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25·07·17

Les Flamands de Bruxelles en 4 archétypes

Temps de lecture : 5 minutes Crédit photo :

(cc) Magnus Franklin

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Le Néerlandais type n’existe pas, de l’aveu de la reine Maxima elle-même — une déclaration qui lui avait valu les foudres de tout le pays il y a dix ans. Mais qu’en est-il de l’archétype du Bruxellois flamand ? Qui est-il, de quoi a-t-il l’air, quelles sont ses activités et pourquoi vit-il à Bruxelles ? À l’occasion de la Fête de la communauté flamande, BRUZZ a mené l’enquête. Résultat : il existe non pas un, mais quatre types de Bruxellois flamands.

1. Le Flamand du quartier Dansaert

Le Flamand du quartier Dansaert n’est pas né ici : il a infiltré la ville à travers la résidence d’étudiants « Melrose Place » ou les clapiers de la VUB. Il étudie à cette université, au RITS ou à Sint-Lukas et au terme de ses études, il s’est bâti un solide réseau flamand dont il ne sort que très rarement.

Le Flamand du quartier Dansaert dispose de moyens importants — si ce n’est économiques, du moins culturels. Il connaît la dernière mode, écoute la musique tendance et a vu tous les films difficiles d’accès — quand il ne les réalise pas lui-même.

On le trouve en groupe sur la place du village de Sainte-Catherine, à Parckfarm, au festival Plazey ou encore assis à une terrasse du nouveau haut lieu flamand en devenir de la capitale : le parvis de Saint-Gilles. On le reconnaît à son bonnet roulotté — tout comme le bas de son pantalon —, à son vélo pliable et à son petit casque qui se balance à son poignet lorsqu’il ouvre la porte de son bar à Zinnebir favori pour y lire son journal.

Ses loisirs aussi s’organisent dans des cercles flamands : lorsqu’il ne joue pas au football à la Dikken Bal Monk ou au badminton au Pluimvee, il foule les planches avec la troupe de théâtre du centre communautaire.

Le Flamand du quartier Dansaert se sent bien en tant que Flamand parmi les Flamands à Bruxelles. Pourquoi ne serait-ce pas le cas, d’ailleurs ? Après tout, il s’agit également de sa capitale, pas uniquement de celle de l’Europe. Il trouve agréable d’y trouver des dizaines d’autres cultures, même si elles ne se croisent que très peu — mais enfin, ainsi vont les choses…

2. Le vrai Bruxellois flamand

Le vrai Bruxellois flamand est né ici. Un vrai Brusseleir, donc, mais tout de même incontestablement flamand ou, pour être plus précis, brabançon. Une espèce menacée d’extinction, à l’image du vieux dialecte bruxellois, que les ketjes d’aujourd’hui maîtrisent à peine.

Le vrai Bruxellois flamand est considérablement moins sensible aux tendances que son homologue du quartier Dansaert, puisqu’il est souvent originaire de villages tels que Jette, Neder-Over-Heembeek, Koekelberg ou Anderlecht, où les bars locaux sont encore équipés d’un kicker, d’un vogelpik (jeu de fléchettes) ou d’un pietjesbak (un jeu de dés) et où l’on commande la bière au mètre courant. Il s’intéresse moins à la mode et aux autres signes extérieurs permettant de mettre en avant une bruxellité certaine. Car il n’a rien à prouver : il est né ici. Qui dit mieux ? 

Bien qu’il ait grandi dans un melting-pot culturel, son cercle d’amis se compose principalement de néerlandophones : des connaissances glanées tout au long de son parcours de vie : écoles ainsi qu’associations sportives, culturelles et de jeunesse. « Je n’ai pas beaucoup d’amis non néerlandophones », admet Zito Ysenbaert, qui a grandi à Koekelberg et vit désormais à Ixelles. « Rien ne nous oblige à nous côtoyer, donc si personne n’y met du sien… »

Filip Van der Elst, Laekenois de naissance, reconnaît lui aussi évoluer essentiellement dans des cercles flamands. « Et à l’école secondaire, la plupart de mes camarades venaient de la périphérie. La plupart du temps, les habitants de ces communes ne portent pas Bruxelles dans leur cœur. »

3. L’aventurier

L’aventurier n’est pas né à Bruxelles, mais il cherche à nouer un lien profond avec la ville. Il vit dans le célibat, le détachement et est à la recherche — de quoi, au juste, il n’en sait rien, mais quoi qu’il en soit, il espère le trouver dans cette grande ville rude, anonyme et cosmopolite.

