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13·11·15

L’Église, la Flandre et les réfugiés

Temps de lecture : 2 minutes Crédit photo :

(cc) Guillaume Baviere

Hier, Radio 1 a eu l’audace de consacrer un quart d’heure d’émission à la récente désignation de Mgr Jozef De Kesel au poste de primat de Belgique. Elle entendait plus particulièrement comprendre pourquoi le nouvel archevêque de Malines-Bruxelles avait fait l’objet d’une telle attention dans les médias. Le journaliste d’un quotidien X avait été invité à expliquer pourquoi un quotidien Y avait choisi d’y consacrer cinq pages spéciales. Le service public de radiodiffusion trouvait la chose disproportionnée, arguant que l’Église catholique n’intéressait en Flandre, au mieux, que trois pelés et un tondu. Si l’émission n’avait pas été présentée par l’excellente Anne Peeters, la rédaction en chef de la VRT en aurait certainement fait une nouvelle affaire d’État. Mais visiblement, elle a retenu la leçon depuis Bart Schols. Ou peut-être n’écoutait-elle tout simplement pas l’émission, ce qui est aussi possible, car si la Flandre est de moins en mois fidèle à Dieu, elle l’est aussi de moins en moins à Radio 1.

N’empêche, c’est quand même curieux, cette obsession presque grincheuse de la Flandre laïque pour la hiérarchie catholique et l’importance accordée à la désignation d’un nouvel archevêque. Oserait-on imaginer que notre Flandre déchristianisée prétende toujours secrètement à un droit de parole auprès d’un cercle dont elle ne fait depuis longtemps plus partie ? La Flandre est remplie de chrétiens sociologiques qui refusent d’être ainsi qualifiés. Pour eux, l’Église catholique doit être progressiste. Cela s’impose comme une évidence. Mais ce n’est pas aussi flagrant ailleurs dans le monde. L’Occident croit à tort qu’un leader ecclésiastique doit par définition être un homme socialement inspiré et éthiquement progressiste. Des papes conservateurs tels que Jean-Paul II et Benoît XVI étaient conspués chez nous, mais adulés partout ailleurs.

« Un libéral fait la morale aux catholiques ? Faites d’abord votre travail, monsieur De Croo.»

Cela explique également la consternation suscitée, surtout dans le chef des non-catholiques, par la non-nomination du semi-progressiste Johan Bonny à la succession de Mgr André-Joseph Léonard, en lieu et place de l’incolore et insipide Jozef De Kesel. Ils espéraient un prédicateur brillant, ils auront finalement un marmotteur frileux, dans la veine d’un Godfried Daneels. Voix douceâtre, paroles lénifiantes, pensée nébuleuse, qui traduisent probablement une honte sincère pour ses propres agissements et ceux de son Église.

Le catholicisme est une religion et non un mouvement social 2.0. Ce n’est pas un numéro d’urgence que vous appelez lorsque l’afflux de réfugiés devient soudainement ingérable. Ce n’est pas le fort de l’Église. Alexandre De Croo, notre vice-premier ministre libéral, le sait lui aussi. Lorsqu’il en appelle l’Église catholique à ouvrir ses abbayes et ses monastères inoccupés aux réfugiés syriens, afghans et irakiens, c’est parce qu’il sait que les catholiques ne le font pas spontanément. Et que lorsqu’ils le font, c’est dans la discrétion. Son appel à la charité chrétienne fait un peu trop penser au libéralisme anticlérical auquel son propre père n’a lui-même jamais adhéré. Son appel sonne comme une provocation, pas comme une invitation. En tant que vice-premier ministre, Alexander De Croo devrait savoir qu’un État doit pouvoir gérer lui-même l’accueil des réfugiés. Toute aide bénévole, d’obédience religieuse ou pas, reste la bienvenue, mais ne peut jamais devenir une nécessité. Faites donc d’abord votre travail, monsieur le vice-premier ministre, avant de mettre le doigt sur la prétendue disponibilité de bâtiments qui ne sont en rien équipés pour accueillir dignement ces êtres humains. Car si à vos yeux, la dignité se résume à une étable, un râtelier, un bœuf et un âne, vous devriez en trouver beaucoup d’autres près de chez vous, à Brakel.

De Jan Segers dans Het Laatste Nieuws
Traduit du néerlandais par Guillaume Deneufbourg

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