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Dave Sinardet : « il n’y a pas d’opinion flamande unique »
10·05·16

Dave Sinardet : « il n’y a pas d’opinion flamande unique »

Dave Sinardet est professeur en science politique à la Vrije Universiteit Brussel (VUB) et à l’Université Saint-Louis. Spécialisé dans l’étude du nationalisme et du fédéralisme, il a en outre consacré sa thèse de doctorat au rôle des médias dans les problèmes communautaires belges.

Temps de lecture : 4 minutes Crédit photo :

(c) David Sinardet

Vincent Laborderie
Auteur⸱e

Dave Sinardet, professeur en science politique connu des deux côtés de la frontière linguistique, vous propose en exclusivité sur DaarDaar et dans le cadre de notre crowdfunding, sa sélection d’articles de la presse flamande.

Chroniqueur à La Libre Belgique et De Tijd, après l’avoir été pour Le Soir, De Standaard et De Morgen, cet Anversois est l’un des rares analystes belges à intervenir régulièrement des deux côtés de la frontière linguistique. Ce fervent défenseur de DaarDaar explique son choix éditorial.

DaarDaar : Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez accepté notre demande ?

Dave Sinardet : Tout simplement parce que je trouve que DaarDaar est une initiative tout à fait nécessaire. Lorsque j’ai fait mon doctorat sur le traitement par les médias belges des questions communautaires, j’avais constaté le peu d’information sur ce qui se passait de l’autre côté de la frontière linguistique.

Outre ce manque d’information, les visions sur un même sujet étaient différentes et la présentation très partiale. Tous ces éléments font qu’il est nécessaire d’avoir un instrument comme DaarDaar qui diffuse le contenu des médias flamands, directement traduit et sans trop de « cadrage » de l’information. Cela donne tout simplement plus de diversité d’opinion au lecteur francophone.

Surtout, qu’on le veuille ou non, nous vivons tous dans le même pays : la Belgique. Il est donc important de comprendre ce qui se passe de l’autre côté de la frontière linguistique. Concernant la Flandre, DaarDaar doit aussi permettre de constater qu’il n’existe pas de point de vue flamand unique, une image qui est souvent encore présente dans les médias francophones. Il y a une grande diversité d’opinions. Voilà pourquoi DaarDaar est un beau projet qui mérite d’être soutenu et encouragé !

Quelle est la particularité des éditions week-end de la presse flamande par rapport à ce que l’on lit la semaine ?

Dave Sinardet : En Flandre, les éditions du week-end ressemblent de plus en plus à des magazines. Je sais que c’est aussi une tendance dans la presse francophone, mais elle est encore plus marquée en Flandre. Il y a des reportages plus fouillés et plus longs. L’idée est d’offrir une panoplie assez large le week-end et de prendre un peu de distance. Parfois c’est trop et si on lit toute la presse flamande du week-end on ne fait rien d’autre pendant deux jours !

Parmi les articles sélectionnés, un traite de l’ombudsman (médiateur) du Standaard. En quoi ceci vous parait-il important ?

Dave Sinardet : Il me semblait important de publier cet article qui explique aussi pourquoi il y a un ombudsman. Le Standaard est d’ailleurs le seul journal belge qui ait adopté cette démarche. Il s’agit d’une évolution importante, car les débats sur les médias et la manière de traiter l’information sont de plus en plus présents. Les journalistes contrôlent le pouvoir politique, mais, finalement, qui les contrôle ?

Concrètement, les lecteurs du Standaard écrivent à l’ombudsman pour poser des questions, mais aussi pour critiquer la manière dont on traite l’info. L’ombudsman en question est aussi une personnalité intéressante : auteur, journaliste, Tom Naegels était déjà chroniqueur au Standaard avant d’accepter cette tâche il y a cinq ans.

Chaque semaine, il traite des questions qu’il a le plus reçues de la part des lecteurs. Dans cet article, il revient sur les « danses de musulmans » dont a parlé Jan Jambon, précisément dans une interview au Standaard. La critique formulée par certains lecteurs a été de voir le Standaard passer sur cette affirmation au moment de l’interview, sans demander de précision au ministre, pour en faire ensuite un buzz. L’article est l’occasion d’expliquer le choix éditorial.

Même si on peut discuter du format adopté ici, il me semble qu’il s’agit vraiment d’un plus pour un journal d’avoir un outil d’autocritique et d’introspection. Et cela permet de faire avancer le débat sur le rôle des médias dans une démocratie.

Plusieurs de ces articles traitent de la N-VA ou de Bart de Wever et en particulier de sa position à Anvers. Est-ce que le bourgmestre d’Anvers et son parti sont toujours au centre du débat en Flandre ? 

Dave Sinardet : Oui, mais quand-même un peu moins qu’il y a quelques années. Mais en réalité trois des articles sélectionnés concernent le débat sur l’école. Il y a d’abord eu les déclarations de Lieven Boeve, le patron de l’enseignement catholique flamand, auxquelles Bart De Wever a réagi de manière très cassante. C’est parce que ce débat est intéressant que j’ai sélectionné ces articles et non parce qu’ils concernent la N-VA. Même si ce débat se déroule en Flandre et que l’enseignement est communautarisé depuis 35 ans, les problématiques sont les mêmes côté francophone avec la division en réseaux, la sécularisation, la diversité, … Les mêmes questions se posent et voir ce qui se dit côté flamand peut être une source d’inspiration. 

Ainsi, l’article de Wouter Hessels plaide pour un réseau, parce que les réalités sociétales ont fortement évoluées depuis le pacte scolaire de 1958 tandis que les structures sont toujours celles d’il y a un demi-siècle. 

Le portrait de Lieven Boeve est intéressant, car il s’agit d’une personnalité importante en Flandre. Il permet également de voir qu’il y a un projet fondamental derrière ces déclarations.

L’article de Joël de Ceulaer a quant à lui l’intérêt de montrer qu’il n’y a pas qu’une N-VA, mais des nuances à l’intérieur du parti. En l’occurrence, celles-ci sont personnalisées par Geert Bourgeois et Bart De Wever. Joël de Ceulaer est aussi un personnage intéressant. Peu connu côté francophone, il s’agit d’une voix qui compte parmi les leaders d’opinions en Flandre.

Enfin, l’éditorial de la Gazet Van Antwerpen montre comment les élections communales à Anvers en 2018 auront une importance nationale. Par le passé, celles-ci ont souvent initié des mouvements qui se retrouvent ensuite dans l’ensemble de la Flandre. Il s’agit notamment de la percée du Vlaams Blok puis du début de son déclin lorsque Patrick Janssens le bat en 2006. En 2012, la victoire de De Wever et la mise en place de la coalition N-VA, CD&V et VLD annonçait celles tant au gouvernement Flamand qu’au fédéral. Il y a donc un intérêt à comprendre ce qui se passe à Anvers, même lorsqu’on habite en Wallonie.

La question posée ici est celle de la capacité de la gauche à s’unir face à De Wever. L’éditorial fait référence à une interview croisée entre les deux leaders de Groen (Wouter Van Besien) et du sp.a (Kathleen van Brempt) dans le même journal. Alors qu’Anvers a toujours l’image d’une ville de droite, il y a aussi une gauche importante qui a un véritable projet progressiste. Notons d’ailleurs que, si le résultat des élections de 2018 suivait les derniers sondages, la majorité actuelle ne pourrait être reconduite. Que De Wever soit ou non réélu comme bourgmestre aura forcément une influence sur les élections générales de 2019.

Propos recueillis par Vincent Laborderie, initiateur de DaarDaar.

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