« Les grandes villes sont de véritables pôles d’attraction pour les célibataires hautement qualifiés en fin de vingtaine, début de trentaine », explique la thérapeute Rika Ponnet. « Ils sont attirés par la vie dans une métropole anonyme et multilingue telle que Bruxelles, où ils constituent une minorité. Il s’agit souvent de personnes qui ont des difficultés à se fixer quelque part, qui privilégient l’autonomie à la relation amoureuse et aux rapports sociaux. Et ils apprécient qu’on leur parle moins de leur parcours différent : ici, ils ne sont pas considérés comme de drôles de zèbres. En allant vivre à Bruxelles, ils mettent un peu plus de distance : ils recherchent volontairement la différence. »

Le rapport de l’aventurier au multiculturalisme de Bruxelles est le même qu’à un pays étranger : il s’y rend non pas pour y retrouver ses semblables, mais pour fraterniser avec la population locale et donc d’autres cultures.

L’enclave flamande, il essaie dès lors de l’éviter en vivant avec une foule de colocataires parlant d’autres langues, en cherchant des loisirs dans des clubs non néerlandophones et en fréquentant les cafés d’Uccle.

Mais la commodité de la langue maternelle commune est grande et après des années de tentatives, l’aventurier finit tout de même souvent par s’arrimer à l’îlot flamand. Il a donc tout intérêt à bien parler le français ou, encore mieux, à se mettre en couple avec un(e) non-néerlandophone. À défaut, il finira par connaître le sort qu’il déteste tant : atterrir dans la catégorie numéro un.

4. Le Bruxellois flamand non néerlandophone

Il s’agit du Bruxellois qui ne parle pas le néerlandais à la maison, mais qui suit sa scolarité dans cette langue. C’est donc un produit de l’enseignement flamand, mais se sent-il flamand pour autant ?

« Bah, pas vraiment », avoue Ilias El Fanis, qui vient de terminer sa sixième année à l’athénée néerlandophone d’Anderlecht. À la maison, il parle français, et parfois quelques mots d’arabe. Mais il fait ses études en néerlandais depuis la maternelle. « Je me sens avant tout Bruxellois », explique-t-il. Guylian Antoine, qui a fréquenté l’institut Sint-Niklaas, abonde dans ce sens. « Je ne me sens pas flamand. Bruxelles, c’est… Bruxelles, tout simplement. Je suis heureux d’avoir eu la possibilité d’être bilingue. Mon groupe d’amis est très diversifié. En secondaire, c’étaient à la fois des néerlandophones et des francophones, au club de sport, ce sont des francophones et désormais, j’étudie le droit à Louvain. Parce que l’université est meilleure, pas par amour de la Flandre. Mais ma copine est néerlandophone. »

Utilisent-ils le néerlandais en dehors de l’école ? « Les informations, c’est plutôt en français, mais il m’arrive aussi de regarder VTM », explique Ilias. « Et la série Thuis (rires). Sur Facebook, mon fil d’actualité est aussi bien en néerlandais qu’en français. Je clique lorsque quelque chose m’intéresse, pas en fonction de la langue de l’article. »

Reste bien évidemment la musique néerlandophone. « Le rappeur Boef est plutôt connu à l’école », reconnaît Ilias. Antoine écoute également Stikstof et Jebroer. Pour DJ Lefto, qui a grandi dans un environnement francophone, mais a été à l’école en néerlandais, rien de nouveau sous le soleil. « Le Bruxellois, c’est du français mélangé à du néerlandais. C’est de l’argot, un nouveau dialecte, qui gagne d’ailleurs de plus en plus le respect des francophones. Mais quoi qu’il en soit, à Bruxelles, le mot d’ordre dans le hip-hop, c’est souvent l’unité : on est tous dans la même galère. Et on doit ramer ensemble pour s’en sortir. »

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