin le réseau le plus important dans l’enseignement flamand. Mais les évêques se rendent bien compte qu’il est de plus en plus difficile de maintenir un réseau catholique, en raison justement de la sécularisation croissante de la société. « L’enseignement libre doit être fort s’il ne veut pas être constamment remis en question », avait dit Boeve précédemment. « À quoi bon être différent si l’on ne peut pas faire la différence ? »

C’est pourquoi le théologien a initié trois chantiers dès son arrivée à la rue Guimard. Il a réformé l’organisation interne, accordant un plus grand pouvoir de décision aux directions des écoles. La cerise sur ce gâteau a été le changement du nom du Vlaams Secretariaat van het Katholiek Onderwijs (VSKO, Secrétariat flamand de l’enseignement catholique), que personne n’utilisait, en Katholiek Onderwijs Vlaanderen (KOV, Enseignement catholique de Flandre). Le deuxième chantier était un agrandissement d’échelle au niveau administratif. Boeve veut ramener le nombre de directions d’écoles de 800 à 150. Le troisième chantier est l’école de dialogue catholique.

Selon les initiés, ces trois chantiers sont parcourus par un fil rouge : Boeve va trop vite. « Ce type de réforme suscite la résistance », remarque-t-on à la rue Guimard. « Pour Boeve, le plus grand défi est de convaincre les écoles. »

« La manière dont Boeve tente d’imposer sa volonté suscite des grincements de dents dans les directions des écoles », nous apprend une autre source au sein de l’enseignement catholique. « La rue Guimard est comme une organisation patronale. Le sommet doit être l’interprète de la vision de ses membres. Or, Boeve fait exactement l’inverse : il poursuit son chemin sans vérifier si tout le monde le suit. Des exemples comme le foulard à l’école sont des questions délicates. De telles décisions reviennent aux écoles. »

Pour la première fois depuis longtemps, les propositions de Boeve remettent la fracture philosophique au premier plan. Pour la N-VA et l’Open VLD, la religion n’a pas sa place à l’école. « La rue Guimard se sert habilement de la communauté musulmane pour lutter contre la sécularisation de la société », affirme Ann Brusseel, députée flamande pour l’Open VLD. Mais surtout, la question a exacerbé les relations entre le KOV et la N-VA. Le parti nationaliste craint le triumvirat formé par Boeve, la ministre flamande de l’enseignement Hilde Crevits (CD&V) et le recteur de la KU Leuven, Rik Torfs.

La méfiance est grande. Que ce soit à l’égard de la réforme imminente de l’enseignement secondaire ou de l’agrandissement d’échelle administratif, la vision de la rue Guimard est diamétralement opposée à celle de la N-VA. Une opposition qui se traduit par des réflexions incisives de Bart De Wever lui-même. « Il faut croire que pour la rue Guimard, il y a vraiment quelque chose qui cloche dans l’enseignement catholique puisqu’elle saisit toutes les occasions d’en saper l’esprit. Les solutions qui émanent de la tour d’ivoire de la rue Guimard paraissent surtout viser la suppression de l’enseignement catholique en Flandre », affirmait De Wever hier dans De Morgen. Reste à voir si Boeve parviendra à poursuivre sur sa lancée.

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